Un vol discret mais lourd de symboles. Le dimanche 26 octobre, un Iliouchine Il-76, avion cargo militaire russe, a atterri à Caracas, la capitale du Venezuela. Cet appareil, connu pour transporter du matériel de guerre, est directement lié à la société russe Aviacon Zitotrans, déjà sanctionnée par Washington et Ottawa pour ses liens présumés avec le groupe Wagner.
Cet atterrissage, passé presque inaperçu, survient dans un contexte de vives tensions entre les États-Unis et le régime de Nicolás Maduro, alors que le président Donald Trump a ordonné, depuis deux mois, un renforcement de la présence militaire américaine dans les eaux vénézuéliennes.
Un itinéraire soigneusement contourné
Selon le site de suivi aérien FlightRadar, le vol RA-78765 a effectué un itinéraire particulièrement long et inhabituel : Arménie, Algérie, Sénégal, avant d’atteindre le Venezuela. Un parcours qui aurait permis à l’appareil d’éviter l’espace aérien occidental, en raison des sanctions et des restrictions imposées aux vols russes depuis l’invasion de l’Ukraine.
Cet Iliouchine Il-76, capable de transporter jusqu’à 50 tonnes de fret ou 200 soldats, est souvent utilisé pour acheminer du matériel militaire à l’étranger. Selon le média spécialisé DefenseNews, Aviacon Zitotrans a déjà livré des roquettes, des ogives et des pièces d’hélicoptères dans plusieurs zones de conflit où le groupe Wagner opérait activement.
Une société sous sanctions, considérée comme un “proxy de Moscou”
Washington décrit Aviacon Zitotrans comme un “proxy de Moscou agissant en tant qu’organisation criminelle transnationale”, soupçonnée de servir de couverture logistique à des opérations paramilitaires russes.
Cette compagnie, basée à Ekaterinbourg, a notamment été identifiée dans plusieurs livraisons d’armes vers l’Afrique et le Moyen-Orient, souvent dans des pays où Wagner soutenait des gouvernements ou des milices alliées au Kremlin.
L’arrivée d’un de ses avions au Venezuela réveille donc les soupçons américains : l’appareil pourrait avoir transporté du matériel militaire, voire des conseillers russes, dans un pays déjà sous le coup de nombreuses sanctions occidentales.
Les demandes pressantes de Maduro à Poutine
Ce vol survient quelques jours seulement après une lettre adressée par Nicolás Maduro à Vladimir Poutine, révélée par le Washington Post.
Dans ce document, le président vénézuélien demande à son homologue russe de fournir des radars de défense, des avions modernisés et des systèmes de missiles pour renforcer la sécurité du pays face à ce qu’il qualifie de “menaces américaines croissantes”.
Le Kremlin n’a pas tardé à répondre. Par la voix de sa ministre des Affaires étrangères, Moscou a assuré vendredi dernier être prêt à “soutenir ses partenaires face aux menaces extérieures”. Une déclaration perçue à Washington comme un nouvel avertissement géopolitique, dans un contexte où la rivalité entre les États-Unis et la Russie s’exporte désormais jusqu’en Amérique latine.
Un signal d’alerte pour Washington
Si la nature exacte de la cargaison de l’Il-76 reste inconnue, ce vol soulève des inquiétudes croissantes au Pentagone. L’arrivée d’un appareil militaire russe dans la sphère d’influence directe des États-Unis, à proximité de leurs côtes, ravive le spectre d’une confrontation indirecte entre Washington et Moscou.
Pour les observateurs, il s’agit d’un nouvel épisode de la guerre d’influence mondiale où le Venezuela, allié fidèle de la Russie, pourrait redevenir une pièce stratégique du jeu géopolitique entre les grandes puissances.