France : Les députés suppriment massivement le gel des pensions de retraite et des minima sociaux

L’Assemblée nationale a rejeté, mercredi 12 novembre, à une très large majorité, le projet de gel des pensions de retraite et des minima sociaux, une mesure budgétaire jugée explosive par nombre de parlementaires. Le gouvernement, déjà affaibli sur ce dossier, avait lui-même ouvert la porte à un retrait partiel de cette disposition controversée.

Adopté par 308 voix contre 99, l’amendement supprimant le gel des pensions a rassemblé une coalition inhabituelle de députés : la gauche, l’alliance Rassemblement national–UDR, et une partie de la majorité présidentielle, dont Les Républicains. Cette alliance transpartisane a conduit à l’effacement complet de l’article du projet de budget de la Sécurité sociale qui visait, dès 2026, un gel des retraites de base ainsi que des prestations sociales telles que les allocations familiales, le RSA ou les APL, habituellement indexées sur l’inflation.

Une mesure d’économie jugée trop brutale

Le gouvernement justifiait cette décision par la nécessité de réaliser 3,6 milliards d’euros d’économies, « l’un des plus gros enjeux du budget », selon le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou. Ce dernier rappelait que ces économies visaient à contenir les déficits croissants de la Sécurité sociale.

Mais pour l’opposition, le dispositif s’apparentait à une attaque directe contre les plus fragiles. « Cette année blanche sur les prestations sociales, c’est ce que vous pouviez imaginer de pire », a dénoncé Sandrine Rousseau (groupe écologiste), tandis qu’Anaïs Belouassa-Cherifi (LFI) a parlé de « violence sociale ».

Le texte prévoyait également une sous-indexation progressive des retraites à partir de 2027 (–0,9 point la première année, puis –0,4 point jusqu’en 2030), une perspective vivement critiquée par les syndicats et les associations de retraités.

Le gouvernement acculé

Face à la fronde, le Premier ministre Sébastien Lecornu avait déjà concédé fin octobre qu’il était « favorable à regarder l’ensemble des amendements » visant à supprimer ou assouplir le gel. « C’est la représentation nationale qui a tordu le bras au gouvernement », a réagi Christophe Bentz (RN), soulignant que le rejet en commission avait déjà montré la fragilité politique de la mesure.

Malgré ce revers, la ministre des Comptes publics Amélie de Montchalin a plaidé, mercredi, pour un maintien partiel du dispositif : « Nous pouvons très bien avoir un gel des allocations familiales pour les foyers les plus aisés », a-t-elle proposé, cherchant à sauver une version « mieux ciblée » du texte.

Un parcours législatif encore long

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale poursuit désormais son chemin au Sénat, où les débats s’annoncent tout aussi tendus. Hostile à la suspension de la réforme des retraites, la chambre haute commencera l’examen du texte samedi en commission, avant son passage dans l’hémicycle à partir du 19 novembre.

À l’Assemblée, les députés devaient encore examiner plusieurs centaines d’amendements avant minuit. En l’absence de vote final, le gouvernement s’est engagé à transmettre au Sénat la version du texte telle qu’interrompue mercredi soir, symbole d’un exécutif de plus en plus contraint par sa majorité divisée.

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