France : Le sénateur Joël Guerriau, en garde à vue, soupçonné d’avoir drogué une députée en vue d’une agression sexuelle, a été testé positif à de nombreux drogues

Le tribunal de Paris a validé la mise en garde à vue de l’élu Joël Guerriau, pour « administration à une personne, à son insu, d’une substance visant à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes en vue de commettre un viol ou une agression sexuelle ». Des traces de nombreuses drogues diverses ont été découvertes dans le sang du parlementaire.

Le parquet de Paris a confirmé ce placement en garde à vue de M. Guerriau pour « administration à une personne, à son insu, d’une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes pour commettre un viol ou une agression sexuelle », des faits qui auraient eu lieu dans la nuit de mardi à mercredi 15 novembre, et pour lesquels la victime, « une femme, a porté plainte ».

Deux sources proches du dossier ont confirmé à l’Agence France-Presse (AFP) que cette femme est députée, mais le parquet n’a pas souhaité commenter ce point.

Perquisitions à domicile

La personne aurait ressenti des malaises après avoir pris un verre dans la nuit de mardi à mercredi chez le sénateur parisien âgé de 66 ans, avec qui elle n’a aucun lien intime, comme l’a confirmé le ministère public. Les analyses de son organisme ont révélé la présence d’ecstasy, a de nouveau indiqué le parquet de Paris, entraînant par la suite le dépôt d’une plainte par la députée.

D’après le parquet, M. Guerriau a été appréhendé ce jeudi 16 novembre et placé en garde à vue par les enquêteurs du 3e district de police judiciaire dans le cadre de l’enquête ouverte en flagrance, une procédure évitant la demande de levée de son immunité parlementaire. Une perquisition effectuée à son domicile a confirmé la présence d’ecstasy.

Des analyses accablantes

Le sénateur Joël Guerriau, qui est accusé d’avoir drogué une députée sans son consentement, a été testé positif à de nombreuses drogues. La présence d’amphétamines, d’opiacées, de cannabis, de cocaïne, de méthadone et de MDMA, a en effet été détectée dans son sang, a appris « BFMTV » de source proche de l’enquête.

Banquier de profession, élu à la Haute Assemblée depuis 2011, Joël Guerriau est secrétaire du Sénat et vice-président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées. Il est membre du parti « Horizons » de l’ancien premier ministre Edouard Philippe, qui fait partie de la majorité présidentielle.

Le déroulement des faits

La députée a raconté aux enquêteurs la nature de cette soirée. Cette femme, dont on ne connaît pas l’identité, a indiqué devoir initialement dîner au restaurant avec le sénateur, avant que ce dernier ne lui propose de manger à son domicile.

Tout au long de la soirée, le sénateur de Loire-Atlantique propose à son invitée plusieurs verres qu’il prépare dans sa cuisine. Selon elle, il adopte un « comportement étrange ». Elle note en particulier qu’il monte l’intensité du variateur de lumière au cours de la soirée. Il la regarde également avec « insistance » et dit vouloir qu’ils « fassent la fête ensemble ».

La soirée prend ensuite une tournure étrange. La députée affirme qu’environ vingt minutes après avoir bu une gorgée du verre que l’élu lui a servi, elle se sent mal soudainement: elle dit ressentir des sueurs froides et sentir son rythme cardiaque s’accélérer.

Elle prend peur, mais décide de ne pas le montrer à son hôte, et préfère commander un taxi et quitter les lieux dès 22 heures pour l’Assemblée nationale. Arrivée au Parlement, elle explique sa situation à deux de ses collègues et les secours arrivent rapidement. Sur place, elle subit une première série d’examens. Ils confirment que la députée a les pupilles très dilatées et un rythme cardiaque élevé.

Conduite à l’hôpital Lariboisière, dans le 10e arrondissement de Paris, la députée est soumise à une prise de sang et des analyses urinaires. Ces nouveaux examens révèlent la présence d’ecstasy dans son organisme. L’élue assure avoir toujours entretenu une relation amicale avec Joël Guerriau et ne pas comprendre le comportement du sénateur, alors que les premiers éléments de l’enquête laissent penser qu’il aurait pu la droguer à son insu.

L’avocat du sénateur bien embarrassé pour s’exprimer

« Nous sommes fort loin de l’interprétation scabreuse que l’on peut déduire à la lecture des premiers articles de presse », a réagi auprès de l’AFP Me Rémi-Pierre Drai, avocat de M. Guerriau. Le conseil s’est « indigné de voir que des éléments de l’enquête se retrouvent dans la presse ».

« Donc soit le parquet en est responsable et cela me scandalise encore une fois, soit le parquet n’y est pour rien et alors il doit s’interroger sur l’identité de l’auteur de cette violation et enquêter. » « Sur le fond, je ne donnerai aucune information, non seulement parce que je suis tenu au secret de l’enquête, mais surtout par respect pour mon client et pour la plaignante, dont je m’étonne que le nom ne soit pas livré, contrairement à celui de mon client », a ajouté Me Drai.

« La confrontation entre Joël Guerriau et la députée est finie et a permis à mon client de confirmer avec force sa version des faits qui ne permet pas à ce stade de l’enquête de caractériser une quelconque infraction. L’enquête se poursuivra comme il se doit », a indiqué l’avocat, Rémi-Pierre Drai.

Ce vendredi 17 au matin, interrogé à ce propos sur France Inter, le ministre de la transition écologique et secrétaire général du parti « Horizons », Christophe Béchu, a déclaré avoir découvert les faits « avec consternation et effarement ». « Si c’est vrai, c’est effroyable. Demain matin à 9 heures, nous aurons un bureau politique », durant lequel la situation sera « évidemment évoquée », a fait valoir M. Béchu, ajoutant que le sénateur Guerriau « ne peut évidemment pas rester au parti » si les faits qui lui sont reprochés sont confirmés. Le ministre a encore assuré que le parti prendrait « toutes les mesures adéquates pour tirer les conséquences logiques d’un tel comportement ».

Didier Maréchal

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