Deux proches de l’opposant mozambicain Venancio Mondlane, dont son avocat qui préparait une plainte dénonçant des fraudes lors des récentes élections du 9 octobre, ont été tués à bout portant, dans la nuit du vendredi 18 au samedi 19 octobre à Maputo, a-t-on appris de sources concordantes. (Source : AFP)
« Nous confirmons l’assassinat de nos deux membres ce matin », a déclaré à l’AFP Albino Forquilha, le président de « Podemos », parti qui a soutenu la campagne du candidat à la présidentielle, Venancio Mondlane, avant de se rendre auprès des familles des victimes.
La police a affirmé « enquêter sur cette affaire »
L’avocat de l’opposant, Elvino Dias, ainsi qu’un membre du parti « Podemos », Paulo Guambe, ont été tués lorsque leur voiture a été bloquée dans le centre de Maputo, la capitale du Mozambique, ont affirmé des témoins.
Les deux hommes, installés à l’avant, ont été tués par deux assaillants qui ont ouvert le feu. Les images circulant sur les réseaux sociaux montrent les deux hommes assassinés à l’avant d’une voiture, leurs corps affalés et tâchés de sang visibles depuis les fenêtres brisées. Une vingtaine de balles auraient été tirées contre le véhicule, selon des témoins.
« Choc » et « immense tristesse »
Elvino Dias avait dénoncé des fraudes l’an dernier lors des élections municipales remportées par le parti « Frelimo » au pouvoir depuis l’indépendance, le 25 juin 1975, et fortement contestées par l’opposition, affirmant que Venancio Mondlane avait en réalité obtenu la majorité des voix dans la capitale. Il préparait en outre une plainte dénonçant des fraudes lors des élections du 9 octobre dernier.
Dans une démocratie, « les assassinats à motivation politique n’ont pas leur place », a dénoncé l’Union Européenne dans un communiqué, réclamant une enquête « immédiate, approfondie et transparente ». En outre, l’UE appelle à « la plus grande retenue » et juge « essentiel que tous les candidats bénéficient de mesures de protection rigoureuses en cette période post-électorale ».
La « Renamo », principal parti d’opposition qui semble avoir été devancé par « Podemos » aux élections du 9 octobre passé, a dénoncé la “perte irréparable” et “tragique” de deux citoyens œuvrant pour “l’État de droit”. L’association des juges (AJM) a exprimé sa “profonde indignation”, tandis que l’ordre des avocats a partagé son “choc” et son “immense tristesse”. Dans son communiqué, il a déclaré : “Nous devons nous lever contre l’impunité et le crime organisé qui ont pris le contrôle des institutions” du pays.
Des dizaines d’avocats, majoritairement en robe noire, se sont réunis dans la matinée près de la scène du crime, applaudissant longuement leur confrère tombé sous les balles.
« Integridade », un groupe d’observateurs de la société civile, a qualifié ce crime de “répugnant”, le considérant comme un “acte d’intimidation” et un “coup clair porté à la démocratie, à la vérité et à la justice électorale”. Elvino Dias avait récemment exprimé ses inquiétudes sur sa page Facebook concernant un plan visant à l’assassiner, selon le communiqué.
À quelques jours de la publication attendue des résultats définitifs des élections pour élire le président, le Parlement et dix gouverneurs de provinces, Venancio Mondlane a proclamé sa victoire à la présidentielle et a appelé à manifester ce lundi 21 octobre pour dénoncer la fraude, tandis que le « Frelimo » affirme avoir une large avance.
Le Mozambique a connu plusieurs assassinats autour des périodes électorales, y compris celui d’un responsable observateur en 2019 et d’un journaliste l’an dernier. Cependant, “cette fois, on s’en prend à des représentants de partis. Il y a une escalade”, commente un analyste souhaitant rester anonyme. “C’est un énorme choc”, ajoute-t-il, ce qui pourrait soit mobiliser et encourager la grève générale prévue ce lundi, soit intimider et réduire les velléités de manifestation.
Joseph Kouamé