Iran : quatre hommes kurdes accusés d’espionnage en faveur d’Israël exécutés

Lundi 29 janvier, quatre membres de la minorité kurde d’Iran ont été exécutés par pendaison, malgré les efforts de défense des droits de l’Homme qui dénonçaient un procès inéquitable, les accusant d’espionnage pour Israël.

Les quatre hommes kurdes exécutés ce lundi 29 janvier 2024 avaient été arrêtés le 23 juillet 2022 alors qu’ils préparaient une opération contre un centre du ministère de la Défense à Ispahan, grande ville du centre de l’Iran, pour le compte du Mossad, a indiqué l’agence « Mizan Online » de l’Autorité judiciaire. Le ministère du Renseignement avait alors annoncé avoir « identifié un réseau d’agents de l’organisation sioniste d’espionnage, dont tous les membres avaient été arrêtés », toujours selon « Mizan ».

Condamnés à mort en septembre 2023, ils ont été pendus lundi à l’aube.

Selon l’agence judiciaire, les quatre hommes avaient été recrutés par le Mossad, le service de renseignement extérieur d’Israël, « environ un an et demi avant l’opération ». Ils avaient ensuite été envoyés dans des pays africains pour « des stages d’entraînement dans les centres militaires de ces pays ».

Des officiers du Mossad étaient présents à ces formations, a précisé l’agence, qui n’a pas fait état de leur appartenance à l’ethnie kurde, très discriminée au sein de la République islamique et dont les membres sont condamnés à mort de manière disproportionnée, selon plusieurs organisations de défense des droits de l’Homme.

L’exécution des quatre hommes, tous âgés de moins de 30 ans, semblait imminente, alors que leurs proches avaient été convoqués dimanche pour une dernière rencontre avant leur pendaison à la prison de Ghezel Hesar, dans la ville de Karaj, proche de Téhéran.

Elle survient dans un contexte de recrudescence des pendaisons en Iran, où, selon les mêmes ONG, deux personnes ont été exécutées en moyenne chaque jour de janvier.

D’après « Amnesty International », qui décrit les quatre hommes comme des « dissidents kurdes iraniens », la peine capitale avait été prononcée à leur encontre « à l’issue d’un procès secret manifestement inéquitable ». Ils avaient également été contraints à des « aveux » à la télévision iranienne, selon « Amnesty ». L’Iran a aussi « harcelé et intimidé sans relâche leurs familles pour avoir défendu leurs proches », a ajouté l’ONG.

65 exécutions en janvier 2024

Leur exécution « est fondée sur des aveux obtenus sous la torture et sans procès équitable. Elle est considérée comme une exécution extrajudiciaire », a déclaré Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur du groupe « Iran Human Rights » (IHR), basé en Norvège, qui évalue à 65 le nombre de détenus déjà pendus en ce mois de janvier 2024.

« Je ne pardonnerai ni n’oublierai ce qui s’est passé aujourd’hui ! », a commenté sur « X » Joanna Taimasi, l’épouse d’un des quatre hommes, qui vit désormais hors d’Iran et a fait campagne ces derniers jours pour que leur vie soit épargnée.

Âgés de 26 à 28 ans et originaires de régions à population kurde de l’Ouest de l’Iran, ils avaient été « privés de leurs droits fondamentaux à une représentation juridique, à des visites et même à la communication avec leurs familles », a dénoncé l’association de défense des droits des Kurdes « Hengaw ». « Même selon les normes de la République islamique d’Iran, les exigences minimales d’un procès équitable n’avaient pas été respectées dans leur cas », a regretté Hengaw.

Dans une lettre ouverte, 20 groupes de défense des droits de la personne, dont l’IHR, ont exhorté la Haut-Commissaire adjointe aux droits de l’Homme de l’ONU, Nada Al-Nashif, à « reconsidérer » sa visite prévue en Iran vendredi, compte tenu de l’augmentation « alarmante » du nombre d’exécutions et du risque que ce voyage puisse être utilisé comme un « outil de propagande » par Téhéran.

Les mêmes critiques ont été formulées la semaine dernière après que Mohammad Ghobadlou a été pendu, alors que ce jeune Iranien souffrait de « problèmes mentaux » et que le jugement le concernant avait été annulé.

Iran et Israël se livrent depuis des années une guerre larvée.

Israël accuse l’Iran, qui dément, de vouloir acquérir la bombe atomique et dit chercher par tous les moyens à l’en empêcher. Israël veut aussi contrer l’influence de l’Iran au Moyen-Orient.

Téhéran l’accuse en retour d’être à l’origine d’une série de sabotages et d’assassinats visant son programme nucléaire.

En août 2023, l’Iran avait affirmé avoir déjoué un projet « très complexe » lancé par le Mossad de « sabotage » de son industrie de missiles balistiques. Quelques mois plus tôt, en février, Téhéran avait accusé Israël d’être responsable d’une attaque par drones d’un site militaire à Ispahan.

Joseph Kouamé

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