Le candidat antisystème, Javier Milei, remporte la présidentielle en Argentine

Ce dimanche 20 novembre, les Argentins ont largement fait le choix d’élire Javier Milei comme leur nouveau président de la République. En devançant de près de 11 points (55,6 % des voix, contre 44,3 %) son rival et concurrent Sergio Massa, le ministre de l’Economie du gouvernement sortant. Ce dernier, a reconnu sa défaite avant même l’annonce officielle des résultats. (Avec AFP).

Le nouveau président de l’Argentine est un économiste ultralibéral « antisystème » qui se veut comme un « libérateur » du pays. Javier Milei a remporté, ce dimanche 19 novembre, le second tour de l’élection présidentielle argentine. Il a distancé le ministre centriste de l’Économie Sergio Massa de plus de onze points, obtenant 55,6 % des voix, contre 44,3 % pour son adversaire, selon des résultats officiels partiels avec 99 % des voix décomptés.

Le président élu de 53 ans, qui prendra ses fonctions le 10 décembre, a promis, dans son discours de victoire, « la fin de la décadence » et la « reconstruction de l’Argentine », tout en avertissant qu’il n’y aura « pas de demi-mesures ».

« C’est une nuit historique pour l’Argentine », a-t-il lancé à plusieurs milliers de partisans en liesse, à l’extérieur du QG de campagne à Buenos Aires. « Nous sommes confrontés à des problèmes monumentaux : l’inflation (143 % sur un an, NDLR), la stagnation, l’absence de véritables emplois, l’insécurité, la pauvreté et la misère », a énuméré le président-élu. « Il n’y a pas de place pour la tiédeur ou les demi-mesures », a prévenu celui qui, depuis deux ans, prône, notamment, des coupes « à la tronçonneuse » dans la dépense publique, pour une économie pathologiquement surendettée, avec 40 % de la population sous le seuil de pauvreté. Il a redit sa détermination « à remettre en ordre les comptes budgétaires, et régler les problèmes de la Banque centrale », une institution qu’il avait dit vouloir « dynamiter ».

« La caste tiene miedo ! » (« La caste a peur ! ») ; « Viva la libertad, carajo ! » (« Vive la liberté bordel ! »), deux des slogans fétiches du candidat Milei résonnaient à l’extérieur de son QG de campagne parmi la foule.

Avant même l’annonce des résultats, Sergio Massa a concédé sa défaite. Javier Milei « est le président que la majorité des Argentins a élu pour les quatre prochaines années », a déclaré Sergio Massa, qui était arrivé en tête au premier tour le 22 octobre. Peu avant l’annonce des résultats officiels partiels, il a indiqué, devant ses partisans réunis à son QG de campagne à Buenos Aires, avoir appelé Javier Milei pour « le féliciter et lui souhaiter bonne chance ».

Un scrutin beaucoup moins serré que prévu

L’ampleur de la victoire a surpris. Des sondeurs avaient donné un léger avantage à Milei, mais nombre d’analystes prédisaient un résultat « au vote près », dans une élection crispée et indécise comme rarement en 40 ans depuis le retour de la démocratie, avec deux projets hautement antagoniques.

D’un côté, Massa, ministre de l’Économie depuis 16 mois, qui promettait un « gouvernement d’unité nationale », et un redressement économique graduel, préservant l’État-providence, crucial dans la culture argentine.

Face à lui, l’ « outsider » Milei, qui se décrit comme un « anarcho-capitaliste ». Ce « polémiste » de plateaux TV a surgi en politique il y a deux ans, résolu à « tronçonner l’État-ennemi » et à dollariser l’économie. S’il a tendu la main à « tous les Argentins et dirigeants politiques » voulant se joindre à lui, le président élu a aussi mis en garde contre d’éventuelles résistances sociales à ses réformes. « Nous savons qu’il y a des gens qui vont résister, qui voudront maintenir ce système de privilèges pour certains mais qui appauvrit la majorité. Je leur dis ceci : tout ce qui est dans la loi est permis, mais rien [de ce qui est] en dehors de la loi. » « Milei a fait campagne en promettant des résultats rapides. On voit tous que ce n’est pas possible, mais c’est l’idée qui a pénétré son électorat : le changement rapide, la tronçonneuse. Aussi je crois qu’il n’y aura guère de temps pour une lune de miel », a prédit Lara Goyburu, politologue de l’Université de Buenos Aires. Pour le politologue Gabriel Vommaro, de l’Université de San Martin, Javier Milei, par son discours belliqueux, notamment envers des secteurs mobilisés, comme la fonction publique, apporte un risque « de confrontation politico-sociale »

Milei, « c’est comme Scaloni (le sélectionneur de l’Argentine championne du monde 2022, NLDR) : personne ne croyait en lui, et pourtant au final il a bien fait les choses. Espérons qu’il en soit de même », assure Sonia Do Santo, une enseignante de 36 ans, radieuse dans la foule des partisans.

À l’étranger, des dirigeants pour lesquels Milei avait exprimé une affinité l’ont chaleureusement félicité : l’ex-président états-unien Donald Trump a dit sa conviction qu’il va « faire à nouveau de l’Argentine un grand pays ». Et l’ex-président brésilien Jair Bolsonaro a déclaré que « l’espoir brille à nouveau » dans la région. Sur X, l’ex-leader de droite a ajouté espérer que les « bons vents atteindraient les États-Unis et le Brésil » afin que « l’honnêteté, le progrès et la liberté reviennent ».

Washington a « félicité » Javier Milei pour sa victoire, le secrétaire d’État Antony Blinken saluant « la forte participation et le déroulement pacifique du scrutin ». Quant au président brésilien Lula, que Milei avait qualifié de « communiste corrompu », il a souhaité « bonne chance et succès » au nouveau gouvernement argentin, dans un message sur le réseau social X dans lequel il n’a pas mentionné Javier Milei. « Je souhaite bonne chance et succès au nouveau gouvernement. L’Argentine est un grand pays qui mérite tout notre respect. Le Brésil sera toujours disponible pour travailler avec nos frères argentins », a écrit Luiz Inacio Lula da Silva.

Joseph Kouamé

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