La Jordanie a franchi un nouveau cap dans sa lutte contre les groupes jugés menaçants pour sa stabilité. Le mercredi 23 avril 2025, le gouvernement jordanien a officiellement interdit toutes les activités des « Frères musulmans » sur son territoire, après l’arrestation de plusieurs membres soupçonnés d’activités terroristes, incluant la fabrication d’armes et des projets de déstabilisation.
Une décision radicale après une série d’arrestations
Le ministre de l’Intérieur, Mazen al-Faraya, a annoncé la fermeture immédiate de tous les bureaux du mouvement islamiste, même ceux opérant en partenariat avec d’autres organisations. Il a précisé que « toute activité » liée à la confrérie serait désormais considérée comme illégale, et que « la promotion de ses idées ou l’adhésion au groupe » exposeraient à des poursuites judiciaires.
Cette décision intervient quelques jours après l’arrestation de 16 personnes – dont plusieurs membres présumés des Frères musulmans – pour des faits qualifiés de terrorisme. Les individus interpellés sont accusés d’avoir stocké des armes et des explosifs dans des quartiers résidentiels, ainsi que d’avoir fabriqué des roquettes destinées à des actions de sabotage sur le sol jordanien.
Le ministère a également évoqué des activités de recrutement et d’entraînement menées à la fois en Jordanie et à l’étranger.
Les Frères musulmans démentent toute implication
Face à ces accusations, les Frères musulmans ont nié toute implication, évoquant des « actions individuelles » en soutien à la cause palestinienne. Dans un communiqué, la confrérie a réaffirmé son attachement à la stabilité et à la sécurité de la Jordanie.
Cependant, les autorités jugent ces déclarations insuffisantes, estimant que le groupe opère « dans l’ombre » et constitue une menace sérieuse pour la sécurité nationale.
Un groupe dissous mais toujours influent
La confrérie islamiste avait déjà été dissoute en 2020, sa licence ayant été jugée invalide. Néanmoins, elle avait continué d’exister de manière informelle, avec une certaine tolérance des autorités. Son bras politique, le Front d’action islamique, est devenu en 2024 la première force parlementaire du pays, avec 31 sièges sur 138.
Le groupe reste très actif dans la société jordanienne, organisant régulièrement des rassemblements en soutien à la Palestine et diffusant des communiqués à travers ses bureaux situés à Amman. Cette montée en puissance politique, combinée à l’instabilité régionale, semble avoir précipité la décision du gouvernement.
Une mesure aux répercussions politiques et sécuritaires
La dissolution du groupe et la confiscation de ses biens marquent une rupture nette avec des décennies de tolérance envers les Frères musulmans en Jordanie, où ils jouissaient historiquement d’un certain soutien populaire.
La question reste ouverte quant à l’avenir du Front d’action islamique et à la position des députés qui lui sont affiliés. Lors d’une session parlementaire récente, plusieurs élus avaient appelé à suspendre ces représentants, accusés de collusion avec une organisation désormais illégale.
Un climat régional tendu
Cette interdiction s’inscrit dans un contexte de méfiance croissante envers les Frères musulmans dans de nombreux pays arabes. Déjà interdits en Égypte, aux Émirats arabes unis et en Arabie saoudite, les Frères musulmans sont de plus en plus perçus comme une force subversive et déstabilisatrice.
En Jordanie, cette mesure pourrait provoquer des remous politiques internes, mais aussi renforcer les tensions dans un pays où les équilibres confessionnels et sociaux sont délicats.