Le régime islamiste en Afghanistan a été mis au ban des nations après son retour au pouvoir en 2021, notamment en raison des discriminations qu’il pratique envers les femmes. Mais les Nations Unies (ONU) veulent donner une chance au dialogue, alors que la moitié de la population afghane vit sous le seuil de pauvreté. Une rencontre est prévue à Doha le 30 juin prochain.
Quitte à déplaire, l’ONU prône le compromis pour réintégrer, au sein de la communauté internationale, un régime taliban* afghan honni et mis au ban depuis son retour au pouvoir le 15 août 2021. Le 30 juin, à la tête d’une coalition de vingt-cinq pays, les Nations Unies recevront, à Doha (Qatar), les chefs islamistes pour acter l’ouverture d’une nouvelle ère de coopération.
C’est l’aboutissement de près d’un an d’efforts diplomatiques et de concessions, qui ont fini par déplaire à certaines capitales occidentales, dont Paris, Berlin et Washington. Des états d’âme qui n’ont pas empêché ces mêmes pays de nouer des relations proches, en secret, avec les taliban sur le terrain sécuritaire.
Cette séance de réconciliation n’était pas gagnée. Tout débute, à Doha, les 30 et 31 juillet 2023, là même où les islamistes et les États-Unis d’Amérique avaient signé l’accord de retrait, le 29 février 2020, des soldats états-uniens d’Afghanistan.
Conditions « pas acceptables »
Le processus démarre après la brutale rupture du dialogue entre états-uniens et taliban, fin 2022, après l’annonce, par les islamistes afghans, de nouvelles mesures excluant les femmes de l’espace public et de l’accès au savoir. Le dialogue reprend, mais, après plusieurs rencontres, c’est au tour des taliban, en février, de rompre les discussions pour dénoncer les recommandations faites, en novembre 2023, par l’ONU.
L’organisation internationale prévoyait, en effet, de créer un « envoyé spécial pour l’Afghanistan ». L’idée est refusée par les taliban, au motif que cela serait une atteinte à leur souveraineté, et que ce rôle est déjà assumé par le chef de la Mission d’assistance des Nations Unies en Afghanistan (MANUA), dont le mandat a été renouvelé, à deux reprises, en 2023 et 2024, par le Conseil de sécurité. De même, ils contestent l’invitation, par l’ONU, à Doha, de représentants de la société civile afghane, dont certains mouvements de défense des droits des femmes. Les islamistes estiment qu’ils n’ont pas à être ravalés au rang de membres de la société civile. Enfin, ils veulent que le secrétaire général de l’ONU assiste, en personne, à la rencontre finale à Doha.
Dans un communiqué, les Nations Unies assurent, dans un premier temps, que les conditions posées par les talibans « ne sont pas acceptables ». Mais, début juin, elles finissent néanmoins par les accepter en contrepartie du retour des islamistes afghans à la table des discussions. Il n’y aura donc pas d’« envoyé spécial pour l’Afghanistan », pas plus que de présence de société civile. En revanche, le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, n’assistera pas à l’événement.
Joseph Kouamé
* « Talban » sans « S » au pluriel car étant déjà le pluriel, en arabe, de « talib ».