Pourquoi Rima Hassan ne peut pas faire valoir son statut d’eurodéputée face à Israël

Malgré son statut tout récent d’eurodéputée, Rima Hassan, arrêtée en Israël dans le cadre de la flottille pour Gaza, ne peut pas faire valoir son immunité parlementaire pour échapper à sa détention. Une situation qui suscite l’indignation en France, mais dont les ressorts juridiques sont plus complexes qu’il n’y paraît.

Une détention qui fait polémique

Depuis plus de 30 heures, Rima Hassan, militante franco-palestinienne élue députée européenne, est retenue en détention en Israël, comme cinq autres ressortissants français arrêtés après l’arraisonnement d’un bateau humanitaire en route vers Gaza.

Jean-Luc Mélenchon s’est emporté mardi 10 juin sur X (ex-Twitter) :
« De quel droit Netanyahu retient-il de force depuis 30 heures une députée française ? »

Ce cri d’alarme s’inscrit dans une série de réactions indignées à gauche, notamment chez les Insoumis, qui dénoncent une violation de l’immunité parlementaire de Rima Hassan.

L’immunité parlementaire européenne a ses limites

En théorie, les eurodéputés bénéficient d’une immunité conçue pour leur permettre d’exercer librement leur mandat sans craindre des poursuites de nature politique. Mais en pratique, cette immunité n’est pas absolue, surtout hors du territoire de l’Union européenne.

En effet, le règlement du Parlement européen précise que cette protection s’applique :
•Dans l’exercice des fonctions parlementaires
•Et sur le territoire européen ou d’un État membre

Or :

•Israël ne fait pas partie de l’Union européenne
•Et l’embarquement sur une flottille humanitaire à destination de Gaza ne relève pas, juridiquement, d’une activité parlementaire stricto sensu

Autrement dit, ni le lieu, ni le contexte de l’arrestation ne permettent à Rima Hassan de faire valoir son immunité parlementaire.

Une protection consulaire, mais pas plus

Rima Hassan, en tant que ressortissante française, peut bénéficier de l’assistance consulaire. Celle-ci vise à garantir le respect de ses droits, à assurer qu’elle est bien traitée, et à suivre l’évolution de sa situation judiciaire. Mais cette protection n’implique aucune immunité ni prérogative spéciale, contrairement à ce que certains responsables politiques suggèrent.

L’opposition accuse d’ailleurs le ministère des Affaires étrangères d’inaction. Jean-Luc Mélenchon interroge publiquement :
« Pourquoi le consulat de France a-t-il attendu tant d’heures pour se montrer auprès des prisonniers au contraire de tous ses collègues sur place ? »

Une accusation que rejette vigoureusement le ministre Jean-Noël Barrot, dénonçant des « manœuvres de désinformation », et assurant que le Quai d’Orsay est mobilisé et en lien constant avec les autorités israéliennes.

Et maintenant ?

Pour l’heure, les eurodéputés détenus qui ont refusé leur expulsion volontaire, dont Rima Hassan, sont toujours en détention administrative. Leur sort devrait être décidé par un juge israélien dans les prochains jours, avant une éventuelle expulsion forcée.

Du côté du Parlement européen, on se veut prudent. Une source confie au HuffPost :
« On reste attentif à la sécurité des eurodéputés en toutes circonstances, et on procède en ce moment à des vérifications. »

Mais les leviers d’action sont minces. En dehors de la diplomatie française, l’Union européenne ne dispose d’aucune autorité sur le sol israélien.

Une affaire à la croisée du droit et de la politique

Le cas de Rima Hassan illustre les limites concrètes du pouvoir parlementaire européen à l’international. Il soulève aussi des tensions politiques en France, entre défense de la liberté d’action des députés et respect du droit international local.

À moins d’un geste politique d’Israël ou d’une forte pression diplomatique, Rima Hassan devra passer par les procédures israéliennes ordinaires, comme tout autre citoyen étranger en détention.

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