Japon : après la déroute de son parti aux législatives, le premier ministre promet «des réformes fondamentales»

Le Japon a voté ce dimanche 27 octobre pour des élections législatives anticipées convoquées par le nouveau Premier ministre, Shigeru Ishiba. Sa formation, le Parti libéral-démocrate, a perdu sa majorité à la chambre basse du Parlement. Shigeru Ishiba promet « des réformes fondamentales » au sein du parti. (Avec : AFP)

Le parti au pouvoir au Japon a perdu sa majorité à la chambre basse du Parlement lors de législatives, ce dimanche 27 octobre, pour la première fois depuis 2009, selon des projections. Un échec cuisant pour le nouveau Premier ministre japonais, Shigeru Ishiba, qui avait convoqué ce scrutin anticipé.

À l’issue d’une campagne difficile, le Parti libéral-démocrate (PLD) et son allié Komeito (centre-droit) sont même « certains de ne pas atteindre la majorité » absolue de 233 sièges à eux deux, a affirmé, ce lundi, la télévision publique NHK, sur la base de projections de sortie des urnes.

Le PLD a remporté 191 sièges et Komeito 24 (sur les 465 sièges de la chambre basse), selon les décomptes de la NHK, ce lundi matin. Aux précédentes législatives de 2021, le PLD avait obtenu la majorité absolue, avec 259 sièges. Komeito en avait quant à lui 32.

Il s’agirait du pire résultat enregistré depuis 2009 par le Parti libéral-démocrate, et ce à l’issue d’une campagne au cours de laquelle il a pâti de la forte inflation dans l’archipel nippon et des retombées d’un scandale financier.

« Nous avons été sévèrement jugés »

Un tel résultat est quasi-inédit dans l’histoire du PLD, qui a réussi à se maintenir au pouvoir presque sans interruption depuis 1955.

Après cette débâcle électorale, Shigeru Ishiba, devenu Premier ministre le 1er octobre, après avoir pris la tête du parti, dit envisager « des réformes fondamentales concernant les financements et la politique » au sein de son parti. Il avait lui-même convoqué ces élections anticipées, espérant bénéficier d’un état de grâce pour consolider son pouvoir.

« Nous avons été sévèrement jugés », a déclaré Shigeru Ishiba à la NHK alors que le résultat de sa coalition avec Komeito était encore incertain. Les électeurs « ont nettement exprimé leur volonté de voir le PLD réfléchir [aux causes de sa défaite] et devenir un parti agissant en accord avec la volonté du peuple », avait-il ajouté.

L’ambiance était donc morose pendant la soirée électorale au siège du PLD. « Si nous ne parvenons pas à obtenir une majorité à cause de la sévérité du jugement du public, nous demanderons au plus grand nombre de gens possible de coopérer avec nous », a déclaré à des journalistes le responsable des élections du PLD, Shinjiro Koizumi. Ce dernier a présenté, ce lundi 28 octobre, sa démission à Shigeru Ishiba afin d’assumer la responsabilité de la débâcle.

Percée du PDC

Le Parti démocratique constitutionnel (PDC), la principale force d’opposition, a quant à lui nettement renforcé sa présence au Parlement, a affirmé la NHK qui le créditait ce lundi matin de 143 sièges, alors qu’il n’en avait que 96 auparavant.

« Les électeurs ont choisi le parti le plus apte à faire avancer les réformes politiques. C’est pourquoi nous avons reçu autant de soutien », a lancé son dirigeant Yoshihiko Noda, Premier ministre pendant 15 mois en 2011-2012, selon Kyodo. Cet homme de 67 ans a promis d’engager des « discussions sincères avec divers partis », martelant que « notre philosophie de base est que l’administration PLD-Komeito ne peut pas continuer », d’après Fuji-TV.

Yoshihiko Noda avait critiqué, samedi, « la politique du PLD consistant à mettre en œuvre rapidement des mesures pour ceux qui leur donnent beaucoup d’argent ». Toutefois, sa posture « est assez similaire à celle du PLD. Il est fondamentalement conservateur », avait expliqué à l’AFP Masato Kamikubo, politologue à l’université Ritsumeikan, avant le scrutin.

Scandale financier

Le PLD peine à tourner la page d’un scandale de « caisses noires » qui avait déjà contribué à l’impopularité du précédent Premier ministre, Fumio Kishida. Shigeru Ishiba avait assuré, samedi, lors d’un meeting à Tokyo, que son parti voulait « repartir sur de nouvelles bases en tant que parti équitable, juste et sincère ».

Le dirigeant a promis aux électeurs « un nouveau Japon », espérant appliquer son programme de renforcement de la défense, de soutien accru aux ménages à faibles revenus et de revitalisation des campagnes japonaises. Mais alors que Shigeru Ishiba s’était engagé à ne pas soutenir la campagne des membres incriminés dans le scandale, le quotidien « Asahi » a rapporté que le PLD avait versé 20 millions de yens (122 000 euros) aux sections locales dirigées par ces responsables. De quoi provoquer la fureur de l’opposition et la colère des électeurs, alors même que l’envolée persistante des prix, qui érode le pouvoir d’achat, alimente leur frustration.

Shigeru Ishiba est également critiqué pour avoir fait marche arrière sur plusieurs sujets depuis son élection, comme la possibilité pour un couple marié de ne pas porter le même nom de famille, ou une plus forte taxation des plus-values.

Shigeru Ishiba avait longtemps été un « outsider » au sein du PLD, n’hésitant pas à critiquer ses dirigeants et les dynasties politiques, ce qui lui assurait une certaine popularité une image qui s’est rapidement écornée pendant la campagne.

Joseph Kouamé

Laisser un commentaire