Ce 2 avril, la Libye a annoncé la fermeture des bureaux de dix organisations humanitaires internationales, dont « Médecins Sans Frontières » (MSF) et « Terre des Hommes », accusées par les autorités libyennes de chercher à « installer des migrants » originaires d’Afrique subsaharienne sur son territoire. Cette décision survient dans un contexte de tensions croissantes entre la Libye et les ONG internationales opérant sur le terrain, des accusations graves de « complot international » étant portées contre ces organisations.
Les autorités libyennes ont dénoncé une tentative de « porter atteinte à l’intégrité de l’État et à sa sécurité intérieure », accusant les ONG de mener une « action hostile » visant à changer la composition démographique du pays. Le porte-parole de l’Autorité de sécurité intérieure, Salem Gheith, a ajouté que l’Union européenne avait déjà tenté d’agir de cette manière sous l’ancien régime de Mouammar Kadhafi, et que, depuis sa chute en 2011, l’UE aurait recours aux ONG pour mener à bien ce projet.
Les ONG visées incluent des acteurs humanitaires bien établis, tels que le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU, le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC), Médecins Sans Frontières et l’organisation française Terre des Hommes. Selon les autorités libyennes, ces organisations se livreraient à des activités de « trafic de migrants » et de « blanchiment d’argent » sous couvert d’aide humanitaire.
Cette action de fermeture des bureaux a été rapidement suivie par des accusations d’une « campagne de répression » à l’encontre des ONG et des travailleurs humanitaires. Plusieurs ambassadeurs européens et un représentant de l’ONU ont exprimé leur inquiétude dans une lettre adressée au ministre des Affaires étrangères libyen. Datée du 27 mars, cette lettre déplore la convocation arbitraire de membres du personnel d’ONG, certains ayant été privés de leurs passeports. Les diplomates ont appelé les autorités libyennes à permettre la reprise des opérations humanitaires dès que possible, soulignant que l’arrêt de ces activités serait catastrophique pour la population en détresse.
Depuis la révolution de 2011 et la chute du régime Kadhafi, la Libye est plongée dans une grave instabilité politique, divisée entre plusieurs factions rivales. La situation de chaos a favorisé le développement de réseaux clandestins, utilisés par des passeurs et trafiquants pour acheminer des migrants vers l’Europe. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), entre 700 000 et 1 million de migrants se trouvent actuellement en Libye, bien que les autorités libyennes estiment que ce nombre est sous-évalué.
Les autorités libyennes ont de nouveau accusé les organisations internationales de contribuer à ce problème en encourageant l’arrivée de migrants sur leur territoire. Elles affirment qu’après la chute de Kadhafi, l’UE aurait cherché de nouvelles méthodes pour parvenir à ses fins, et que les ONG en seraient désormais les instruments. Cependant, ces accusations sont vivement contestées par la communauté internationale, qui craint que les mesures prises par la Libye n’aggravent la situation déjà précaire des migrants présents dans le pays.
L’impact de cette décision pourrait être dévastateur pour des milliers de personnes qui dépendent de l’aide humanitaire dans le pays. Des millions de Libyens et de migrants sont dans une situation d’urgence humanitaire, et cette suspension d’activités risque d’entraîner une aggravation des conditions de vie, déjà extrêmement difficiles. Les observateurs internationaux redoutent une crise humanitaire encore plus importante si la Libye persiste dans sa répression des organisations qui fournissent une aide essentielle à ceux qui en ont besoin.