Ce jeudi 7 mars 2025, Martine Aubry, maire emblématique de Lille depuis 2001, a annoncé sa décision de démissionner “mi-mars”, à un an des élections municipales, en faveur de son premier adjoint, Arnaud Deslandes. À 74 ans, elle a exprimé une grande sérénité, bien que son discours ait été empreint d’émotion, évoquant un “cœur pincé” face à cette transition.

Un passage de témoin réfléchi

Lors d’une conférence de presse à Lille, Martine Aubry a souligné que, bien qu’elle ait consacré 30 ans à la ville et 24 ans en tant que maire, le moment était venu de laisser la place à une nouvelle génération. Elle a précisé que son successeur serait élu maire lors d’un prochain conseil municipal extraordinaire, qui pourrait se tenir le 21 mars 2025. “Je le fais vraiment avec une très grande sérénité, même si le cœur est pincé”, a-t-elle avoué en essuyant quelques larmes.

Arnaud Deslandes, héritier désigné

Arnaud Deslandes, âgé de 42 ans, succédera à Aubry après avoir fait toute sa carrière dans l’ombre de la maire sortante. Diplômé de Sciences Po Lille, il est arrivé à la mairie en 2005 en tant que stagiaire, et a progressivement grimpé les échelons. Collaborateur de cabinet, puis directeur de cabinet et enfin adjoint chargé de la solidarité et de la cohésion des territoires, il occupe le poste de premier adjoint depuis 2023.

Martine Aubry a salué son “engagement profond” pour Lille et ses “grandes transformations” dans la ville. Elle a mis en avant leur partage des mêmes priorités : “la solidarité et l’accompagnement de tous” ainsi que “la lutte contre les inégalités”. Arnaud Deslandes a exprimé son humilité face à ce défi, reconnaissant que “Martine Aubry est un maire d’exception” et qu’il a “tout appris” à ses côtés, notamment “le sens du travail, la rigueur”.

Une fin de mandat empreinte de fierté

Avant de faire l’annonce de sa démission, Martine Aubry a pris soin de défendre son bilan, affirmant avoir contribué à faire de Lille “une capitale culturelle, rayonnante et entreprenante”. Elle a aussi mis en avant sa volonté de préserver les quartiers populaires et d’assurer une mixité sociale dans la ville, un choix qu’elle considère comme sa plus grande fierté.

Des ambitions politiques à l’horizon

Martine Aubry a précisé qu’elle quitterait toutes ses fonctions politiques, tout en insistant sur le fait qu’elle ne prenait pas sa “retraite politique”. Elle a exprimé son désir de “participer au renouveau des idées de gauche”. En revanche, elle a écarté la possibilité que des figures comme la sénatrice Audrey Linkenheld ou le député Roger Vicot, qui aspirent à la mairie, jouent un rôle majeur dans cette succession.

Une succession mal anticipée ?

Le passage de relais intervient dans un contexte politique tendu, avec plusieurs candidats déjà annoncés pour les municipales de 2026. Le député Roger Vicot, qui a exprimé ses ambitions dès septembre 2023, a pris les devants en menant une campagne active, malgré les réserves de Martine Aubry. De son côté, le candidat écologiste Stéphane Baly, qui avait perdu de peu face à Aubry en 2020, a confirmé sa candidature pour EELV, tandis que la députée macroniste Violette Spillebout et le candidat LR Louis Delemer se positionnent aussi en vue des prochaines élections.

Réactions et critiques

La démission de Martine Aubry a suscité des réactions variées. La maire de Paris, Anne Hidalgo, a exprimé sa gratitude pour l’énergie déployée par Aubry pour transformer Lille, tout comme Olivier Faure, premier secrétaire du PS, qui a salué son courage politique. En revanche, les écologistes à la mairie ont déploré une transition qui, selon eux, manque d’une vision renouvelée pour la ville, en particulier en matière d’environnement.

Violette Spillebout, ancienne alliée d’Aubry, a exprimé son désaveu en dénonçant ce “passage en force” et la volonté de Martine Aubry d’imposer son successeur, “jamais élu sur son nom”. De leur côté, les Insoumis lillois ont critiqué ce “bilan d’un entre-soi socialiste à bout de souffle”, estimant que cette succession n’incarne pas le renouveau tant attendu par les citoyens.

Un avenir incertain pour Lille

Ce passage de témoin à Lille, malgré les années de leadership de Martine Aubry, laisse un avenir incertain à la ville, avec une compétition féroce pour la mairie. Arnaud Deslandes parviendra-t-il à maintenir l’héritage de sa prédécesseure et à répondre aux attentes des Lillois face à une opposition grandissante et diversifiée ? La réponse pourrait bien se jouer dès les prochaines élections municipales en 2026.

Didier Maréchal