Afrique de l’Ouest : Le Niger et le Nigeria tentent de renouer le dialogue

Après plusieurs mois de crispations diplomatiques, les autorités du Niger et du Nigeria multiplient les signes d’apaisement, alors que le ministre nigérian des Affaires étrangères est attendu ce 16 avril à Niamey

Le ministre nigérian des Affaires étrangères, Yusuf Maitama Tuggar, est attendu ce mercredi 16 avril à Niamey pour une visite de travail. Ce déplacement s’inscrit dans un processus de rapprochement entre les deux pays après plusieurs mois de tensions provoquées par la prise de pouvoir après un Coup d’État du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie, au Niger, en juillet 2023.

La sécurité transfrontalière et la coopération économique au cœur des échanges

Si les blessures entre les deux voisins sont loin d’être refermées, le ton devrait être à l’apaisement pour des discussions sur notamment certains points majeurs ont rapporté à l’AFP, certaines sources diplomatiques.

Les échanges devraient porter sur la situation sécuritaire le long de la frontière entre le Nigeria et le Niger. Le ministre des Affaires étrangères nigerian, Yusuf Maitama Tuggar, pourrait aborder les solutions alternatives bilatérales suite au départ du Niger de la force conjointe multinationale sur le bassin du Lac Tchad (FMM). Crée en 1994 par la Commission du bassin du Lac Tchad, cette force militaire régionale composée à l’origine des armées du Cameroun, du Tchad, du Niger, du Bénin, et du Nigeria, a été réactivée en 2015 pour lutter contre la secte terroriste islamiste «Boko-Haram» et d’autres groupes armés dans la région. Le Tchad (novembre 2024) et le Niger ( février 2025) ont annoncé leur retrait de la force mixte «mettant en doute» ses « capacités» devant «Boko-Haram ».

L’enjeu de cette visite sera aussi économique. La délégation nigériane devrait prôner la réouverture des marchés transfrontaliers sur le corridor arrimant les États du Nord du Nigeria aux régions de Maradi et de Zinder, les deux greniers agricoles du Niger.

La question de l’énergie pourrait également être à l’ordre du jour alors que le Niger a subi une pénurie de carburant récemment. Les deux voisins pourraient tabler sur leur projet de gazoduc devant les connecter à l’Algérie.

Les nigérians devraient aussi faire part de l’avancée des travaux du chemin de fer reliant Maradi à Kano, dont la livraison est prévue en 2026. Un investissement auquel Abuja contribue à hauteur de deux milliards de dollars, dans le cadre de la Zone de libre échange continentale africaine.

Abuja-Niamey: un rapprochement en douceur malgré des tensions

Une première initiative dans ce sens avait été observée en début mars, lorsque le chef de la diplomatie nigérienne, Bakary Yaou Sangaré, a reçu l’ambassadeur du Nigeria à Niamey, Mohammed Sani Usman. À cette occasion, les deux responsables avaient évoqué les perspectives de «renforcement» de «la coopération bilatérale», dans un climat encore marqué par des divergences sur les questions de sécurité transfrontalière. Les deux parties avaient alors convenu de la nécessité d’une concertation technique, tout en réaffirmant leur volonté de maintenir le dialogue face aux défis sécuritaires communs.

Dans la foulée, les autorités nigériennes ont annoncé la réorientation de leurstratégie militaire dans le Sud-Est du pays, avec le lancement de l’opération «Nalewo Dole» à Diffa, visant à sécuriser les sites pétroliers nationaux. La visite du Chef d’état major des armées nigérianes, en août 2024 à Niamey, conclue par la signature d’un protocole d’accord sur la coopération sécuritaire, révèle que des efforts de décrispation ont été engagés entre les deux pays.

Malgré ces avancées, les différends persistent. Le président nigérien, le général Abdourahamane Tiani, a récemment accusé Abuja de collusion avec la France pour tenter de déstabiliser son régime, des accusations totalement rejetées par les autorités nigérianes. Dans un entretien accordé à la chaîne de télévision en continu en langue arabe «Al Jazeera», le chef d’état-major de la défense nigériane, le général Christopher Musa, a rappelé l’importance des liens historiques et géographiques entre les deux pays, niant «toute intention hostile» de la part de son gouvernement.

La visite, ce mercredi 16 avril, de Yusuf Maitama Tuggar à Niamey pourrait constituer une étape décisive vers la relance d’un dialogue politique et sécuritaire, dans une région où les équilibres sont très fragiles.

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