Au lendemain du rapport de la commission d’enquête sénatoriale qui déplore » une dissimulation de l’État » sur l’affaire des eaux minérales naturelles traitées, Aurélien Rousseau a reconnu ce mardi 20 mai » une erreur d’appréciation » rappelant néanmoins qu’il n’y avait » pas de scandale sanitaire ».
Le député Place publique, Aurélien Rousseau, ancien directeur de cabinet d’Élisabeth Borne à Matignon et ancien ministre, a maintenu ce mardi qu’il n’y a » pas de scandale sanitaire » sur l’affaire des eaux minérales naturelles traitée, alors que la commission d’enquête sénatoriale déplore elle « une dissimulation de l’État ».
» Quand on fait le retour en arrière et quand on voit la situation aujourd’hui, il vaut mieux être clair et admettre, oui, une erreur d’appréciation », a déclaré sur France Inter, celui qui fut le premier collaborateur d’Élisabeth Borne entre mai 2022 et juillet 2023, avant de devenir ministre de la Santé jusqu’en décembre de la même année. » C’est grave parce que c’est les consommateurs qui ont payé l’addition, mais ils n’ont pas payé l’addition sur leur santé », a-t-il clarifié.
L’affaire des traitements illicites utilisés pour certaines eaux minérales, révélée par la presse début 2024, a fait l’objet « d’une dissimulation par l’État relevant d’une stratégie délibérée », a accusé lundi 19 mai la commission d’enquête sénatoriale sur les pratiques des industriels de l’eau en bouteille dans son rapport.
» Outre le manque de transparence de Nestlé Waters, il faut souligner celui de l’État, à la fois vis à vis des autorités locales et européennes et vis à vis des français », souligne le rapport, rendu public après six mois de travaux et plus de 70 auditions.
Selon la commission d’enquête » cette dissimulation relève d’une stratégie délibérée, abordée dès la première réunion interministérielle sur les eaux minérales naturelles le 14 octobre 2021″. Plus encore, » la présidence de la République, loin d’être une forteresse inexpugnable à l’égard du lobbying de Nestlé, a suivi de près le dossier » et » savait, au moins depuis 2022, que Nestlé trichait depuis des années », tranche la commission.
Nestlé Waters, dont la direction assure avoir découvert fin 2020 sur ses sites Perrier, Hépar et Contrex l’usage de traitements interdits par l’Union européenne pour de l’eau minérale, avait sollicité à ce sujet mi-2021 le gouvernement et la présidence française. Mais malgré » la fraude aux consommateurs », les autorités ne donnent pas de suites judiciaires, souligne la commission.
Selon le minéralier, filiale du groupe Nestlé déjà éclaboussé par le scandale des pizzas Buitoni, il s’agissait d’ » assurer la sécurité sanitaire » des eaux, alors que plusieurs contaminations bactériologiques des forages avaient été relevées ces dernières années.
Les sénateurs déplorent une » inversion de relation entre l’État français et les industriels en matière d’édiction de la norme ». » Nestlé Waters adopte une attitude transactionnelle, posant explicitement l’autorisation de la microfiltration à 0,2 micron comme condition à l’arrêt de traitements pourtant illégaux ». En clair » c’est au plus haut niveau de l’État que s’est jouée la décision d’autoriser une microfiltration sous le seuil de 0,8 micron », persiste le rapport. En février, Emmanuel Macron interrogé par la presse sur la question avait démenti être au courant du dossier, alors qu’Alexis Kohler, secrétaire général de l’Élysée à l’époque avait lui-même reçu les dirigeants de Nestlé.
Le rapport fait aussi des nouvelles révélations sur la modification fin 2023 par les autorités d’un rapport régional sur la qualité des eaux des sources Perrier à la demande de Nestlé Waters, la liste des bactéries et des herbicides retrouvés dans les eaux a été retiré, et au moins deux cabinets ministériels sont dans la boucle des échanges.
Parmi ses 28 recommandations, la commission préconise un suivi qualitatif des nappes, » un contrôle effectif du niveau de prélèvement réalisé par les industriels minéraliers », un meilleur étiquetage pour les consommateurs. Les sénateurs ont affirmé, en conférence de presse, vouloir poursuivre la démarche transpartisane en rédigeant une proposition de loi reprenant ces recommandations.
Globalement, le marché des eaux minérales et de source françaises concerne 104 sites, 11 000 emplois directs et quelque 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires annuel.