Ce mardi 1er octobre, le nouveau Premier ministre français a présenté aux députés les grandes lignes de son programme politique. Voici l’essentiel de son intervention.
Impôts, immigration, proportionnelle… Michel Barnier a pris la parole ce mardi 1er octobre pour exposer sa feuille de route, qu’il avait jusque-là gardée sous silence, tant il est ardu de trouver un équilibre pour ce Premier ministre sans majorité, tiraillé entre les attentes opposées de ses partenaires et un budget très serré.
Michel Barnier présente sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale à 15 heures. Comme révélé par « Europe 1 », il n’a pas sollicité un vote de confiance des députés. Le Premier ministre souhaite que les « grandes entreprises réalisant d’importants bénéfices » contribuent davantage. Il propose de « réfléchir à des ajustements raisonnables » de la réforme des retraites, en collaboration avec les partenaires sociaux. Les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie seront reportées « jusqu’à fin 2025 ». Barnier promet une revalorisation du Smic de 2 % « à partir du 1er novembre ». En clôture de son discours, il appelle les partis à « surmonter » leurs « divisions » et « querelles ». « Les Français méritent notre engagement », conclut-il.
Pour terminer sa déclaration de politique générale, le Premier ministre a affirmé que « les Français mérit(ai)ent notre engagement ». « Recherchons des chemins communs, dégageons des compromis, relevons la ligne d’horizon », a-t-il déclaré aux élus. « Prenons soin de la République, elle est fragile. Prenons-soin de l’Europe, elle est nécessaire. Prenons-soin de la France et des Français, ils nous demandent de dépasser nos divisions et nos querelles et d’agir pour l’intérêt supérieur du pays », a-t-il ajouté.
Comme l’avait révélé Europe 1 lundi, Michel Barnier n’a pas sollicité de vote de confiance des députés. Ce scrutin, bien que non obligatoire, requiert une majorité absolue pour être remporté. « C’est trop risqué, d’autant que 17 parlementaires, désormais ministres, ne peuvent pas participer au vote », avait précisé l’entourage du Premier ministre à Europe 1.
Israël : « Nous pensons à tous les otages dont nous exigeons la libération »
En fin de déclaration, Michel Barnier a évoqué l’actualité internationale, et notamment la situation au Proche-Orient près d’un an après l’attaque meurtrière du 7 octobre. « Nous pensons à toutes les victimes des attaques terroristes du Hamas. Nous pensons à tous les otages dont nous exigeons la libération, et parmi eux à nos deux compatriotes », a affirmé le Premier ministre, ajoutant que les pensées sont de même tournées vers « toutes les victimes civiles palestiniennes ». « La violence n’a que trop duré. La France appelle à un cessez-le-feu à Gaza », a-t-il enchéri.
« La France restera aux côtés du peuple ukrainien »
« La France restera aux côtés du peuple ukrainien », a déclaré Michel Barnier, sous les applaudissements de l’hémicycle. Un peuple ukrainien « qui continue avec courage de se battre pour défendre sa souveraineté et sa liberté, pour faire respecter l’intégrité territoriale de son pays mais aussi pour défendre les valeurs européennes que nous avons en partage », a-t-il poursuivi.
Les débats sur le projet de loi concernant la fin de vie reprendront début 2025
Le Premier ministre a indiqué que les débats au Parlement sur le projet de loi concernant la fin de vie reprendront « en début d’année prochaine ». « Sans attendre, nos efforts en faveur du développement des soins palliatifs seront renforcés dès 2025 », a ajouté Michel Barnier.
Barnier rappelle la nécessité du « respect de l’État de droit »
Michel Barnier a rappelé, ce mardi, devant l’Assemblée nationale, la nécessité du « respect de l’État de droit », après la polémique créée par les propos de son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui avait déclaré ce week-end que l’État de droit n’était « pas intangible, ni sacré ».
« La fermeté de la politique pénale, que les Français demandent, est indissociable du respect de l’État de droit et des principes d’indépendance et d’impartialité de la justice, auxquels je suis personnellement profondément et définitivement attaché », a indiqué le Premier ministre.
« Nous ne maîtrisons plus de manière satisfaisante notre politique migratoire »
Michel Barnier a estimé, ce 1er octobre, devant les députés, que la France « ne maîtrise plus de manière satisfaisante » sa « politique migratoire », et qu’elle n’atteint donc « plus de manière satisfaisante » son « devoir républicain d’intégration ».
Promettant d’agir avec « gravité » et « dignité », le Premier ministre a annoncé que son gouvernement proposerait « de faciliter la prolongation exceptionnelle de la rétention des étrangers en situation irrégulière, pour mieux exécuter les obligations de quitter le territoire français ». Il envisage aussi de restreindre « davantage l’octroi de visas » pour les pays qui rechignent à délivrer les laissez-passer nécessaires à l’expulsion de leurs ressortissants.
Le gouvernement va proposer « des peines de prison courtes » pour certains délits
Sur le volet judiciaire, Michel Barnier a annoncé que le gouvernement allait proposer « des peines de prison courtes » pour certains délits. Le Premier ministre veut également « limiter » les « possibilités » d’aménagement de peines.
La santé mentale, grande cause nationale de 2025, confirme Michel Barnier
Comme il l’avait indiqué au journal de 20H de France 2 , Michel Barnier fera de la santé mentale « la grande cause nationale » en 2025. « C’est un enjeu qui me tient particulièrement à cœur. Et je veux le dire clairement, la santé mentale est l’affaire de tous : Etat, collectivités, entreprises, associations », a-t-il souligné.
Déserts médicaux : Barnier annonce la création d’un « programme Hippocrate »
Pour lutter contre les déserts médicaux, Michel Barnier et son gouvernement proposeront la création d’un « programme Hippocrate ». « Je souhaite que les internes, français et étrangers, s’engagent volontairement, pour une période donnée et grâce à l’accompagnement de l’Etat et des collectivités, à exercer dans les territoires qui manquent le plus de médecins », a déclaré le Premier ministre.
Le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole sera repris « sans délai » par le gouvernement
Le projet de loi d’orientation pour la souveraineté agricole, qui n’avait pas pu être examiné au Sénat après avoir été adopté à l’Assemblée, à cause de la dissolution, sera repris « sans délai » par le gouvernement, a annoncé, ce mardi, Michel Barnier.
« Il faut renforcer la transparence sur les marges pratiquées dans la grande distribution (…) Et encourager les contrats tripartites entre agriculteurs, transformateurs et distributeurs », a déclaré le Premier ministre, ajoutant vouloir « soutenir » les agriculteurs « lorsqu’ils sont frappés par les crises ».
L’école restera « la priorité », confirme Michel Barnier
Comme il l’avait déclaré au moment de la passation de pouvoir avec Gabriel Attal , Michel Barnier a assuré que l’école restera une « priorité ». La priorité « de donner à tous nos enfants une école qui leur permette d’apprendre, de forger leur jugement et, à force de travail, de prendre leur avenir en main et de participer à celui du pays », a-t-il poursuivi, énumérant plusieurs objectifs à atteindre « ensemble ».
Revalorisation du Smic de 2% « dès le 1er novembre »
« Nous revaloriserons le Smic de 2% dès le 1er novembre, en anticipation de la date du 1er janvier », a annoncé le Premier ministre, Michel Barnier . « Il reste dans notre pays des branches professionnelles dans lesquelles les minimas sont inférieurs au Smic, ce n’est pas acceptable et cela devra faire l’objet de négociations rapides », a ajouté le chef du gouvernement.
Barnier propose la création d’un « nouveau livret d’épargne dédié à l’industrie » pour « amplifier l’ambition industrielle »
Le Premier ministre a proposé, ce mardi, la création d’un « nouveau livret d’épargne dédié à l’industrie » pour « soutenir » la « dynamique industrielle » en France. « Notre pays doit et veut amplifier son ambition industrielle », a t’il dit. « Le gouvernement encouragera une meilleure mobilisation de l’épargne des Français pour soutenir cette dynamique industrielle, par exemple à travers un nouveau livret d’épargne dédié à l’industrie. »
Le gouvernement de Michel Barnier « ne fera pas de miracles »
Devant les députés, Michel Barnier a affirmé que son gouvernement, qu’il a composé difficilement, « ne fera pas de miracles », mais qu’il était « prêt à gravir un à un les obstacles, et à s’efforcer de répondre aux préoccupations des Français ».
Les « lignes rouges » de Michel Barnier
Le Premier ministre, évoquant les lignes rouges de certains groupes politiques à l’Assemblée, a énuméré « ses propres lignes rouges », pointant du doigt le racisme, l’antisémitisme, les violences faites aux femmes, le communautarisme, « les accommodements sur la défense de la laïcité » et la discrimination.
Il a également déclaré qu’il n’acceptera « aucune remise en cause des libertés conquises au fil des ans, grâce à la loi Veil, désormais protégée par la Constitution, à la loi sur le mariage pour tous (mariage homosexuel – ndlr) et aux dispositions législatives sur la PMA (procréation médicalement assistée – ndlr) ».
La « culture du compromis », leitmotiv du gouvernement Barnier
Véritable marque de fabrique de Michel Barnier, « le dialogue et la culture du compromis » seront « un principe de gouvernement ».
Assurance-chômage : Barnier redonne la main aux partenaires sociaux pour négocier
Le Premier ministre a annoncé redonner la main aux syndicats et au patronat pour négocier « sur notre système d’indemnisation du chômage » ainsi que sur « l’emploi des seniors », enterrant du même coup la réforme de l’assurance chômage prévue par le gouvernement Attal.
Les partenaires sociaux « sont les mieux placés pour apporter des solutions », a estimé le chef du gouvernement, demandant que cette négociation s’ouvre « dès les prochaines semaines », alors que les règles actuelles d’indemnisation des demandeurs d’emploi ont été prolongées par décret jusqu’au 31 octobre prochain.
Nouvelle-Calédonie : Barnier annonce le report des élections provinciales « jusque fin 2025 »
Michel Barnier a annoncé, mardi, que les élections provinciales en Nouvelle-Calédonie seront reportées « jusque fin 2025 » et que le projet de loi constitutionnelle de dégel du corps électoral, à l’origine des émeutes qui ont enflammé l’archipel, ne « sera pas soumis au Congrès ».
Le Premier ministre s’est dit désireux de s’impliquer « personnellement » dans ce dossier. « Une mission de concertation » conduite par les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, se rendra sur place « prochainement ». « Une nouvelle période doit maintenant s’ouvrir, consacrée à la reconstruction économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie, à la recherche d’un consensus politique sur son avenir institutionnel », a-t-il encore dit.
Sur les retraites, Barnier veut « réfléchir à des aménagements raisonnables » de la réforme, avec les partenaires sociaux
Michel Barnier s’est dit, devant l’Assemblée nationale, ouvert à des « aménagements raisonnables et justes » , en concertation avec les partenaires sociaux, sur la très décriée réforme des retraites.
« Certaines limites de la loi votée le 15 avril 2023 peuvent être corrigées. Les questions des retraites progressives, de l’usure professionnelle, de l’égalité entre les femmes et les hommes face à la retraite méritent mieux que des fins de non-recevoir », a-t-il déclaré, en précisant vouloir « proposer aux partenaires sociaux de réfléchir à des aménagements, raisonnables et justes ».
Barnier « prêt à une réflexion sans idéologie sur le scrutin proportionnel »
Michel Barnier s’est dit « prêt à ouvrir une réflexion et une action sans idéologie sur le scrutin proportionnel » pour les élections législatives, réclamé par une partie de la classe politique, de la gauche au Rassemblement National en passant par le MoDem (parti centriste, principal soutient et partenaire d’Emmanuel Macron – ndlr).
« J’ai bien entendu les appels à davantage de représentativité », a assuré le Premier ministre. Sans entrer dans le détail, il a relevé que ce mode de scrutin était « déjà mis en œuvre au Sénat et dans les collectivités et pratiqué, à des degrés différents d’ailleurs, chez beaucoup de nos voisins ».
« Les travaux de planification » dans le domaine de l’énergie et du climat « vont reprendre immédiatement », annonce Barnier
Le Premier ministre a annoncé que les travaux de planification dans le domaine de l’énergie et du climat « vont reprendre immédiatement » sur la base des travaux déjà effectués. Cela se fera « avec les outils dont nous disposons: la Stratégie française énergie-climat, le troisième plan national d’adaptation au changement climatique, la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie », a-t-il déclaré. Ces textes sont très attendus par les acteurs du secteur et les associations de protection de l’environnement.
Annonce d’ « une contribution exceptionnelle » des « Français les plus fortunés »
Michel Barnier a indiqué mardi qu’il demanderait « une participation au redressement collectif aux grandes entreprises qui réalisent des profits importants » ainsi qu' »une contribution exceptionnelle » aux « Français les plus fortunés », au nom de l' »exigence de justice fiscale ».
« Nous le ferons sans remettre en cause notre compétitivité », a ajouté le chef du gouvernement, lors de son discours de politique générale prononcé devant l’Assemblée nationale, en affirmant que l’effort proviendra aux « deux tiers » de la réduction des dépenses. En abordant le budget pour 2025.
Barnier veut ramener le déficit à 5% du PIB en 2025, sous les 3% en 2029
Le Premier ministre a souhaité, de ce fait, « ramener le déficit à 5% (du Produit intérieur brut, NDLR) en 2025 » et le faire revenir « sous le plafond de 3% en 2029 », dans le respect des « engagements européens » de la France.
Pour Michel Barnier, « la véritable épée de Damoclès, c’est notre dette financière colossale (…) qui, si l’on n’y prend garde, placera notre pays au bord du précipice », a-t-il assuré en référence à la position délicate de son gouvernement, qui peut être renversé à tout moment par une motion de censure.
« Nous sommes collectivement sur une ligne de crête », en raison de la situation budgétaire de la France, a estimé Michel Barnier devant l’Assemblée nationale. « Nous devons faire beaucoup. Et si nous n’arrivons pas à faire beaucoup dans tous les domaines, nous devons faire bien pour répondre aux attentes des Françaises et des Français. Et nous devons faire avec peu, dans une économie de moyens et de ressources », a déclaré le Premier ministre.
Les députés LFI brandissent des cartes d’électeurs dans l’hémicycle lors du discours de Barnier
Les députés LFI ont symboliquement brandi, ce mardi 1er octobre, des cartes d’électeurs dans l’hémicycle, en réaction à la déclaration de politique générale du Premier ministre, Michel Barnier, dont ils considèrent l’arrivée à Matignon comme un contournement du résultat des dernières élections.
Des députés « Insoumis » ont levé leurs cartes depuis leurs sièges alors que le chef du gouvernement entamait son discours, avant que des huissiers de l’Assemblée ne leur demandent de de les ranger. Les députés du « Nouveau Front populaire » fustigent l’arrivée de Michel Barnier à Matignon, estimant que le poste devait revenir à une personnalité de gauche après que leur alliance est arrivée en tête des dernières élections législatives.
Rappelons, tout de même, qu’aucun des députés français de gauche qui se plein n’a tenu ce type de propos pour commenter les élections dans des pays comme l’Espagne et la Pologne, où la droite, bien qu’arrivant largement en tête des scrutins, s’est vue privée du pouvoir gouvernemental, l’ensemble des partis de gauches, dans ces deux pays, s’étant unis pour former une majorité parlementaire, après des élections qui ne leurs ont donné que très peu de voix de la part de leurs citoyens (le socialiste Sanchez, en Espagne, ayant même dû pactiser avec les indépendantistes catalans pour pouvoir s’assurer la majorité nécessaire pour devenir premier ministre et gouverner alors que, tout comme lors des élections législatives précédentes, son parti (le Parti Socialiste) avait largement été désavoué par les urnes avec un score très inférieur à celui de la droite conservatrice).
Didier Maréchal & Christian Estevez