Syrie : le nouveau dictateur islamiste annonce de nouvelles institutions pour le pays

Le nouveau dictateur islamiste de la Syrie, Ahmed al-Charaa, a signé, ce jeudi 13 mars, une déclaration constitutionnelle marquant, selon lui, une « nouvelle page de l’histoire » du pays après plus d’une décennie de guerre. Cette nouvelle charte, élaborée par un comité spécialement mandaté, établit une stricte séparation des pouvoirs et garantit plusieurs libertés fondamentales. Parallèlement, les autorités ont annoncé la création d’un Conseil national de sécurité, chargé de coordonner les politiques sécuritaires du pays.

Une déclaration constitutionnelle pour une transition de cinq ans

La déclaration constitutionnelle, qui encadrera la période transitoire des cinq prochaines années, a été dévoilée lors d’une conférence de presse au palais présidentiel de Damas. Après sa signature, Ahmed al-Charaa a affirmé : « C’est une nouvelle page de l’histoire de la Syrie, où nous remplaçons l’injustice par la justice (…) et la souffrance par la miséricorde. »

Selon Abdel Hamid al-Awak, porte-parole du comité de rédaction, le texte consacre une séparation stricte des pouvoirs, un principe qui, selon lui, faisait défaut sous le régime précédent. Il garantit également la liberté d’expression, ainsi que des droits politiques et économiques renforcés pour les femmes.

Garantir les droits des femmes : une avancée réelle ou symbolique ?

La nouvelle Constitution affirme garantir la liberté d’opinion, d’expression et de presse, ainsi qu’une meilleure protection des droits des femmes. Une avancée saluée par certaines militantes, comme Abir Shamsi, qui estime que cette réforme institutionnalise les acquis obtenus par les femmes pendant la révolution syrienne : « Ce que contient la nouvelle Constitution était une demande de toutes les femmes en Syrie. En inscrivant ces acquis officiellement dans la loi, nous avons garanti leur protection. »

Cependant, d’autres voix expriment leur scepticisme quant à l’application réelle de ces droits. Samar Al-Abdallah, employée dans une entreprise alimentaire à l’ouest de Damas, rappelle que par le passé, les droits des femmes étaient souvent proclamés mais rarement appliqués : « La loi sur le statut personnel sous l’ancien régime incluait des droits pour les femmes, mais ils n’ont jamais été mis en œuvre. Nous avons besoin d’une véritable représentation féminine, et non d’une voix symbolique. »

De plus, il y a de quoi mettre en doute la réalité de ces droits des femmes alors que, dès la nomination du ministre de la Justice, le terroriste islamiste Shadi al-Waisi, celui-ci a ordonné, à toutes les femmes juges, de quitter leurs fonctions et de laisser la place aux hommes, aucune femme ne devant faire partie de l’appareil judiciaire syrien, au nom de la loi islamique.

Un Conseil national de sécurité pour renforcer l’autorité du président

Mercredi 12 mars, les nouvelles autorités syriennes ont également annoncé la création d’un Conseil national de sécurité, destiné à coordonner les politiques sécuritaires et politiques du pays.

Selon un décret publié sur le compte « Telegram » officiel de la présidence, ce Conseil sera présidé par Ahmed al-Charaa lui-même. Il comprendra également le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense, le directeur des Renseignements généraux et le ministre de l’Intérieur. Trois autres sièges seront attribués à des conseillers et experts nommés par ce pseudo- président.

Les réunions du Conseil auront lieu régulièrement et ses décisions en matière de sécurité nationale seront mises en œuvre en concertation avec ses membres.

Un contexte troublé par des violences récentes

Cette annonce survient alors que le pays est toujours sous le choc d’un nouveau bilan des violences du week-end du 8-9 mars. Une ONG accuse les forces de sécurité syriennes d’avoir tué 1 400 civils alaouites sur la côte après une « tentative de contre-révolution » (prétexte habituel de toute dictature pour s’autoriser à tuer « légalement »).

Toutefois, selon l’expert du CNRS Thomas Pierret, la création du Conseil national de sécurité n’est pas directement liée à ces massacres : « Ce Conseil comprend principalement des responsables civils, avec un seul militaire. Le président syrien semble vouloir créer des institutions où les militaires ont moins d’influence et concentrer un maximum de pouvoirs entre ses propres mains. » (propos qui démontrent que, « expert du CNRS » ne signifie pas d’office que l’analyse est pertinente, déjà du fait des biais cognitifs idéologiques des experts. En effet, le problème ne serait pas qu’il y ai de nombreux militaires dans ce conseil, mais plutôt qu’ils soient tous sunnites – religion de l’islam la plus fanatique qui considère les musulmans alaouites comme des hérétiques, et donc pouvant être maltraités et même tués selon la doctrine religieuse sunnite).

Un défi majeur reste toutefois à relever : établir une véritable autorité sur la nouvelle armée nationale syrienne, composée de multiples anciennes milices aux intérêts divergents. Un processus qui, selon les analystes, pourrait prendre plusieurs mois, voire des années.

Didier Maréchal & Christian Estevez

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