Le pays a encore accéléré son rythme de production d’uranium hautement enrichi, selon un rapport confidentiel de l’AIEA divulgué samedi et jugé « politique » par l’Iran. Téhéran craint la réactivation de sanctions onusiennes.(Avec : AFP).
La tension est montée d’un cran entre l’Iran et l’union européenne. Téhéran a annoncé une riposte si les pays européens « exploitent » à des fins politiques un rapport de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) selon lequel le pays a accéléré sa production d’uranium hautement enrichi.
La France, le Royaume-Uni et l’Allemagne sont avec la Russie et la Chine membres d’un accord pour encadrer le programme nucléaire iranien conclu avec la République islamique en 2015, et dont les Etats-Unis se sont retirés unilatéralement trois ans plus tard durant le premier mandat de Donald Trump. L’AIEA tiendra du 9 au 13 juin à Vienne (Autriche) un Conseil des gouverneurs, une importante réunion trimestrielle durant laquelle seront notamment passées en revue les activités nucléaires de l’Iran.
Paris, Londres et Berlin ont menacé ces dernières semaines d’enclencher un mécanisme prévu dans l’accord de 2015 qui permet le rétablissement de sanctions onusiennes si l’Iran ne respecte pas ses engagements.
« L’Iran répondra à toute action inappropriée des parties européennes », a déclaré son chef de la diplomatie, Abbas Araghchi lors d’un appel samedi avec le patron de l’AIEA Rafael Grossi. Abbas Araghchi a appelé l’AIEA à empêcher « certaines parties d’exploiter » le rapport « pour faire avancer leurs objectifs politiques » contre l’Iran, selon des propos rapportés dimanche par la diplomatie iranienne.
Selon le rapport de l’AIEA, la quantité totale d’uranium enrichi de l’Iran dépasse désormais de 45 fois la limite autorisée par l’accord de 2015 et s’élève à 9.247,6 kg. Le gendarme onusien du nucléaire note une nette hausse de l’uranium enrichi à 60 %, seuil se rapprochant des 90 % nécessaires pour fabriquer une arme nucléaire, d’après un bilan d’étape consulté par l’AFP.
Un accord en négociation avec les Etats-Unis
Ce rapport a été divulgué alors que Washington et Téhéran mènent des discussions depuis plusieurs semaines pour tenter de trouver un nouvel accord.
Samedi, l’Iran a dit avoir reçu des « éléments » d’une proposition américaine à l’issue de cinq cycles de négociations menés sous la médiation d’Oman et a affirmé sur X par la voix de son ministre des Affaires étrangères qu’il y répondra de manière appropriée.
La proposition américaine faite à l’Iran est « acceptable » et dans le « meilleur intérêt » de Téhéran selon la Maison-Blanche, citée samedi par les médias américains. Elle est décrite comme une série de points à puces plutôt qu’un projet d’accord complet par le quotidien américain New York Times, qui cite des responsables au fait des échanges diplomatiques.
La proposition appelle l’Iran à cesser tout enrichissement d’uranium et propose la création d’un groupe régional pour produire de l’énergie nucléaire, qui inclurait l’Iran, l’Arabie saoudite et d’autres Etats arabes ainsi que les Etats-Unis. Ni l’Iran ni les Etats-Unis n’ont commenté ces affirmations.
Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël, ennemi juré de l’Iran et considéré par des experts comme la seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, soupçonnent Téhéran de vouloir se doter de l’arme nucléaire.
L’Iran se défend d’avoir de telles ambitions militaires mais insiste sur son droit au nucléaire civil notamment pour l’énergie, en vertu du Traité de non-prolifération (TNP) dont il est signataire.
Le pays est toutefois le seul Etat non doté d’armes nucléaires à enrichir de l’uranium à un niveau élevé, bien au-delà de la limite de 3,67 % fixée par l’accord de 2015, selon l’AIEA.
L’Iran menace Israël d’une frappe militaire
Lundi 2 juin 2025, le général de division Abdolrahim Mousavi, commandant en chef de l’armée iranienne, a lancé un avertissement direct à Israël, déclarant que Téhéran était « pleinement prêt » à lancer une attaque en réponse aux menaces militaires répétées de l’État hébreu.
Cette déclaration intervient alors que les tensions régionales restent élevées, sur fond de négociations sensibles entre l’Iran et les États-Unis autour du programme nucléaire iranien. Selon le général Mousavi, si Israël persistait dans ses menaces, l’Iran mènerait une riposte ciblée, qu’il qualifie de « frappe appropriée ». Il a également fait allusion à une « dette » non précisée qu’Israël devrait selon lui à l’Iran :
« S’ils sont pressés de recevoir une nouvelle opération Promesse Véritable, nous sommes pleinement prêts », a-t-il déclaré.
Visite américaine en Israël
Cette déclaration intervient également alors que la secrétaire à la Sécurité intérieure des États-Unis, Kristi Noem, s’est rendue à Jérusalem pour rencontrer le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou. Les deux responsables ont discuté des avancées et blocages des négociations nucléaires entre Washington et Téhéran.
Le déplacement de la responsable américaine semble illustrer l’importance stratégique que les États-Unis accordent à leur allié israélien dans le contexte actuel, tout en poursuivant des discussions diplomatiques avec l’Iran.
Négociations relancées, mais incertaines
Les pourparlers entre l’Iran et les États-Unis ont repris la semaine dernière, mais aucune avancée concrète n’a encore été annoncée. Téhéran cherche notamment un allègement des sanctions économiques, tandis que Washington souhaite des garanties sur le gel ou la réduction du programme nucléaire iranien.
Malgré ce contexte tendu, le président américain Donald Trump a adopté un ton plus optimiste en déclarant lundi lors d’une conférence de presse :
« Nous avons eu des discussions très, très bonnes avec l’Iran. Une percée pourrait être imminente. »
Une escalade à éviter
Les déclarations du général Mousavi illustrent la fragilité de la situation au Moyen-Orient, où un incident ou une provocation pourrait rapidement dégénérer en conflit ouvert. Tandis que la diplomatie tente de progresser, les menaces militaires rappellent que le spectre d’une confrontation directe entre l’Iran et Israël reste bien présent.