Le changement d’heure, appliqué deux fois par an en France et dans plusieurs pays, a été instauré en 1976 pour économiser de l’énergie. Pourtant, cette mesure fait aujourd’hui l’objet de nombreux débats, et son avenir reste incertain. Comment fonctionne-t-il ? Quels sont ses impacts ? Et pourquoi est-il toujours en vigueur ? Retour sur son histoire et les discussions autour de son maintien.
Une première tentative en 1916
L’idée d’un ajustement de l’heure pour optimiser l’ensoleillement remonte au XVIIIᵉ siècle. En 1784, Benjamin Franklin suggère dans Le Journal de Paris d’adapter les horaires pour réduire la consommation de bougies. Toutefois, l’idée ne trouve pas d’écho immédiat.
C’est en 1916, en pleine Première Guerre mondiale, que la France applique pour la première fois un changement d’heure. À l’initiative du député André Honnorat, la mesure vise à économiser du charbon, alors essentiel pour l’industrie et l’éclairage. Plusieurs pays européens, dont l’Allemagne et le Royaume-Uni, adoptent alors des dispositifs similaires.
Après la Seconde Guerre mondiale, la France abandonne l’heure d’été en 1944. Le pays, divisé entre zone occupée et zone libre, avait connu des discordances horaires, et la mesure n’apparaît plus comme une priorité après la guerre.
Le retour du changement d’heure après le choc pétrolier
Le changement d’heure est réintroduit en France en 1976, sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing. Le choc pétrolier de 1973, qui entraîne une flambée des prix de l’énergie, pousse le gouvernement à chercher des solutions pour réduire la consommation d’électricité. L’idée est simple : en décalant les horaires, on profite mieux de la lumière naturelle et on limite l’usage de l’éclairage artificiel.
Un décret du 19 septembre 1975 fixe officiellement les modalités de ce retour, appliqué pour la première fois dans la nuit du 27 au 28 mars 1976.
Comment fonctionne le changement d’heure ?
Le changement d’heure suit un cycle annuel, avec un passage à l’heure d’été et un retour à l’heure d’hiver :
•Passage à l’heure d’été : dernier dimanche de mars. On avance les horloges d’une heure (à 2h, il est 3h). Cela réduit le temps de sommeil d’une heure.
•Passage à l’heure d’hiver : dernier dimanche d’octobre. On recule d’une heure (à 3h, il est 2h), ce qui permet de dormir une heure de plus.
Dates du changement d’heure en 2025
•Passage à l’heure d’été : nuit du 29 au 30 mars 2025 (on avance d’une heure).
•Passage à l’heure d’hiver : nuit du 25 au 26 octobre 2025 (on recule d’une heure).
Sur les appareils électroniques, le changement est automatique. En revanche, les horloges mécaniques et certains appareils électroménagers doivent être ajustés manuellement.
Pourquoi change-t-on d’heure ?
À l’origine, le changement d’heure était justifié par des économies d’énergie. L’objectif principal était de réduire la consommation d’électricité liée à l’éclairage en profitant davantage de la lumière naturelle en soirée.
Cependant, avec l’évolution des technologies, notamment l’éclairage LED, l’impact du changement d’heure sur la consommation énergétique est désormais marginal. Certains experts estiment même que les économies réalisées sont inférieures aux inconvénients engendrés, notamment en matière de santé et d’organisation sociale.
Une mesure encore appliquée dans de nombreux pays
En Europe
La majorité des pays de l’Union européenne applique encore le changement d’heure, notamment la France, l’Espagne, l’Allemagne, l’Italie et la Belgique. L’heure est harmonisée au sein de l’UE depuis une directive de 2001, afin d’éviter des décalages horaires entre pays voisins.
Dans le reste du monde
•Aux États-Unis et au Canada, certains États et provinces l’appliquent, d’autres non (ex. : l’Arizona et Hawaï aux États-Unis).
•En Australie et en Nouvelle-Zélande, certaines régions ont adopté la mesure, tandis que d’autres l’ont abandonnée.
•En Afrique et en Asie, la plupart des pays ne pratiquent pas le changement d’heure, considérant qu’il est inutile sous des latitudes où l’ensoleillement varie peu.
Les critiques et débats sur sa suppression
Depuis plusieurs années, le changement d’heure fait l’objet de vifs débats. Ses opposants pointent plusieurs inconvénients :
•Troubles du sommeil et impacts sur la santé : le changement d’heure perturbe l’horloge biologique et peut provoquer fatigue, stress et insomnie.
•Efficacité énergétique discutable : avec la généralisation des ampoules basse consommation et des LED, les économies d’électricité sont devenues minimes.
•Problèmes d’adaptation pour les entreprises et les transports : certaines industries et réseaux de transport doivent ajuster leurs horaires, ce qui peut générer des coûts supplémentaires.
Vers la fin du changement d’heure en Europe ?
En 2018, la Commission européenne a organisé une consultation publique sur la suppression du changement d’heure. Résultat : 84 % des répondants se sont prononcés pour son abolition.
En 2019, le Parlement européen a voté en faveur de la suppression du changement d’heure, initialement prévue pour 2021. Toutefois, en l’absence d’un accord entre les États membres sur l’heure à adopter définitivement (heure d’hiver ou heure d’été ?), la réforme a été reportée et reste aujourd’hui en suspens.
Quel scénario pour la France ?
Si l’UE finit par abolir le changement d’heure, la France devra choisir entre l’heure d’été permanente (UTC+2) et l’heure d’hiver permanente (UTC+1).
•L’heure d’été permanente (UTC+2) offrirait des soirées plus longues, mais des matinées plus sombres en hiver, avec un lever du soleil après 9h dans certaines régions.
•L’heure d’hiver permanente (UTC+1) serait plus proche de l’heure solaire naturelle et limiterait les perturbations biologiques, mais les journées seraient plus courtes en été.
Pour l’instant, aucune décision officielle n’a été prise, et la France continue d’appliquer le changement d’heure en attendant un accord européen.
Conclusion : un dispositif en sursis
Instauré pour économiser de l’énergie, le changement d’heure est aujourd’hui contesté, jugé peu efficace et perturbant pour la santé et l’organisation sociale. Malgré une volonté politique de le supprimer, l’absence de consensus au sein de l’Union européenne retarde la réforme.
En attendant, les Français devront encore ajuster leurs montres en mars et octobre, perpétuant ainsi une tradition vieille de près de 50 ans… mais peut-être pour encore quelques années seulement.