Lorsque les gardes-côtes philippins ont retiré une barrière flottante chinoise d’une zone contestée de la mer de Chine méridionale au cours de la semaine du 18 septembre, il y avait des inquiétudes parmi certains observateurs que cela puisse déclencher des hostilités.
Cependant, cela ne s’est pas produit, et il est important d’analyser pourquoi, car il est probable que d’autres manifestations d’opposition à l’influence chinoise dans la région puissent survenir bientôt.
Les premiers comptes rendus de cette opération, exécutée sur l’ordre du président philippin Ferdinand Marcos Jr., soulevaient des inquiétudes quant à une éventuelle réaction du président chinois Xi Jinping, qui pourrait aggraver les tensions. Cependant, du moins jusqu’à présent, il n’a pas pris de telles mesures.
L’action du président philippin est légalement justifiée. La barrière flottante chinoise enfreignait manifestement le droit international et entravait la libre circulation des navires de pêche de l’archipel. Cependant, il est inhabituel (et cela ne s’était pas produit depuis une décennie) que Manille remette avec autant de fermeté en question les revendications territoriales de Pékin. La question qui se pose maintenant est de savoir si Xi Jinping maintiendra sa position ou optera pour une coexistence reposant davantage sur le « respect des règles ».
Après que le garde-côte philippin ait sectionné la corde maintenant la barrière en place, Song Zhongping, analyste et ancien officier militaire de Pékin, a vivement critiqué cet acte, le qualifiant de « grave menace pour la souveraineté nationale et la sécurité de la Chine ». Il a ajouté que « la Chine doit prendre des mesures décisives pour mettre fin à la provocation des Philippines ». En revanche, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères a adopté une posture moins agressive, conseillant simplement aux Philippines d’éviter de susciter des tensions ou des problèmes.
La Chine entretient des querelles avec la plupart des pays de la région –pas seulement avec les Philippines– depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. À l’époque, les dirigeants de Pékin avaient tracé une «ligne en onze traits» qui définissait sa souveraineté sur quasiment toute la mer de Chine méridionale. Puis, quand le Parti communiste a pris le pouvoir en Chine en 1949 et que les anciens dirigeants ont battu en retraite sur l’île chinoise de Formose – l’actuel Taïwan -, elle a été réduite à neuf traits. Les revendications de toutes les parties se sont intensifiées en 1969, lorsqu’une étude géologique a révélé l’existence de «gisements énergétiques substantiels» dans la mer.
Pourtant, rien de tout cela n’a vraiment été considéré comme une source de danger jusqu’en 1996, la Chine disposant alors de peu de ressources pour soutenir sa position. Et puis, fin janvier 1996, des navires battant sous pavillon chinois s’engagent dans une bataille de quatre-vingt-dix minutes avec un patrouilleur philippin au large de l’île de Capones.
Le président états-unien Bill Clinton avait aidé à négocier un cessez-le-feu avant de signer le « US-China Military Maritime Consultative Agreement » qui mettait en place un forum visant à résoudre ce type de différend, tout en rétablissant dans le même temps un traité militaire entre les États-Unis d’Amérique et les Philippines. Les tensions se sont d’autant plus apaisées en 2002, lorsque la Chine et les dix pays de l’Association des nations d’Asie du Sud-Est (Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande, Brunei, Vietnam, Laos, Birmanie et Cambodge) ont signé la Déclaration sur la conduite des parties en mer de Chine méridionale.
Joseph Kouamé