La décision du Conseil constitutionnel de censurer l’allongement de la durée de rétention administrative des étrangers jugés dangereux se retrouve au cœur d’une vive polémique, après l’attaque au couteau survenue vendredi dans le métro parisien, qui a fait trois blessées.
Le 7 août dernier, les Sages avaient invalidé, à une voix près, une disposition de la loi immigration visant à porter la durée maximale de rétention en centre de rétention administrative (CRA) de 90 à 210 jours pour les étrangers « condamnés pour des faits d’une particulière gravité et présentant de forts risques de récidive ». Cette mesure avait pourtant été adoptée quelques semaines plus tôt par les députés. Selon Marianne, c’est le président du Conseil constitutionnel, Richard Ferrand, qui aurait fait basculer le vote en faveur de la censure.
Cette révélation intervient dans un contexte particulièrement sensible. L’agresseur présumé de l’attaque dans le métro parisien est un ressortissant malien sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Condamné et incarcéré en janvier 2024 pour vol aggravé et agression sexuelle, il avait reçu une OQTF à sa sortie de prison en juillet, avant d’être placé en CRA. En l’absence de laissez-passer consulaire et de titre d’identité valide, sa rétention avait pris fin au bout des 90 jours prévus par la loi actuelle.
Pour plusieurs responsables politiques et figures publiques, le lien entre la décision du Conseil constitutionnel et l’attaque est direct. Marion Maréchal estime que « le refus de la “loi Philippine”, c’est-à-dire l’extension de la rétention à 210 jours, a légalement permis à un clandestin sous OQTF de poignarder trois femmes dans le métro de Paris », accusant les Sages d’être « coupables » de ce nouveau drame. L’avocat Gilles-William Goldnadel a tenu des propos similaires sur le réseau social X, affirmant que la libération de l’individu après 90 jours engage la responsabilité du Conseil constitutionnel.
Après la censure d’août, Bruno Retailleau, alors ministre de l’Intérieur, avait annoncé son intention de proposer une nouvelle version du texte. Celle-ci devait cibler plus précisément les étrangers en instance d’expulsion condamnés pour des crimes ou délits graves tels que meurtre, viol, trafic de stupéfiants ou vol aggravé avec violences ou présentant une menace d’une « particulière gravité » pour l’ordre public. Mi-novembre, son successeur Laurent Nuñez s’était dit favorable à cette réforme, affirmant dans La Tribune Dimanche soutenir l’allongement de la durée de rétention pour les profils jugés les plus dangereux.
L’attaque dans le métro relance ainsi le débat sur l’équilibre entre respect des principes constitutionnels, efficacité des procédures d’éloignement et impératif de sécurité publique, dans un climat politique et émotionnel particulièrement tendu.