L’Égypte dévalue sa monnaie à un niveau record après une hausse massive des taux d’intérêt

Ce 6 mars, Le Caire a effectué une dévaluation importante de la livre égyptienne, passant de 31 livres pour un dollar à près de 50 livres pour un dollar. En quelques heures seulement, la monnaie a perdu 60% de sa valeur par rapport au dollar, qui sert de référence. (Avec RFI).

En Égypte, la Banque Centrale, qui maintenait le taux de la livre inchangé depuis plus d’un an, a levé la restriction ce mercredi 6 mars, permettant aux banques d’acheter et de vendre à des prix libres. À la fermeture, le taux officiel a rejoint celui du marché noir, s’élevant pratiquement à 50 livres pour un dollar.

Le marché noir était devenu, sauf exceptions, le véritable marché des devises, car les banques avaient presque du mal à se procurer des dollars, sauf par le biais de dépôts bloqués offrant un taux d’intérêt de 7% sur la devise états-unienne.

Le manque de devises a commencé à entraver l’économie égyptienne, provoquant l’arrêt d’industries en raison du manque de pièces de rechange. Plus préoccupant, les prix des denrées alimentaires ont connu une hausse spectaculaire, avec une multiplication par trois pour la viande, le poulet, les œufs, l’huile, le sucre et le pain non subventionné. Il reste à voir si la livre se stabilisera ou si elle continuera à décliner.

Sobhy est un patron de commerce désœuvré. Il redoute de devoir fermer sa boucherie, faute de clients. L’inflation a transformé la viande en produit de luxe pour beaucoup d’Égyptiens. « Maintenant, c’est très cher. Le kilo de viande est à 450 livres. Que vont acheter les gens ? Que vont-ils manger, ou boire ? La livre a encore chuté. Qu’est-ce qu’on va faire ? Que peut-on en penser ? C’est dur », s’inquiète-t-il.

Le commerçant accuse le coup de cette nouvelle dévaluation, signe de la mauvaise santé économique du pays. Sur un marché installé pour le Ramadan, Walid remarque lui aussi que les habitudes des clients ont changé. « La livre a encore flotté. Il faut d’abord penser à manger et à boire avant d’acheter d’autres choses, comme des lanternes, ce que faisaient certains clients les autres années », explique-t-il.

Une énième dévaluation de la livre en échange d’un prêt du FMI n’arrangera rien, alerte Wael Gamal, en charge des droits économiques pour l’ONG « Egyptian Initiative for Personal Rights ». « La dévaluation de la livre se répète depuis 2016. Ça n’a pas aidé à résoudre les problèmes comme l’emploi, l’investissement, la production… Si on ne résout pas ces problèmes, cela va continuer », analyse-t-elle.

Le FMI a promis huit milliards de dollars à l’Égypte. Et le pays est déjà endetté à hauteur de 165 milliards.

Joseph Kouamé

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