Anthropologie : A Madagascar, de mystérieuses peintures rupestres font le lien entre différentes formes d’art issues de plusieurs continents

Après une décennie d’analyses approfondies, un groupe de scientifiques internationaux a enfin déchiffré des symboles énigmatiques découverts dans une grotte de Madagascar en 2013. En se basant sur de multiples sources, les historiens ont établi des liens avec des cultures distantes de milliers de kilomètres, se trouvant à la fois au Nord de l’Afrique et au Sud de l’Asie. (Source : « The conversation »).

Dans les profondeurs de la réserve naturelle de Beanka, à Madagascar, une découverte réalisée en 2013 renforce les théories sur le développement multiculturel de l’île. L’exploration de la grotte d’Andriamamelo il y a une décennie avait révélé la présence de nombreuses peintures rupestres. Cela a déclenché des études approfondies sur l’origine de ces représentations, certaines étant liées à la langue austronésienne pratiquée à Bornéo vers 2000 avant l’ère commune. Durant la dernière décennie, plusieurs articles ont abordé les progrès de la recherche. Cependant, un article publié récemment, le 12 décembre dernier, sur le site « The Conversation », offre des détails supplémentaires sur le travail des scientifiques.

Des dizaines de symboles étranges décryptés

En 2013, les chercheurs reproduisaient 72 dessins, qui imprégnaient les murs de la grotte d’Andriamamelo à l’encre noire. Parmi les symboles étudiés, on retrouve six représentations d’humains, seize animaux, plusieurs formes hybrides et diverses lettres appartenant à un alphabet non identifié à cette époque. Pour déchiffrer ces écrits anciens, l’équipe composée de scientifiques malgaches, britanniques et états-uniens s’est penchée sur les archives et les études universitaires précédemment menées.

Les historiens ont su identifier plusieurs esquisses, renvoyant à des divinités égyptiennes. Une figure humanoïde à figure de canidé rappelle le dieu des nécropoles Anubis. Un oiseau anthropomorphe renvoie au dieu-scribe Thot, tandis qu’une sorte de faucon s’apparente à Horus. L’étude approfondie des peintures permet aux chercheurs d’estimer leur datation, entre -300 à -30 avant l’ère commune Un autre mystérieux caractère est issu d’un autre pays africain : une sorte de lettre en forme de « M ». Ce signe possède des similarités avec la lettre ሐ (« hä ») issue de l’alphabet amharique, langue sémitique d’Éthiopie pratiquée depuis des siècles. Il s’avère cependant que ce symbole avait déjà été observé ailleurs, inscrit sur les murs d’une grotte de Bornéo il y a 2 000 ans.

L’identité culturelle et historique de Madagascar suscite le débat chez les anthropologues depuis de nombreuses années. L’île, bordant les côtes africaines, se situe à 7 500 kilomètres des rivages de Bornéo. Comment expliquer les similitudes entre les formes d’écriture antique retrouvées en Asie du Sud-Est et dans la grotte d’Andriamamelo ? Les premiers campements humains à Madagascar datent d’il y a 2 000 ans.

Mais le sujet de la colonisation de l’île fait débat. « The Conversation » relève que des personnages tels qu’Antiochos IV ont mené de larges campagnes de colonisation durant l’ère ptolémaïque en Égypte, entre le IVe et le Ier siècle avant l’ère commune. Les marchands romains et grecs circulaient alors au large des côtes africaines.

Les peintures de la grotte d’Andriamamelo soulèvent autant de questions qu’elles fascinent. Pour les universitaires, ces découvertes sont autant de clés pour comprendre la colonisation de l’île et l’extinction de la mégafaune après l’arrivée de l’Homme à Madagascar. De plus amples recherches permettront d’en apprendre plus sur les langues austronésiennes s’étant développées sur le pourtour de l’océan Indien, et ainsi de mieux appréhender l’incroyable histoire multiculturelle et les influences variées de l’île de Madagascar.

Hélène de Branco

Laisser un commentaire