La soirée du jeudi 6 novembre à la Philharmonie de Paris a été marquée par de graves incidents, survenus au cours d’un concert de l’Orchestre philharmonique d’Israël dirigé par Lahav Shani et accompagné du pianiste Sir András Schiff. Des spectateurs ont tenté à plusieurs reprises d’interrompre la représentation, déclenchant des affrontements dans la grande salle Pierre-Boulez.
Quatre interpellations après des perturbations violentes
Le parquet de Paris a confirmé, vendredi 7 novembre, la garde à vue de quatre personnes trois hommes et une femme à la suite de ces incidents. Trois d’entre elles sont poursuivies pour participation à un groupement en vue de commettre des violences ou des dégradations, tandis qu’une autre est soupçonnée d’avoir organisé une manifestation non déclarée.
L’un des interpellés, un homme d’une vingtaine d’années, est fiché S pour ses liens avec la mouvance contestataire, selon une source proche du dossier.
Fumigènes et affrontements dans la salle
Selon la direction de la Philharmonie, qui a porté plainte, des spectateurs munis de billets ont tenté à trois reprises de perturber le concert, dont deux fois à l’aide de fumigènes. Des altercations ont éclaté avec d’autres spectateurs avant que les fauteurs de troubles ne soient évacués. Le concert, interrompu un moment, a finalement pu reprendre et s’achever dans le calme.
Des vidéos diffusées en ligne montrent un individu brandissant un fumigène dans les gradins, avant que la situation ne dégénère.
Réactions politiques et diplomatiques
Le ministre de l’intérieur, Laurent Nuñez, a condamné « fermement » ces agissements, soulignant que « rien ne peut les justifier ». Il a salué l’intervention rapide des forces de l’ordre, qui ont permis « d’interpeller plusieurs auteurs de troubles graves à l’intérieur de la salle et de contenir les manifestants à l’extérieur ».
Présent au concert, l’ambassadeur d’Israël en France, Joshua Zarka, a relaté sur RTL la scène : « Quelqu’un a sorti un fumigène et il s’est fait tabasser par des gens qui étaient venus apprécier de l’art et qui avaient été gênés par cette conduite. »
La ministre de la culture, Rachida Dati, a elle aussi dénoncé ces violences : « La liberté de programmation et de création est un droit fondamental de notre République. »
Aurore Bergé, ministre chargée de la lutte contre les discriminations, a qualifié les incidents d’« indignes de notre pays », réaffirmant que « l’antisémitisme, sous toutes ses formes, n’aura jamais sa place en France ».
Le débat politique s’enflamme
Les réactions politiques n’ont pas tardé à suivre. Le président du CRIF, Yonathan Arfi, a accusé la CGT et La France insoumise d’avoir « hystérisé le débat public autour de Gaza » et interpellé directement la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, pour qu’elle condamne ces actes.
Marine Le Pen a également dénoncé des « incidents provoqués par des activistes antisémites d’extrême gauche », qu’elle a attribués à « des appels à la violence du syndicat communiste de la CGT », appelant à une réponse judiciaire « exemplaire ».
Jean-Luc Mélenchon, de son côté, a réagi en affirmant : « On peut regretter ces incidents. Moi, je regrette surtout le génocide, plus que l’affaire de la Philharmonie. (…) Vous ne pouvez pas empêcher des gens d’exprimer une protestation contre un génocide. »
Une polémique déjà latente avant le concert
Depuis plusieurs jours, des militants propalestiniens appelaient à l’annulation du concert, estimant qu’il représentait une forme de soutien implicite à Israël. La CGT-Spectacle avait demandé à la Philharmonie de « rappeler à son public les accusations gravissimes qui pèsent contre les dirigeants israéliens » dans la guerre à Gaza.
La direction de la Philharmonie avait répondu en rappelant qu’elle accueillait « aussi bien des artistes israéliens que palestiniens » sans jamais exiger de prise de position politique. « La violence n’est pas un débat. Et la faire entrer dans une salle de concert est très grave », a-t-elle réaffirmé vendredi.
Un contexte international tendu
Lahav Shani, 36 ans, à la tête de l’Orchestre philharmonique d’Israël, avait déjà été au cœur d’une controverse en septembre, lorsqu’un festival belge avait déprogrammé un concert qu’il devait diriger. Le chef israélien avait alors dénoncé des pressions politiques et réaffirmé son engagement « en faveur de la paix et de la réconciliation ».
Ces nouveaux incidents à Paris s’inscrivent dans un climat international marqué par les tensions persistantes autour du conflit israélo-palestinien, où les expressions artistiques sont de plus en plus prises dans la tourmente politique.