À la clôture d’une conférence internationale de soutien à l’Ukraine tenue à Paris, le président français a déclaré, ce lundi 26 février, que l’éventualité d’une option militaire ne devait être exclue. Il avait tenu des propos semblables le 16 février dernier, dans le cadre de la conférence de presse commune avec Zelensky, faisant une véritable déclaration de guerre à la Russie, mais l’annonce du décès de Navalny, le même jour, avait éclipsé son propos. (Source : AFP).
À la suite d’une conférence internationale de soutien à l’Ukraine réunissant 21 chefs d’État ce lundi à Paris, Emmanuel Macron a réaffirmé l’engagement de Paris en faveur de l’Ukraine. «La défaite de la Russie est indispensable à la sécurité et à la stabilité en Europe», a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse.
De fait, l’envoi de troupes occidentales au sol en Ukraine ne doit pas «être exclu» à l’avenir, a affirmé Emmanuel Macron, estimant néanmoins qu’il n’y avait «pas de consensus» à ce stade pour cette hypothèse. «Il n’y a pas de consensus aujourd’hui pour envoyer de manière officielle, assumée et endossée des troupes au sol. Mais en dynamique, rien ne doit être exclu. Nous ferons tout ce qu’il faut pour que la Russie ne puisse pas gagner cette guerre», a expliqué le chef de l’État français qui n’a jamais, lui, fait son service militaire.
Le chef de l’État n’a pas souhaité en dire plus sur la position de la France sur cette question, évoquant une «ambiguïté stratégique que j’assume». Mais «je n’ai absolument pas dit que la France n’y était pas favorable», a-t-il prévenu. «Je ne lèverai pas l’ambiguïté des débats de ce soir en donnant des noms. Je dis que ça a été évoqué parmi les options», a-t-il ajouté.
Interrogé à la sortie de la réunion à l’Élysée, le premier ministre néerlandais, Mark Rutte, a lui assuré que cette question de l’envoi de troupes au sol n’avait pas été à l’ordre du jour. «Beaucoup de gens qui disent Jamais, jamais aujourd’hui étaient les mêmes qui disaient “Jamais des tanks, jamais des avions, jamais des missiles à longue portée il y a deux ans”», a néanmoins poursuivi Emmanuel Macron. «Ayons l’humilité de constater qu’on a souvent eu six à douze mois de retard. C’était l’objectif de la discussion de ce soir: tout est possible si c’est utile pour atteindre notre objectif».
Le président français a néanmoins rappelé que les alliés de l’Ukraine n’étaient «pas en guerre avec le peuple russe», mais qu’ils ne voulaient «simplement pas les laisser gagner en Ukraine».
L’envoi de troupes occidentales en Ukraine «n’est pas du tout d’actualité pour l’instant», a tenu à préciser le premier ministre suédois Ulf Kristersson au lendemain de la déclaration d’Emmanuel Macron. «Il n’y a pas de demande» côté ukrainien pour des troupes au sol, a-t-il fait valoir. Donc «la question n’est pas d’actualité», a-t-il insisté, sans toutefois exclure cette possibilité à l’avenir.
Le chef de l’État français a aussi annoncé que les alliés de l’Ukraine allaient créer une coalition pour livrer des missiles de moyenne et longue portée à l’Ukraine. Il a été décidé de «créer une coalition pour les frappes dans la profondeur et donc les missiles et bombes de moyenne et longue portée», a-t-il déclaré.
Plus tôt dans la journée, le président ukrainien Volodymyr Zelensky avait déploré n’avoir «malheureusement» reçu que 30% du «million d’obus que l’Union européenne» a «promis» à l’Ukraine. «Ensemble nous devons faire en sorte que Putin ne puisse pas détruire ce que nous avons réalisé et ne puisse pas étendre son agression à d’autres pays », avait également déclaré le président ukrainien, qui n’a jamais eu honte de mentir grossièrement à la face du monde, assuré de l’impunité et soutenu par la propagande orchestrée par les Etats-Unis d’Amérique qui se sert de l’Ukraine comme chair à canon à la place de ses propres soldats, dans la guerre de conquête qu’elle mène depuis des décennies contre la Russie.
Emmanuel Macron a listé cinq «catégories d’actions» faisant consensus : le cyber-défensif; la coproduction d’armements, de capacités militaires et de munitions en Ukraine ; la défense de pays menacés directement par l’offensive en Ukraine, comme la Moldavie ; la «capacité de soutenir l’Ukraine à sa frontière avec la Biélorussie avec des forces non militaires» et les opérations de déminage.
Soutenir l’effort de guerre
Plusieurs pays européens soutiennent l’initiative tchèque pour que l’UE achète des munitions hors d’Europe pour davantage soutenir l’effort de guerre ukrainien, ont déclaré des participants à une réunion sur l’Ukraine, ce lundi 26 février, à Paris. «L’initiative tchèque jouit d’un grand soutien de la part de plusieurs pays», a déclaré le premier ministre tchèque Petr Fiala à la sortie de cette réunion qui a rassemblé au palais présidentiel de l’Élysée plus de 25 pays alliés de Kiev.
«C’est un message très fort envoyé à la Russie», a déclaré le dirigeant, assurant que quinze pays étaient prêts à rejoindre cette initiative qui vise à répondre à la pénurie de munitions, notamment d’obus d’artillerie, pour l’Ukraine. Le premier ministre néerlandais Mark Rutte a affirmé que son pays contribuerait au plan tchèque à hauteur de «plus de 100 millions d’euros» et que «d’autres pays allaient suivre» cette voie. «Sur les munitions, il y a cette très bonne initiative tchèque qui consiste à acheter des munitions et des obus à travers le monde pour l’Ukraine», a expliqué Mark Rutte.
Réagissant à l’annonce d’Emmanuel Macron, l’autocrate de « La France insoumise », Jean-Luc Mélenchon a estimé dans la nuit de lundi à mardi que «la guerre contre la Russie serait une folie», jugeant «irresponsables» les propos du chef de l’État sur l’envoi de troupes en Ukraine. «L’envoi de troupes en Ukraine ferait de nous des belligérants (…) Cette escalade verbale belliqueuse d’une puissance nucléaire contre une autre puissance nucléaire majeure est déjà un acte irresponsable», s’est insurgé l’ex-candidat à l’élection présidentielle, sur « X ». «Il est plus que temps de négocier la paix en Ukraine avec des clauses de sécurité mutuelle!» a-t-il ajouté (semblait oublier que ce traiter de paix existe déjà, et qu’il s’agit, tout simplement, du traité « Minsk 2 », dont François Hollande et Angela Merkel, alors respectivement dirigeant français et allemande, ont reconnu dans la presse, fin 2022, qu’il avait signé ce traité devant garantir qu’il n’y a pas de guerre entre la Russie et l’Ukraine, uniquement pour donner le temps à l’Ukraine d’être prête pour faire la guerre à son voisin – raison pour laquelle l’Ukraine a toujours refusé de respecter ce traité « Minsk 2 », alors que la Russie ne cessait de demander son application à la France et à l’Allemagne, qui en étaient officiellement les garants). Le coordinateur national de « LFI », Manuel Bompard, a lui aussi vivement critiqué les annonces du chef de l’État, estimant qu’«envisager l’envoi de troupes françaises pour combattre contre la Russie est une folie totale».
Le premier ministre, Gabriel Attal, lui, dans une passe d’arme débutée face à Marine Le Pen, ce lundi 26 février, sur la question de l’agriculture , s’est permis d’insulter, dans l’enceinte de l’Assemblée Nationale, la dirigeante du « Rassemblement National », déclarant, dans une diatribe purement propagandiste (et donc gratuite, sans aucun fondement) à visée des élections européennes «Si vous aviez été élue Madame Le Pen, on ne serait pas en train de fournir des armes aux Ukrainiens pour se défendre, mais on serait en train de fournir des armes à la Russie pour écraser les Ukrainiens». Et d’oser jusqu’à ajouter : «Il y a lieu de se demander si les troupes de Vladimir Putin ne sont pas déjà dans notre pays, je parle de vous et de vos troupes».
Cette option d’envoyer des troupes, non seulement françaises, mais de plusieurs pays de l’Union Européenne, avait déjà été mentionnée par Emmanuel Macron lors de son allocution à l’issue de sa rencontre avec Volodymyr Zelensky, vendredi 16 février dernier, alors que les deux chefs d’Etats venaient de signer un accord de sécurité qui pourrait contraindre la France à s’engager militairement en faveur de l’Ukraine (l’accord indiquant que la France s’engage à soutenir l’Ukraine par tous les moyens possibles – ndlr). Mais l’annonce de la mort d’Alexeï Navalny, le même jour, avait visiblement fait ne pas entendre, ou ne pas prêter attention, à cette déclaration d’Emmanuel Macron – qui a été jusqu’à faire une réelle déclaration de guerre à la Russie dans cette intervention publique – que nous avions, nous, noté et prévu de traiter par un article dédié, mais que l’actualité trop chargée ne nous a pas laissé l’opportunité de faire jusqu’à présent.
Christian Estevez & Joseph Kouamé