Certains pays de l’Union européenne ont pris leurs distances par rapport à l’opération des EUA contre les Houthis dans la Mer Rouge. Pourquoi cela ?

Les partenaires de l’Union Européenne ont été hésitants à soutenir une initiative maritime des États-Unis d’Amérique visant à sécuriser les navires contre les attaques des militants houthis en Mer Rouge. (Source : Euronews)

En décembre 2023, les États-Unis d’Amérique ont lancé l’opération « Prosperity Guardian » (OPG) dans le but de défendre les navires marchands internationaux contre une série d’attaques de drones et de roquettes perpétrées récemment par les Houthis. Ce groupe rebelle, soutenu par l’Iran, contrôle une partie du Yémen.

Les Houthis ont initié des attaques après le début de la guerre entre Israël et le Hamas, menaçant sérieusement les flux commerciaux vers l’Europe. Les compagnies maritimes majeures cherchent à éviter cette zone. Affirmant soutenir le Hamas, les Houthis menacent les navires se dirigeant vers Israël dans la mer Rouge, où transite 12 % du commerce mondial.

Durant le dernier week-end de l’année 2023, les rebelles houthis ont tenté de saboter un navire de la société danoise « Maersk », incitant la marine états-unienne à répliquer en neutralisant les petites embarcations des Houthis et en tuant dix assaillants.

La possibilité de contourner par le Sud de l’Afrique rallonge le trajet d’un mois, risquant de perturber le commerce mondial en raison des retards et coûts supplémentaires engendrés.

L’Iran a déployé, lundi dernier, son navire de guerre « Alborz » en mer Rouge, selon l’agence de presse iranienne « Tasnim ».

L’UE s’interroge entre le soutien aux efforts déployés par les États-Unis d’Amérique pour protéger la liberté de navigation en mer Rouge et ainsi la sauvegarde des intérêts commerciaux européens, tout en évitant de contribuer à l’aggravation des tensions au Moyen-Orient. Selon Farea Al-Muslimi, chargé de recherche pour le programme Moyen-Orient et Afrique du Nord de « Chatham House », les 27 sont confrontés au défi de « trouver le bon équilibre ». « L’Europe essaie autant que possible d’éviter de nouveaux débordements dans la région à la suite de la guerre à Gaza, et la dernière chose que l’on souhaite est donc une nouvelle ligne de front active », explique Farea Al-Muslimi. « En même temps, comment laisser les Houthis s’en tirer ? Car cela pourrait également inspirer d’autres milices dans la Corne de l’Afrique ».

Certaines nations de l’UE hésitent

Alors que l’opération menée par les États-Unis d’Amérique avait initialement obtenu le soutien de six pays européens, certains d’entre eux ont depuis pris leurs distances, craignant une accentuation des tensions et une escalade du conflit au Proche-Orient.

Le ministère français de la Défense salue les initiatives qui visent à renforcer la liberté de naviguer en mer Rouge, telles que l’OPG, mais il souligne que ses navires de guerre dans la région resteraient sous commandement français.

L’Italie a annoncé qu’elle engageait une frégate pour patrouiller dans la zone, mais que cela se ferait « dans le cadre d’une opération existante autorisée par le Parlement et non à travers l’opération « Prosperity Guardian ».

Le ministère espagnol de la Défense précise de son côté que le pays ne participerait pas à l’opération. Madrid dément également avoir utilisé son veto pour s’opposer au détournement de l’opération navale européenne de lutte contre la piraterie « Atalanta », dont le siège se trouve en Espagne, afin de protéger les navires de la mer Rouge contre les attaques des Houthis. Le Premier ministre espagnol, Pedro Sánchez, appelle à la création d’une mission européenne spécifique pour patrouiller dans la zone et protéger les intérêts commerciaux européens.

Un porte-parole du ministère allemand des Affaires étrangères a expliqué, la semaine dernière, que l’Allemagne travaillait avec ses alliés de l’UE.

Certains experts estiment que l’UE doit réagir aux attaques des Houthis.

« Les Européens devraient intensifier leur présence navale en mer Rouge et renforcer la coordination intra-européenne », a écrit en décembre Camille Lons, chercheur au « European Centre for Foreign Relations », citant le projet « Atalanta » comme l’un des mécanismes existants qui pourraient être réaffectés.

Mais selon Farea Al-Muslimi, les décideurs politiques occidentaux sont confrontés à un « jeu à somme nulle » où l’intervention pourrait également déclencher une crise humanitaire majeure pour les Yéménites. « Ce sont les Yéménites qui paieront le prix le plus élevé », explique-t-il, « car l’intervention entraînera une augmentation des prix des denrées alimentaires et des importations de marchandises dans un pays déjà déchiré par neuf années de guerre ».

Quelles sont les nations européennes qui sont intervenues ?

Le Danemark a réagi à l’attaque la plus récente contre son navire « Maersk » en promettant d’envoyer un navire de guerre dans la région pour « empêcher des attaques similaires ». Cette attaque « souligne la gravité de la situation en mer Rouge », a déclaré mardi le ministre danois des Affaires étrangères, Lars Løkke Rasmussen.

La Grèce a également annoncé qu’elle contribuerait à l’effort mené par les États-Unis en envoyant une frégate, tandis que les Pays-Bas ont indiqué qu’ils fourniraient des officiers de marine.

Toutefois, malgré le soutien de ces trois pays, la réticence des principales nations de l’UE à soutenir explicitement les États-Unis d’Amérique porte incontestablement un coup à l’opération. ON aurait aimé que les pays européens en question ai la même présence d’esprit et de volonté de conserver un maximum leur souveraineté en n’étant pas les pions des Etats-Unis d’Amérique, dans le cadre de la guerre entre la Russie et l’Ukraine, mais il semble que, non seulement, la propagande anti-russe qui n’a, en réalité, jamais cessé avec la fin de la guerre froide, mais avait pris une forme plus « subtile », plus sournoise », se soit mieux implanté dans les esprits européens – et ce à quoi il faut ajouter les forts taux de populations arabo-musulmanes dans les pays concernés, que les gouvernements français, allemand, espagnol et italiens voudront à tout prix éviter de semer le chaos dans leurs pays respectifs.

Le Royaume-Uni a apporté son soutien à l’opération états-unienne, le ministre de la Défense, Grant Shapps, promet que le gouvernement britannique pourrait prendre des « mesures directes » contre les rebelles houthis. Londres et Washington seraient en train de préparer une déclaration commune pour adresser un dernier avertissement.

Farea Al-Muslimi estime que la nature hautement incertaine des frappes houthis signifie que tout appel à la prudence de la part des décideurs politiques occidentaux pourrait s’avérer vain. « Les Houthis sont le groupe le plus imprévisible qui existe probablement à l’heure actuelle au Moyen-Orient », explique-t-il. « De nombreux pays arabes souffrent également des attaques des Houthis, plus que les pays occidentaux, mais ils ne peuvent pas faire grand-chose », précise le chercheur.

Didier Maréchal & Christian Estevez

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