UE-Mercosur : la signature de l’accord reportée à janvier, un simple sursis ?

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a finalement accédé aux demandes de la France et de l’Italie en reportant la signature du traité commercial entre l’Union européenne et le Mercosur à janvier 2026. Une courte pause pour Emmanuel Macron, sous pression des manifestations agricoles, mais jugée par l’eurodéputée Manon Aubry comme « une énorme opération d’enfumage ».

Dans cette longue partie de bras de fer entre Bruxelles et Paris, ce décalage de trois semaines apparaît comme une petite victoire pour le gouvernement français. Jeudi soir, Ursula von der Leyen a informé les dirigeants des Vingt-Sept du report de la ratification du traité de libre-échange avec le Mercosur — qui regroupe le Brésil, l’Argentine, l’Uruguay, le Paraguay et la Bolivie — au mois de janvier. Ce report constitue un revers pour la présidente de la Commission européenne, qui espérait obtenir l’aval d’une majorité qualifiée des États membres ce vendredi avant de se rendre à Foz do Iguaçu, au Brésil, pour entériner l’accord ce week-end.

Une opposition frontale franco-italienne

L’opposition d’Emmanuel Macron, soutenu par la cheffe d’État italienne Giorgia Meloni, a permis ce répit alors que la colère agricole s’exprimait sur les routes françaises et à Bruxelles. Négocié depuis plus de vingt ans, le traité peine à se concrétiser, en raison du blocage de certains pays, et particulièrement de la France, qui réclame des clauses de sauvegarde renforcées, des mesures miroirs et davantage de contrôle sur les produits importés. « À l’heure actuelle, le compte n’y est pas », a réaffirmé le président français.

L’ensemble de la classe politique française rejette quasi unanimement le traité, dénonçant le risque de concurrence déloyale pour les éleveurs européens. L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté une résolution — non contraignante — demandant à l’exécutif de saisir la Cour de justice de l’UE (CJUE) pour vérifier la conformité du texte, que la Commission européenne a scindé en deux pour faciliter son adoption.

Au Parlement européen, une initiative similaire a été menée par Manon Aubry (LFI), soutenue par une coalition de 145 élus de cinq groupes différents. La résolution devrait être votée en janvier et pourrait suspendre l’adoption du traité, obligeant la CJUE à statuer sur sa conformité aux principes européens, notamment le principe de précaution.

Entre espoirs et scepticisme

Si Emmanuel Macron se félicite de ce report, il souligne la nécessité de voir des « avancées » concrètes pour que « le texte change de nature », tout en laissant ouverte la possibilité de donner son aval en janvier. Ursula von der Leyen se montre « confiante » dans la possibilité de réunir la majorité requise à ce moment-là.

De son côté, Manon Aubry reste sceptique : « Cette énorme opération d’enfumage […] en janvier, ce sera exactement la même chose ». L’eurodéputée n’exclut pas de chercher à obtenir un rejet complet du traité si la mobilisation agricole se poursuit. La FNSEA, premier syndicat agricole français, appelle d’ailleurs à maintenir la pression : « C’est un revirement inattendu et une première étape obtenue grâce à notre pression. Mais ce n’est pas suffisant ! », soulignant la nécessité de continuer la mobilisation pour obtenir « un échec et mat du Mercosur ».

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