Le leader libérien et légendaire joueur de football, George Weah, a admis sa défaite face au chef de l’opposition Joseph Boakai lors d’un second tour tendu, soulignant l’importance de placer l’intérêt national au-dessus des intérêts personnels. Cette déclaration a été saluée par de nombreux citoyens de la plus ancienne république d’Afrique.
Le président sortant du Liberia, George Weah, a reconnu sa défaite à l’élection présidentielle de mardi et félicité l’opposant Joseph Boakai, dont la victoire s’est confirmée samedi avec de nouveaux chiffres de la commission électorale. L’issue démocratique de ce scrutin rompt avec les coups d’Etat survenus ces derniers mois dans la région.
« Ce soir, le CDC (le parti de M. Weah) a perdu l’élection mais le Liberia a gagné. C’est le temps de l’élégance dans la défaite », a déclaré M. Weah, ancienne gloire du football élue en 2017, dans un discours vendredi soir sur la radio publique.
“Je suis tellement heureux que le président ait accepté sa défaite parce qu’il savait très bien qu’il n’a jamais fait le bien. Et maintenant, il veut prouver aux Libériens qu’il les aime en l’acceptant parce que s’il ne l’accepte pas, nous risquons d’aller à la guerre, et nous ne voulons pas y retourner”, a déclaré Patience Quiah, étudiante en soins infirmiers.
“Je sais que, par la grâce de Dieu, il travaillera très dur pour apporter un changement au Libéria parce qu’il l’a dit, il veut mettre le Libéria sur la carte des (autres) nations, il veut mettre le Libéria sur la carte, que ce qui est juste sera fait dans ce pays, contrairement à ce qui s’est produit et qui n’était pas juste”, a ajouté Amos Harris, chauffeur de poids lourd.
“Les résultats annoncés ce soir, même s’ils ne sont pas définitifs, indiquent que… Boakai est dans une avance que nous ne pouvons pas dépasser”, a reconnu ouvertement Weah dans un discours à la radio nationale, vendredi soir. Il a estimé que son parti, le CDC, “a perdu les élections, mais que le Libéria a gagné”, ajoutant : “C’est le moment de faire preuve de bienveillance dans la défaite”.
Boakai, 78 ans, avait perdu largement face à Weah, 57 ans, au deuxième tour de l’élection présidentielle en 2017. Par contre, pour cette élection 2023, avec plus de 99,5 pour cent des bureaux de vote ayant déclaré le résultat des votes après le second tour de mardi, Boakai a recueilli 50,89 pour cent des suffrages exprimés, selon la commission électorale.
Boakai avait une avance de 28 000 voix sur Weah, selon les chiffres de vendredi. Lors du premier tour le mois précédent, les deux hommes étaient au coude à coude, Weah ayant une avance nationale de seulement 7 126 voix. L’élection de Weah, premier footballeur africain à remporter le Ballon d’Or, avait suscité de grands espoirs de changement au Libéria, un pays encore marqué par des guerres civiles et l’épidémie d’Ebola de 2014 à 2016. Cependant, les critiques ont reproché à son gouvernement d’être corrompu et de ne pas avoir tenu sa promesse d’améliorer la vie des plus démunis.
Les États-Unis d’Amérique (premier concernés car fondateurs de cette colonie de noirs affranchis appelée « Société Américaine de Colonisation, en 1847) ont félicité « le président élu Boakai pour sa victoire et le président Weah pour son acceptation pacifique des résultats ». “Nous appelons tous les citoyens à suivre l’exemple du président Weah et à accepter les résultats”, a dit le porte-parole du département d’Etat états-unien, Matthew Miller, dans un communiqué.
Weah a déclaré qu’il avait parlé à Boakai “pour le féliciter de sa victoire”.
Ces élections marquaient le premier scrutin depuis que les Nations Unies ont mis fin à leur mission de maintien de la paix en 2018, une mission instaurée à la suite des deux guerres civiles ayant causé la mort de plus de 250 000 personnes au Libéria entre 1989 et 2003.
Les observateurs internationaux, dont l’Union Européenne, ont salué la tenue d’élections paisibles dans le pays. La CEDEAO, bloc régional de la Communauté Economique des États de l’Afrique de l’Ouest, a qualifié le déroulement du scrutin de « globalement pacifique », tout en notant des incidents isolés ayant entraîné « des blessures et des hospitalisations » dans quatre provinces.
Des affrontements survenus pendant la campagne ont malheureusement causé plusieurs décès avant le premier tour, suscitant des craintes de violences post-électorales. Environ 2,4 millions de Libériens étaient éligibles pour voter lors de ce scrutin, avec un taux de participation d’environ 66%, selon le site Internet de la commission électorale.
Boakai, vétéran de la politique ayant été vice-président d’Ellen Johnson Sirleaf, la première femme chef d’État élue en Afrique, a été l’un des candidats à cette élection. Le Libéria, comptant environ cinq millions d’habitants, demeure l’un des pays les plus pauvres au monde, où plus d’un cinquième de la population vit avec moins de 2,15 dollars par jour, d’après la Banque mondiale.
Joseph Kouamé