Les organisations environnementales estiment qu’il existe au moins 60 000 puits de pétrole abandonnés dans l’Ouest canadien, contribuant ainsi à l’émission de milliers de tonnes de gaz à effet de serre chaque année. (Avec Franceinfo).
Alors que la COP28 se déroule, le Canada est loin d’être un modèle en termes d’énergies fossiles. En Alberta, à l’Ouest du pays, on trouve des milliers de puits de pétrole abandonnés dispersés dans les champs ou au bord des routes. Certains fuient, émettant du gaz, constituant ainsi de véritables menaces écologiques en suspens qui suscitent l’inquiétude parmi les agriculteurs et les écologistes.
« Voici un puits abandonné. C’est vieux, c’est cassé », raconte le militant Mark Dorin, en désignant une grande pompe rouillée, des manivelles et un manomètre posés dans le champ. Ce puits de pétrole n’est plus utilisé et, pourtant, il est encore accessible. Mark Dorin connaît bien le sujet : nous sommes à quelques kilomètres de la ferme de ses parents où un puits est resté ouvert pendant des années.
« Un puits comme ça pompe du pétrole, de l’eau, du gaz. Ensuite, les liquides sont envoyés dans ce réservoir, détaille-t-il. Sauf que ce réservoir doit être situé à au moins 60 mètres de la route. Mais là, il est à 12-15 mètres maximum. Si le gaz s’échappe de ce réservoir et que des gens passent sur la route, il y a un risque d’explosion. » La plupart de ces puits se trouvent sur des terrains des agriculteurs canadiens, mais ils ne les possèdent pas : les entreprises pétrolières leur donnent de l’argent pour compenser leur parcelle devenue inexploitable.
« Le puits était juste là, mais il ne reste rien maintenant », souffle Joe Lovell. Ce fermier a vu le puits sur son champ de céréales fermer la semaine dernière, après sept ans d’attente, date à laquelle l’entreprise propriétaire a fait faillite « parce que les prix du gaz ont baissé ». Il précise : « Généralement, les entreprises pétrolières forent des puits de gaz peu profonds, ce qui ne coûte vraiment pas cher. Elles les pompent au maximum. Et une fois que les prix du gaz baissent, la plupart du temps, elles sont mises en redressement judiciaire et vendent leurs parts, ou alors, elles font faillite, comme chez nous. »
Un organisme ferme et sécurise les puits
S’il y a faillite, « Orphan Well Association » prend le relais. Le travail de cet organisme financé par l’industrie pétrolière et par l’Etat est de fermer et sécuriser les puits. Mais il faut compter plusieurs années pour venir à bout de la paperasse. « Dans certains puits, il y a du sulfure d’hydrogène, un gaz très toxique qui peut tuer des personnes avec de très faibles concentrations, précise Lars DePauw, le directeur du programme. Il faut donc s’assurer qu’aucun de ces gaz ne puisse remonter à la surface. Côté environnement, il faut empêcher le méthane de s’échapper du puits car c’est un gaz à effet de serre. »
Officiellement, 10 000 puits sont orphelins en Alberta, mais d’après les associations écologistes, il y en aurait minimum 50 000 autres non recensés, soit des milliers de tonnes de gaz à effet de serre émises chaque année absolument pour rien..
Didier Maréchal