Le Parlement a supprimé mercredi le vote par correspondance des détenus pour certaines élections, des parlementaires estimant que le système actuel peut faire basculer le résultat de communes ou circonscriptions avec lesquelles les prisonniers n’ont pas de lien, la gauche dénonçant un texte « politicien » à moins d’un an des municipales.
Adopté après un dernier vote de l’Assemblée, le texte initié par la sénatrice Horizons Laure Darcos, et soutenu par le gouvernement, revient en partie sur un système instauré en 2019 de vote « par correspondance ». La mesure vise à éviter que le vote des prisonniers n’influence indûment les résultats dans des communes sans lien avec leur lieu de détention. Elle est largement critiquée à gauche.
Adopté par 109 voix contre 60, le texte a coupé l’hémicycle en deux : le bloc central et l’alliance RN-ciottistes ont voté pour, la gauche et les indépendants de Liot contre. » Ce texte isole davantage une population déjà marginalisée » s’est insurgé Nicolas Sansu (PCF). L’écologiste Léa Balage El Mariky a dénoncé des « mobiles purement politiciens à la veille des municipales ». Ugo Bernalicis (LFI) a accusé le texte de risquer de faire des détenus des « sous-citoyens », et de les faire » revenir à 2% de participation ». Certains députés ont proposé sans succès que les bulletins des votes soient envoyés vers les communes où les détenus résidaient ou ont de la famille. Un système » d’un point de vue théorique plus satisfaisant », mais » dans la pratique c’est tout à fait irréalisable », a répondu Jean Moulliere.
Selon les soutiens du texte, le fait que tous les bulletins soient comptabilisés dans la commune chef-lieu peut faire basculer le résultat, lorsqu’il se joue à quelques dizaines ou centaines de voix. « Un impact sous-évalué en 2019 du vote de cette population sur un territoire dans lequel elle n’a jamais vécu », a estimé Anne Bergantz (MoDem). Jean Moulliere (Horizons), rapporteur à l’Assemblée, a noté dans son rapport que « le vote par correspondance est utilisé par plus de 90 % des détenus », plus simple que la procuration et plus accessible qu’une permission de sortie.
Toutefois, le système a conduit à une « distorsion électorale », a souligné le député dans l’hémicycle. Il cite certaines communes (Tulle, Évry-Courcouronnes, Melun,…) où la part des détenus dans le corps électoral serait susceptible d’atteindre ou dépasser les 5 %. Le Parlement a supprimé ce droit aux élections territorialisées (municipales, départementales, régionales et législatives), mais l’a maintenu en cas de circonscription unique (présidentielle, européennes, référendum).