Haïti : la crise sécuritaire provoque le ras le bol des populations à Port au Prince

Des milliers de manifestants ont envahi, ce mercredi 2 avril, les rues de Port au Prince, dénonçant la montée de l’insécurité alors que les gangs continuent de dicter la loi, cherchant à renforcer leur hégémonie avec la tentative de prise des villes de Mirebalais et Saut- d’Eau située dans le centre du pays.

« À bas les bandits ! Vive la paix et la sécurité »

Dès les premières heures de la journée de ce mercredi 2 avril, les manifestants ont érigé des barricades sur certaines artères de Port-au-Prince, perturbant la circulation. Commerces et écoles sont restés fermés toute la journée par crainte de débordements. Pancartes en mains, les manifestants ont pris la direction des locaux du Conseil présidentiel de transition (CPT) et du Premier ministre.

Ils ont fustigé l’inaction du gouvernement, qui n’est pas encore parvenu a rétablir la sécurité un an presque jour pour jour après la mise en place du CPT, survenue au lendemain de la démission du l’ex Premier ministre Ariel Henry.


« C’est inacceptable que l’on continue à perdre des territoires. En réalité, je pense que ces territoires sont livrés aux bandits par les autorités qui ne se montrent pas à la hauteur » a confié à l’AFP un manifestant qui n’a pas souhaité dévoiler son identité.

Selon les sources onusiennes , les gangs contrôlent environ 85% de Port-au-Prince. Ils ont multipliés les attaques dans différents quartiers qui jusqu’ici échappaient à leur contrôle, provoquant et semant la panique au sein des habitants de la capitale.

« Nous exigeons le rétablissement de la sécurité, la libre circulation et le retour de nos enfants à l’école. À bas les bandits !Vive la paix et la sécurité. Si les autorités sont dépassées par les événements, elles doivent partir », s’est emporté un autre manifestant, également sous couvert d’anonymat.

Plus de 500 détenus libérés à Mirebalais et une attaque perpétrée dans la ville de Saut- d’Eau.

Les membres de la coalition criminelle «  Viv ansanm », lourdement armés, ont pris, lundi 31 mars 2025, le contrôle d’une prison locale alors que des centaines de personnes en panique fuyaient la zone nourrie par des tirs. Lors de cette attaque de grande échelle ciblant plusieurs parties de Mirebalais, des centaines de prisonniers ont été libérés. Au moins cinq personnes ont été blessées lors de cet assaut débuté avant l’aube selon le témoignages de plusieurs riverains. Les blessés ont été admis à l’hôpital Universitaire de Mirebalais.

Fedlin Jean, journaliste dans une radio locale, a affirmé que «  les habitants de Mirebalais ont fait de leur mieux pour défendre Mirebalais mais n’ont pas pu résister à l’attaque» . Il a rapporté qu’au moins deux civils, membres du groupe d’autodéfense ont été blessés et que plusieurs individus présumés du gangs ont trouvé la mort.

D’autres sources locales ont confirmé le rôle joué par les habitants dans la défense de leur ville et ont précisé «  qu’un groupe d’autodéfense avait aidé la police à combattre les gangs cherchant à contrôler toute la ville ».

Pour repousser ces hors-la-loi, une unité d’élite de la police nationale Haïtienne (l’équivalent du RAID en France) et des agents de l’unité spécialisée BRI ( Brigade Rapide d’Intervention) ont été envoyés en renfort pour repousser l’incursion des malfrats. Des rumeurs d’une prochaine attaque de la ville de Mirebalais circulaient depuis plusieurs mois a déclaré Fedlin Jean. Les habitants avaient réclamés des renforts policiers face à cette menace.

La ville de Saut- d’Eau, située juste à l’ouest de Mirebalais , célèbre pour l’une de ses cascades luxuriantes et qui attire des milliers d’Haïtiens pour un pèlerinage vaudou- catholique , a elle aussi essuyé une attaque des gangs toujours lors de cette journée du lundi, ont révélé plusieurs médias locaux.

Sur « X », le syndicat de police haïtien SPNH-17 a écrit, lundi dernier, qu’il «  lançait un appel urgent concernant la grave situation qui se déroule à Mirebalais et Saut-d’Eau », demandant aux autorités de mettre tout en œuvre «  pour éviter de perdre davantage de territoires au profit des gangs ».


Ces deux attaques ont poussé 5 981 personnes à fuir leur foyer, selon l’organisation internationale pour les migrations ( OIM)

La Mission multinationale de sécurité ( MMAS) pas si efficace ?

La situation sur le terrain continue à se détériorer malgré son déploiement partiel. Menée par le Kenya pour soutenir la police haïtienne dépassée par les événements, la mission, dont la durée est prévue de 12 mois, doit œuvrer pour le retour de l’ordre public dans un contexte d’aggravation des conflits civils et de la violence des gangs qui sévit dans le pays depuis 2018.

Pourtant soutenue par l’ONU, la mission qui compte désormais un millier de policiers en provenance de six pays , bien loin des 2 500 attendus, tarde à porter les fruits des promesses renforçant au contraire sur le terrain , des perceptions mitigées , affirment plusieurs observateurs locaux.

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