Assemblée nationale : un quiproquo entraîne la suppression par erreur d’une taxe rapportant 5,4 milliards d’euros à l’État

C’est un incident aussi rare qu’embarrassant pour le gouvernement. Ce jeudi, les députés ont adopté par erreur la suppression de la C3S (Contribution sociale de solidarité des sociétés), une taxe qui rapporte chaque année 5,4 milliards d’euros à l’État. Une suppression totalement involontaire, issue d’un malentendu au cours des débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).

Un amendement « d’appel » devenu réalité

À l’origine, l’amendement avait été déposé par Charles Sitzenstuhl, député macroniste du groupe Ensemble pour la République. Il s’agissait, selon lui, d’un simple « amendement d’appel », destiné à lancer un débat sur la fiscalité des entreprises sans qu’il ne soit voté. « Il n’avait pas vocation à passer car nous n’avons pas les moyens de nous payer aujourd’hui la suppression de la C3S », a-t-il expliqué à BFM Business.

Mais contre toute attente, une fois son amendement retiré, le Rassemblement national s’en est saisi et l’a soumis au vote. Résultat : 117 voix pour, 113 contre. À la surprise générale, la suppression de la taxe a donc été adoptée.

Le Rassemblement national assume son vote

Du côté du RN, aucun regret. « Le RN soutient la baisse des impôts de production et bien évidemment la baisse de la C3S », a déclaré Alexandre Loubet, député du parti. Selon lui, cette contribution « pénalise la compétitivité » des entreprises françaises : « Nos impôts de production pèsent quatre fois plus qu’en Allemagne, deux fois plus que la moyenne européenne. Il faut un réalignement compétitif. »

Une taxe critiquée mais essentielle aux finances publiques

Créée en 1970, la C3S est une contribution patronale de 0,16 % sur le chiffre d’affaires des entreprises réalisant plus de 19 millions d’euros par an. Elle alimente principalement les régimes de protection sociale.
En septembre, un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires estimait déjà que cette taxe « pénalise particulièrement la compétitivité du secteur industriel ». Un constat partagé par Sylvain Maillard, président du groupe Renaissance, qui plaidait récemment pour une baisse progressive des impôts de production afin de « permettre aux industriels de se développer ».

Une seconde délibération pour corriger l’erreur

Face au tollé provoqué par cette adoption inattendue, Frédéric Valletoux, président de la Commission des affaires sociales, a rapidement demandé une seconde délibération pour revenir sur le vote. « Compte tenu d’une certaine confusion autour du débat, du déroulement du scrutin et de la compréhension de l’amendement », a-t-il justifié.

Charles Sitzenstuhl a immédiatement soutenu cette initiative : « Je soutiens la seconde délibération demandée par le président de la commission des affaires sociales pour corriger cela. »

Un nouveau vote attendu ce vendredi

Le nouveau vote devrait intervenir après l’examen de la deuxième partie des recettes du PLFSS, probablement ce vendredi. En attendant, le gouvernement se retrouve privé de 5,4 milliards d’euros de recettes, une situation temporaire mais politiquement gênante.

Cet épisode met en lumière la fragilité de la majorité présidentielle à l’Assemblée nationale et la volatilité des débats budgétaires, où un simple malentendu peut coûter plusieurs milliards à l’État.

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