L’allocution du président français, Emmanuel Macron, de ce 5 mars au soir, n’a pas uniquement fait fortement réagir que la Russie. Les partis français d’opposition l’ont également fortement critiqué sur plusieurs points, dont certains purement de politique nationale française.
À la veille d’un sommet européen à Bruxelles, le président Emmanuel Macron s’est adressé aux Français mercredi 5 mars au soir, dans une allocution télévisée marquée par « l’inquiétude croissante face à la guerre en Ukraine ». Insistant sur la nécessité de renforcer la défense européenne, il a mis en garde contre la « menace russe » qui plane sur la France et l’Europe. « Face à ce monde de danger, rester spectateur serait une folie », a-t-il affirmé, appelant les États membres de l’Union Européenne à augmenter leurs dépenses militaires.
Parmi les propositions avancées en vue du sommet, le chef de l’État a notamment défendu l’idée que ces hausses de dépenses militaires ne soient pas prises en compte dans le calcul des déficits publics. Sur le plan national, il a promis des investissements supplémentaires dans la défense sans augmentation d’impôts, précisant que cela nécessiterait des « réformes, des choix, du courage ».
Une opposition vent debout contre un « sacrifice social »
Ces annonces ont immédiatement provoqué une levée de boucliers parmi les oppositions, qui dénoncent un discours préparant la population à de nouveaux sacrifices économiques et sociaux. Du côté de la droite nationaliste, le président du Rassemblement national, Jordan Bardella, a ironisé sur le « réveil tardif » d’Emmanuel Macron face aux enjeux de puissance. Il a également plaidé pour la suspension du Green Deal, qu’il qualifie « d’arme de destruction massive de notre agriculture et de notre industrie », et pour la mise en place d’une préférence nationale et européenne dans l’achat de matériel militaire.
De son côté, Nicolas Dupont-Aignan (Debout la France) a dénoncé, sur « X », « la manipulation par le mensonge et la peur ».
À gauche, la crainte d’une « économie de guerre » sur le dos des Français
La critique la plus virulente est venue du parti d’extrême gauche « La France insoumise », qui accuse Emmanuel Macron de préparer une « guerre sociale » sous couvert de renforcement de la défense. Manon Aubry a fustigé un président cherchant à « sacrifier les Français pour financer les dépenses militaires », alors qu’il n’y aurait « plus d’argent pour l’hôpital ou les écoles ». Même constat pour le député Manuel Bompard, qui voit dans cette allocution une tentative d’« imposer au peuple une nouvelle salve de sacrifices sociaux » par la peur.
Jean-Luc Mélenchon a quant à lui dénoncé « un changement d’époque » sous influence américaine, s’opposant fermement à toute logique belliciste : « À bas la guerre ! »
Clémence Guetté, elle, a pointé du doigt un projet international « sans indépendance ni recours à l’ONU », et une politique intérieure relevant selon elle d’une véritable « guerre sociale ».
Les « écologistes « partagés sur l’effort de défense
Marine Tondelier, secrétaire nationale des Écologistes (EELV), a adopté une position plus nuancée. Si son parti n’est « a priori pas contre » une hausse du budget de la défense, elle a dénoncé un financement qui pèserait uniquement sur les classes les plus précaires, dans un contexte budgétaire austère. « Sans augmenter les impôts des plus riches, Emmanuel Macron ne pourra ni financer cet effort de guerre ni le faire accepter à la population », a-t-elle prévenu.
Un débat explosif à l’approche du sommet européen
L’allocution présidentielle a donc ravivé les tensions politiques en France, sur fond de débat européen sur le financement de la défense. Alors que certains appellent à un sursaut militaire face à la Russie, d’autres dénoncent une fuite en avant qui pèserait sur les Français les plus fragiles. Le sommet de Bruxelles promet d’être décisif quant à l’orientation que prendra cette politique de défense renforcée.
Didier Maréchal