Tchad : manifestation contre la présence française « La France, dégage ! », « Non à la colonisation ».

Plusieurs centaines de personnes ont manifesté à N’Djamena contre la présence de la France au Tchad, qu’elles accusent de soutenir la junte militaire au pouvoir.

Une situation, pour la France dont nous analysons les principales causes actuelles dans la seconde partie du présent article.

Des manifestants ont brûlé au moins deux drapeaux de l’ancienne puissance coloniale et vandalisé plusieurs stations-service Total, « symbole » de la France, arrachant des pompes et emportant certains produits exposés, a constaté un journaliste de l’AFP. Douze policiers ont également été blessés, selon un responsable policier qui a requis l’anonymat.

Cette manifestation, organisée par la plateforme d’opposition de la société civile Wakit Tamma, avait été autorisée par les autorités. Un fort dispositif policier entourait le cortège et était déployé dans la ville.

Soutien constant

Dans la soirée, le gouvernement a fait savoir, dans un communiqué, « que les problèmes du Tchad restent strictement nationaux et doivent se débattre entre Tchadiens » et a réinvité « tous les Tchadiens à se joindre plutôt au processus de dialogue inclusif » devant déboucher sur des « élections libres et démocratiques » après une transition de 18 mois.

Le ministre de la communication, Abderaman Koulamallah, a aussi « exprimé sa reconnaissance à la communauté internationale et aux pays amis, notamment à la France, pour leur soutien constant au peuple tchadien dans cette phase de la transition ».

Le 20 avril 2021, l’armée annonçait que le président tchadien Idriss Déby Itno, à la tête d’un pouvoir très autoritaire depuis 30 ans, avait été tué au front contre une énième rébellion. Le même jour, son fils Mahamat Idriss Déby Itno était proclamé par l’armée « président de transition » à la tête d’une junte composée de 15 généraux. Il a alors dissous immédiatement le Parlement, congédié le gouvernement et abrogé la Constitution.

Il était aussitôt adoubé par la communauté internationale – France, Union européenne (UE) et Union africaine (UA) en tête, alors que les mêmes sanctionnent des militaires putschistes ailleurs en Afrique – notamment parce que son armée est indispensable dans la guerre contre les jihadistes au Sahel.

« La France, dehors« .

Lors de la marche, samedi, plusieurs élèves et collégiens sur des motos, ont rejoint les manifestants, entonnant en choeur « La France, dehors ».

« Je manifeste parce que la France veut encore nous imposer le système Deby », a lancé un jeune lycéen, bandeau blanc sur la tête.

« Si nous continuons à souffrir aujourd’hui depuis l’indépendance, c’est par la faute de la France qui nous empêche d’être réellement indépendants », a renchéri Idriss Moussa, un enseignant arabophone.

« Nous nous réjouissons que les Tchadiens prennent de plus en plus conscience de notre lutte et nous rejoignent », a indiqué à l’AFP Max Loalngar, coordinateur de la plateforme Wakit Tamma. « La France installe des dictateurs sur notre tête. Nous demandons juste que notre peuple soit respecté ».

En juin 2021, le chef de l’Etat tchadien avait envisagé une prolongation de la transition. Il a annoncé, le 1er mai, le report du dialogue national, à la demande du Qatar, médiateur d’un « pré-dialogue » qui piétine depuis deux mois à Doha entre la junte et les innombrables groupes rebelles. La présidence française avait réagi en se disant « attachée » à un dialogue dans les « meilleurs délais possibles », puis en proposant quelques jours plus tard l’aide de la France.

Le 6 avril, la plateforme d’opposition « Wakit Tamma » avait annoncé la suspension de ses pourparlers avec la junte, en dénonçant notamment « une communauté internationale qui s’obstine à soutenir vaille que vaille un régime illégal et illégitime ».

La France est, depuis quelques temps, en très mauvaise posture dans toute la région du Sahel, faisant face à de plus en plus d’animosité à son égard de la part des populations des pays qui composent cette partie de l’Afrique. Et il faut dire que son positionnement vis à vis du conflit russo-ukrainien, qui n’est que pure soumission à l’impérialisme états-unien, condamnant et prenant des sanctions toujours plus anti Démocratiques à l’encontre de la Russie au nom du « Bien » ne fait que provoquer le rejet d’une Afrique qui en a assez de voir une France donneuse de leçon alors qu’elle pratique, elle-même, une politique internationale – particulièrement avec les pays émergeants et dits « du tiers-monde » -, contraire aux valeurs qu’elle affirment, digne d’un pur colonialisme, à l’instar de tout cet Occident se considérant comme le centre du Monde, considérant que ses positions et avis sont l’expression de tout « l’opinion public mondial », alors que l’Europe et l’Amérique du Nord (qui composent l’Occident) ne représente que 22% de la population mondiale.

Emmanuel Macron et l’ensemble de la classe politique française, feraient donc mieux, d’une part, de revoir sa position vis à vis du conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui n’est qu’une guerre voulue, organisée et produite par les Etats-Unis, qui utilise ses marionnettes que sont les pays européens comme bouclier et bouc émissaire pour le reste du monde qui finira par ne plus accepter de se voir dicter « le bien et le mal » par les mêmes qui ne l’applique que selon leurs propres intérêts, et, d’autre part, d’enfin prendre l’Afrique – particulièrement la partie francophone – pour un partenaire qui est son égal et que l’on respecte entant que tel, dans un esprit de coopération et d’amitié, plutôt que de continuer à la considérer comme son sous-fifre, son « éternelle colonie ». Ne pas agir ainsi, de la part de la France, ne peut que l’assurer de se voir définitivement remplacée par les Etats et, surtout, les peuples d’Afrique et ce bien plus vite qu’elle n’oserait l’imaginer.

Joseph Kouamé (traitement de l’actualité) & Christian Estevez (analyse)

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