Notre point quotidien, de ce 1er mars, sur la situation en République Démocratique du Congo et ses répercussions à l’étranger.
Nouveau massacre dans le nord-est : au moins 23 civils tués par les ADF
Au moins 23 personnes ont été tuées et une vingtaine d’autres prises en otage lors d’une attaque menée par les Allied Democratic Forces (ADF) dans le village de Samboko, situé dans le territoire de Mambasa, au nord-est de la République démocratique du Congo (RDC).
Selon Jospin Paluku, coordonnateur d’une organisation locale de la société civile, les rebelles ont attaqué mardi et mercredi plusieurs localités, notamment Matolo et Samboko, laissant derrière eux un bilan provisoire de 23 morts.
Les victimes ont été tuées à la machette, par balles et certaines brûlées dans leurs maisons, a précisé un acteur humanitaire. Parmi les 20 otages figurent le fils du chef du village de Matolo.
Les ADF, un groupe armé ougandais actif en RDC depuis les années 1990, sont considérés comme les plus meurtriers dans cette partie du pays. Ils ont prêté allégeance à l’État islamique et continuent de massacrer des civils malgré le déploiement de l’armée congolaise (FARDC) et des forces ougandaises (UPDF).
Tensions politiques : Mgr Donatien Nshole et Ramazani Shadary convoqués
Le vice-Premier ministre de l’Intérieur et de la Sécurité a convoqué Mgr Donatien Nshole, secrétaire général de la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), après un communiqué dans lequel l’épiscopat dénonçait une stigmatisation des Congolais d’expression swahiliphone à Kinshasa et dans d’autres villes.
Le ministre exige que Mgr Nshole fournisse des preuves concrètes sur ces discriminations, notamment les noms, les lieux et les adresses des victimes.
Emmanuel Ramazani Shadary, secrétaire permanent du PPRD (parti de l’ex-président Joseph Kabila), a lui aussi été convoqué.
Bien que les raisons exactes de sa convocation ne soient pas précisées, cette décision intervient après que des membres du gouvernement ont accusé Joseph Kabila de soutenir les rebelles du M23/AFC dans l’est du pays et d’être le parrain de la milice Mobondo dans la région du Bandundu.
Le PPRD a dénoncé ces accusations, les qualifiant d’absurdes et mensongères visant à nuire à l’image de l’ancien président.
Accusations contre Joseph Kabila : lien avec le M23/AFC ?
L’ex-président Joseph Kabila est au cœur d’une polémique après avoir critiqué la gouvernance de Félix Tshisekedi dans un quotidien sud-africain.
En réponse, les autorités congolaises l’accusent d’être derrière la rébellion du M23/AFC qui sème le chaos dans l’Est du pays. Un vice-Premier ministre est même allé jusqu’à déclarer que Joseph Kabila finance la milice Mobondo qui sévit dans la région du Bandundu.
Le PPRD rejette ces accusations, dénonçant une tentative de diversion pour masquer l’échec du gouvernement face aux crises sécuritaires.
L’ONU évacue en raison des tensions en RDC
Face à l’intensification des combats entre les rebelles du M23 et l’armée congolaise, l’ONU a décidé d’évacuer les familles de son personnel international basé au Burundi.
Le M23, soutenu par le Rwanda, s’est emparé de plusieurs villes stratégiques et se rapproche de la frontière burundaise. Pour éviter des tensions diplomatiques avec le Burundi, les évacuations ont été organisées dans la plus grande discrétion, selon des sources onusiennes.
Par ailleurs, la crise humanitaire s’aggrave : en seulement deux semaines, plus de 43 000 réfugiés congolais ont fui vers le Burundi, un exode sans précédent depuis 25 ans.
CPI : les crimes commis en RDC sont “des plus graves”
Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a qualifié les crimes commis dans le Nord-Kivu de “graves violations du droit international”.
Depuis octobre dernier, la CPI enquête sur des crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis depuis 2022 en RDC.
Selon Karim Khan, les crimes ne concernent pas uniquement le M23, mais aussi d’autres groupes armés comme les ADF.
Le Rwanda et son président Paul Kagame sont accusés de soutenir militairement le M23, ce que Kigali dément. Toutefois, l’ONU et plusieurs capitales occidentales affirment que des soldats rwandais sont déployés sur le territoire congolais.
Le procureur a rappelé que la CPI a compétence sur tout crime commis en RDC, que les auteurs soient des groupes armés ou des États.
Ramadan sous tension à Bukavu : les musulmans s’adaptent
À Bukavu, dans la province du Sud-Kivu, les musulmans préparent le ramadan dans un contexte sécuritaire très préoccupant.
Les prix des denrées alimentaires ont fortement augmenté, rendant difficile l’accès aux produits de base. Amina Mwarabu, une habitante, explique :« J’ai acheté juste quelques kilos de pommes de terre et des bananes plantains. Tout est devenu cher. Avec le chômage et l’insécurité, c’est compliqué. J’espère qu’Allah nous aidera à traverser cette période. »
Les responsables religieux ont dû adapter le programme des prières en raison de l’insécurité.
Cheikh Yassine Kapongo Mukoko, président du conseil théologal de la communauté musulmane de Bukavu, a annoncé que la prière du Taraweh (19h-21h) serait supprimée pour permettre aux fidèles de rentrer chez eux plus tôt.
Il conseille même aux musulmans vivant loin des mosquées de prier chez eux, afin d’éviter les risques liés aux braquages et attaques nocturnes.
Une situation critique
Alors que l’insécurité continue de ravager l’Est de la RDC, les tensions politiques et diplomatiques s’accentuent.
Entre massacres, accusations politiques, crise humanitaire et implication de la CPI, la situation reste explosive, avec un avenir incertain pour les millions de Congolais pris en étau entre les groupes armés et les luttes de pouvoir.
Joseph Kouamé