Ukraine : la BCE refuse de garantir le prêt de 140 milliards d’euros financé par les avoirs russes gelés, alors que Trump annonce la fin du soutien financier américain

À l’approche d’un sommet européen décisif prévu le 18 décembre à Bruxelles, la question du financement de l’aide à l’Ukraine continue de diviser les États membres et les institutions européennes. Dans un contexte international marqué par le repositionnement américain après la récente déclaration de Donald Trump affirmant que les États-Unis « ne sont plus engagés dans le soutien financier à l’Ukraine », l’Union européenne se retrouve sous pression pour assurer seule une partie croissante de l’aide à Kiev.

Dans ce climat tendu, la Banque centrale européenne (BCE) vient de rejeter une proposition clé de la Commission européenne : garantir un prêt de 140 milliards d’euros destiné à l’Ukraine et qui aurait été adossé aux avoirs russes gelés depuis 2022.

La BCE rejette un système jugé contraire à son mandat

Selon les révélations du Financial Times, la BCE a estimé que la proposition de la Commission européenne « violait son mandat », notamment parce qu’elle reviendrait indirectement à financer des gouvernements, une pratique strictement interdite par les règles européennes.

Le plan initial prévoyait que les États membres fournissent des garanties pour partager le risque de non-remboursement du prêt. Mais plusieurs responsables indiquent que les pays de l’UE auraient eu beaucoup de mal à lever rapidement ces fonds, ce qui aurait pu créer une tension sur les marchés financiers.

Face à ce risque, la Commission aurait demandé à la BCE d’être le « prêteur de dernier recours » auprès d’Euroclear, l’organisme belge qui détient environ 190 milliards d’euros d’actifs de la Banque centrale russe. La BCE a refusé, jugeant que cela reviendrait à contourner les règles budgétaires européennes.

Euroclear, de son côté, n’a pas souhaité commenter.

Bruxelles cherche des solutions alternatives

La Commission européenne tente désormais de trouver une voie de contournement pour assurer un filet de sécurité financier permettant de débloquer ce prêt massif.

Selon un porte-parole cité par le Financial Times, il est indispensable de « garantir les liquidités nécessaires pour faire face à d’éventuelles obligations de restitution des actifs à la Banque centrale russe ». En effet, si un futur accord de paix annulait les sanctions européennes, Euroclear pourrait être forcé de rendre immédiatement les fonds gelés — ce qui serait impossible si ces fonds ont servi de garantie pour un prêt.

Des discussions techniques sont donc en cours pour imaginer d’autres dispositifs permettant d’assurer la solidité juridique et financière de l’opération.

La Belgique reste fermement opposée à l’utilisation des avoirs russes

La Belgique, où se trouve Euroclear, est l’un des États les plus prudents sur la question. Son Premier ministre, Bart De Wever, a réaffirmé qu’il refusait l’utilisation de ces avoirs pour financer le prêt à l’Ukraine sans garanties « juridiquement contraignantes, inconditionnelles et irrévocables » de la part de tous les États membres.

Bruxelles craint surtout un scénario où les sanctions européennes seraient levées à la suite d’un accord de paix, obligeant Euroclear à rembourser immédiatement la Russie. Un risque jugé trop élevé.

Un soutien financier européen mis sous tension après l’annonce de Donald Trump

Ce dossier intervient alors que Donald Trump a déclaré que les États-Unis « ne sont plus engagés dans le soutien financier à l’Ukraine ». Cette annonce marque une rupture majeure dans la position américaine depuis 2022 et place l’Europe dans une situation d’autant plus délicate qu’elle dépendait largement du soutien budgétaire de Washington pour équilibrer l’effort global en faveur de Kiev.

Cette nouvelle donne renforce la pression sur l’Union européenne, appelée à combler le vide laissé par les États-Unis, tout en naviguant entre divisions internes et contraintes juridiques strictes.

Un sommet européen décisif le 18 décembre

Les dirigeants européens se réuniront le 18 décembre à Bruxelles et devront trancher plusieurs questions cruciales :
• comment financer durablement l’aide à l’Ukraine,
• comment utiliser ou non les actifs russes gelés,
• comment assurer un consensus à 27 alors que plusieurs pays restent hésitants ou opposés à certaines options.

Ce sommet pourrait devenir l’un des plus importants de l’année pour l’avenir du soutien européen à l’Ukraine, d’autant que l’environnement international est de plus en plus incertain.

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