Douze États des États-Unis viennent de lancer une offensive judiciaire contre la politique commerciale du président Donald Trump. En cause : l’imposition massive de droits de douane que ces États estiment non seulement déstabilisants pour l’économie, mais aussi illégaux. Cette plainte pourrait bien remettre en question l’un des piliers de la stratégie économique de Trump, et avoir des répercussions majeures sur le commerce mondial.
Une coalition démocrate contre la stratégie de Trump
Mercredi 23 avril 2025, une coalition de douze États à majorité démocrate – parmi lesquels l’Oregon, l’Arizona, le Colorado, New York ou encore le Vermont – a déposé une plainte devant le Tribunal du commerce international des États-Unis. L’objet de cette plainte ? Contester les hausses massives des droits de douane imposées par Donald Trump depuis son retour à la Maison-Blanche.
La plainte accuse le président d’avoir détourné la loi pour « imposer des droits de douane immenses et évolutifs sur tous les produits entrant aux États-Unis, selon son bon vouloir », créant un climat d’incertitude économique. Elle estime que cette pratique viole à la fois l’ordre constitutionnel états-unien et les règles fondamentales du commerce international.
Des taxes record et une guerre commerciale en plein essor
Depuis le début de son nouveau mandat, Trump a mis en place un droit de douane universel de 10 %, ainsi que des surtaxes ciblées sur des secteurs stratégiques comme l’acier, l’automobile et l’aluminium. Le conflit commercial avec la Chine a également pris une ampleur inédite : Washington applique 145 % de surtaxes sur certains produits chinois, tandis que Pékin réplique avec des taxes allant jusqu’à 125 % sur les produits états-uniens.
Cette guerre commerciale fragilise non seulement les relations internationales, mais aussi les entreprises états-uniennes elles-mêmes, contraintes de payer plus cher leurs importations.
Le texte au cœur du litige : l’IEEPA
Le cœur de la plainte repose sur l’utilisation controversée d’une loi de 1977 : l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA). Cette loi permet au président d’agir face à une urgence nationale menaçant l’économie ou la sécurité des États-Unis.
Or, selon les États plaignants, Donald Trump a détourné cette loi pour imposer ses droits de douane sans réel fondement d’urgence. « Aucun président n’a jamais utilisé l’IEEPA pour appliquer des tarifs douaniers », souligne la plainte. Elle accuse également Trump de violer la Constitution, qui réserve le pouvoir de taxation au Congrès.
Kris Mayes, procureure générale de l’Arizona, va plus loin : « Le projet tarifaire du président Trump n’est pas seulement économiquement imprudent. Il est aussi illégal. »
Un débat juridique qui monte en puissance
La plainte déposée par les douze États s’inscrit dans une vague de contestation plus large. La semaine précédente, la Californie a engagé une procédure similaire, dénonçant « l’autorité unilatérale » exercée par l’administration Trump. Un groupe de cinq entreprises privées a également porté plainte pour les mêmes motifs.
Cependant, mardi dernier, un panel de trois juges a rejeté la demande d’ordonnance de restriction temporaire visant à suspendre immédiatement les tarifs, ce qui montre que le bras de fer judiciaire s’annonce complexe.
Jusqu’où la plainte peut-elle aller ?
Si les tribunaux donnent raison aux plaignants, les droits de douane de Trump pourraient être annulés. En revanche, une victoire présidentielle entérinerait son autorité sur la politique commerciale états-unienne.
Et si une des parties décide de porter l’affaire jusqu’à la Cour suprême, l’issue devient encore plus incertaine. Bien que dominée par les conservateurs – dont trois juges nommés par Trump – deux principes constitutionnels pourraient lui nuire :
•La doctrine de non-délégation, qui limite le transfert des pouvoirs législatifs vers l’exécutif ;
•Et la doctrine des questions majeures, qui exige une validation du Congrès pour toute décision politique ou économique d’envergure.
Un enjeu majeur pour l’économie mondiale
Derrière ce litige juridique, c’est l’avenir du commerce mondial qui est en jeu. Les taxes douanières états-uniennes, en particulier vis-à-vis de la Chine, perturbent les chaînes d’approvisionnement, augmentent les coûts pour les entreprises et alimentent une instabilité financière mondiale.
Si la plainte réussit, elle pourrait mettre un frein à l’escalade commerciale, rétablir l’équilibre constitutionnel aux États-Unis, et obliger l’administration Trump à revoir sa stratégie économique.