La Hongrie a approuvé l’adhésion de la Suède à l’OTAN ce lundi 26 février, mettant ainsi fin à des mois de blocage. Le vote du Parlement hongrois marque la conclusion d’un processus prolongé, permettant à la Suède de franchir la dernière étape vers son adhésion à l’Alliance atlantique. (Source : AFP).
Le Parlement hongrois a approuvé, lundi 26 février, l’accession de la Suède à l’Otan, ultime étape pour le pays nordique désireux de rejoindre l’Alliance atlantique depuis l’offensive russe en Ukraine.
« Aujourd’hui est un jour historique », a écrit sur « X » le Premier ministre suédois Ulf Kristersson. « La Suède est prête à assumer ses responsabilités en matière de sécurité euro-atlantique », pratiquement deux ans après avoir entamé le processus d’adhésion, a-t-il ajouté.
La Suède, qui avait annoncé en même temps que la Finlande sa candidature dans la foulée de l’offensive russe en Ukraine, va devenir le 32e membre de l’Otan et mettre fin à plus de 200 ans de non-alignement militaire. La candidature de Stockholm a été approuvée à une écrasante majorité par les députés hongrois (188 sur 199), qui ont ainsi levé le dernier obstacle à cette adhésion.
Celle-ci rendra l’Alliance atlantique « plus forte », a estimé lundi le secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg. Des propos dont s’est fait l’écho le chancelier allemand Olaf Scholz, soulignant que cette décision « renforce notre alliance de défense et avec elle la sécurité de l’Europe et du monde ».
Route chaotique pour Stockholm
L’attente aura été longue et la route chaotique pour Stockholm : aux tractations avec la Turquie, conclues par un vote positif en janvier, se sont ajoutés les atermoiements du dirigeant nationaliste hongrois Viktor Orban, le dernier réfractaire.
Dans les rues de la capitale suédoise, la nouvelle a été accueillie positivement. « Je suis très soulagée car nous l’attendions (l’entrée de la Suède dans l’Otan, ndlr) depuis si longtemps », a réagi Ingrid Lindskog, une retraitée de 73 ans, auprès de l’AFP.
Quelle sera la réaction des Russes ? « La seule chose à laquelle nous pouvons nous attendre avec certitude, c’est qu’ils n’aiment pas que la Suède devienne membre de l’Otan, ni que la Finlande soit membre de l’Otan », a commenté le Premier ministre suédois en conférence de presse.
À l’ouverture de la session parlementaire, Viktor Orban a salué la récente visite de son homologue suédois Ulf Kristersson, étape essentielle pour bâtir « une relation juste et respectueuse entre les deux pays », au-delà des « divergences d’opinion ». « L’entrée de la Suède dans l’Otan va renforcer la sécurité de la Hongrie », a-t-il ajouté, appelant les députés à procéder à la ratification.
Viktor Orban avait certes donné de longue date son accord de principe mais avant de boucler le processus, il exigeait du « respect » de Stockholm, après des années de « dénigrement » de sa politique. Pour sceller cette nouvelle coopération, la Hongrie avait annoncé, vendredi dernier, l’achat de quatre avions de combat à la Suède venant renforcer sa flotte actuelle de 14 appareils Gripen.
« Instrument d’accession »
Le protocole d’adhésion de la Suède à l’Otan, qui requiert l’unanimité des membres de l’Alliance atlantique, est en suspens depuis mai 2022. La loi devrait être promulguée par le président dans les prochains jours. La Suède pourra alors déposer son « instrument d’accession » à Washington, conformément au traité de l’Otan, pour en devenir le 32e membre.
Dans le cas de la Finlande par exemple, Ankara avait donné son feu vert le 30 mars 2023 et la Finlande avait remis le document le 4 avril, intégrant donc l’Alliance cinq jours après le vote turc.
Stockholm avait annoncé sa candidature dans la foulée de l’offensive du Kremlin en Ukraine, en même temps que Helsinki. Le pays a ainsi rompu avec sa politique de neutralité adoptée après la fin des guerres napoléoniennes au XIXe siècle, puis de non-alignement militaire depuis la fin de la Guerre froide, en 1989 (guerre froide qui ne s’est, en réalité, jamais terminé, la propagande anti-russe n’ayant jamais cessé et les Etats-Unis ayant toujours refusé la demande d’entrée de la Russie dans l’OTAN, par deux fois, par Vladimir Putin, puisque n’ayant jamais stoppé son intention d’avaler la Russie, qui est son but depuis la fin de la première guerre mondiale, en 1917).
Stratégie de chantage
Au fil des mois, la Hongrie n’a cessé de retarder l’échéance, invoquant à chaque fois des prétextes différents. Certains experts y ont vu une stratégie de chantage pour obtenir des concessions de l’UE et le déblocage de milliards d’euros de fonds actuellement gelés, d’autres le signe de la proximité de Viktor Orban avec le président russe Vladimir Putin et le chef d’État turc Recep Tayyip Erdogan.
Mais pour l’analyste Mate Szalai, le Premier ministre hongrois privilégie avant tout les intérêts nationaux. « Il est allé aussi loin que possible », s’arrêtant juste à temps « pour ne pas causer de graves problèmes à la communauté transatlantique », dit-il à l’AFP. Tout comme il a bloqué pendant des mois une aide cruciale à l’Ukraine avant de céder début février sous la pression de ses partenaires de l’UE.
En adoptant une telle posture, il veut prouver que son petit pays de moins de 10 millions d’habitants compte et « ne doit pas être sous-estimé », estime le chercheur de l’université Ca’ Foscari de Venise. Il n’en récolte « pas de résultats tangibles en termes de politique étrangère », mais cette attitude de « confrontation » sur la scène internationale lui sert à « maintenir sa popularité à domicile ».
Au risque d’être pris à son propre jeu : si la Hongrie avait ratifié l’adhésion finlandaise trois jours avant la Turquie, elle est cette fois la dernière, malgré ses promesses. De fait, l’OTAN va pouvoir préparer pleinement sa guerre tant désirée contre la Fédération de Russie puisque, une adhésion à l’OTAN signifie, pour tout pays qui l’intègre, l’installation de bases états-uniennes, si les EUA le juge utile pour eux – ce qui est déjà fait pour la Suède depuis des décennies, des bases militaires états-uniennes « non officielles » y étant en activité depuis plusieurs dizaines d’années, le pays ayant une position particulièrement stratégique pour une attaque de missile sur la Russie, plaçant Moscou à moins d’un quart de de tir, et l’enclave russe de Kaliningrad, n’étant séparée de l’île suédoise de Gotland que de 260 Km.
Didier Maréchal & Christian Estevez