Royaume-Uni : un comité parlementaire désapprouve vivement le projet d’expulsion des immigrants vers le Rwanda

Une commission parlementaire britannique a conclu que le projet de loi du gouvernement visant à expulser vers le Rwanda les immigrants arrivés de manière irrégulière est « incompatible » avec les obligations du pays en matière de droits Humains.

Le Premier ministre britannique, Rishi Sunak, subit un revers avec de nouvelles critiques à l’égard du projet de loi visant à expulser les immigrants arrivés de manière irrégulière au Royaume-Uni. Une commission parlementaire, composée de 12 membres provenant des deux chambres du Parlement, qualifie le projet de « fondamentalement incompatible » avec les obligations du Royaume-Uni en matière de droits Humains, selon un rapport publié ce 12 février.

Le texte a pourtant été réécrit après la censure de la Cour Suprême britannique en novembre dernier. La plus haute juridiction estimait qu’envoyer des immigrants au Rwanda est illégal, ce pays d’Afrique de l’Est ne pouvant être considéré comme sûr pour les exilés. Adossé à un nouveau traité entre Londres et Kigali, le projet de loi définit désormais le Rwanda comme un pays tiers sûr et empêche le renvoi des immigrants vers leur pays d’origine.

Le texte « porte atteinte » aux « droits humains »

Mais la commission s’inquiète en particulier de « l’obligation pour les tribunaux de considérer le Rwanda comme un pays ‘sûr’ et de la limitation de l’accès aux tribunaux pour faire appel des décisions ». De plus, selon les députés, il n’est « pas clair » que les immigrants expulsés vers le Rwanda puissent avoir « la garantie » de ne pas être envoyés dans un État où ils pourraient être persécutés.

« Les droits humains sont universels », souligne la commission. Mais le texte « porte atteinte à ce principe essentiel en refusant à un groupe particulier [les migrants expulsés, ndlr] les protections garanties par la loi sur les droits humains ». Avec ce projet, des organismes publics seraient « autorisés à agir en violation de la Convention européenne des droits de l’Homme », alerte la commission. « Si le Royaume-Uni adopte une législation qui ne respecte pas ses propres engagements internationaux en matière des droits Humains, cela nuira gravement à sa capacité d’influencer les autres pays pour qu’ils respectent le droit internationale », écrit-elle encore dans ce rapport.

Le texte, très controversé, avait déjà été étrillé par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux Réfugiés (HCR) en janvier dernier. L’ONU a estimé que le projet n’était toujours « pas compatible » avec le droit international. Il « ne répond pas aux normes requises en matière de légalité pour le transfert des demandeurs d’asile », avait tranché l’agence onusienne après une évaluation juridique du projet.

Le HCR avait accusé, une nouvelle fois, le Royaume-Uni, de violer l’esprit de la Convention de Genève, relative au statut de réfugié, en « déplaçant le fardeau » alors que la plupart des réfugiés sont hébergés dans les pays en développement.

Ce projet est actuellement débattu à la Chambre des Lords – la chambre haute du Parlement – cette semaine. Le texte divise au sein même du parti conservateur : des élus l’ont critiqué alors que d’autres ont réclamé son durcissement.

Rishi Sunak en a pourtant fait le socle de sa politique de lutte contre l’immigration clandestine et espère pouvoir le mettre en application avec les élections législatives prévues cette année. Mi-janvier, il l’a même qualifié de « priorité nationale urgente ».

Didier Maréchal

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