Terrorisme au Sahel : le Mali accuse indirectement l’Algérie de soutenir les groupes armés terroristes – Le Maroc renforce son soutien à l’AES

Face à une recrudescence d’attentats terroristes sur son territoire, le Mali a lancé, mardi 2 juillet 2025, une accusation indirecte mais sans équivoque contre l’Algérie, soupçonnée de financer les groupes extrémistes actifs dans la région sahélienne. Une déclaration faite par le Premier ministre malien Abdoulaye Maïga lors de la 4e Conférence internationale de l’ONU sur le financement du développement, à Séville.

Une accusation à peine voilée contre Alger

À la tribune, le chef du gouvernement malien a dénoncé un terrorisme « imposé » au Sahel, évoquant « l’implication avérée de sponsors étatiques étrangers » dans le financement de ces groupes. Sans nommer explicitement l’Algérie, le message a été clair pour de nombreux observateurs, alors que les tensions entre Bamako et Alger se sont considérablement intensifiées depuis plusieurs mois.

Cette déclaration intervient dans un climat sécuritaire particulièrement tendu : le 1er juillet, des attaques coordonnées ont visé les positions des Forces armées maliennes (FAMa) à Niono, Modolo, Sandaré, Nioro du Sahel, Diboli, Gogui et Kayes, provoquant de lourdes pertes. Dans la presse algérienne, ces attaques sont interprétées comme le signe de l’isolement croissant de la junte malienne dirigée par Assimi Goïta, mise en difficulté sur le plan militaire.

L’AES entend se renforcer face aux menaces

Face à cette situation, le Premier ministre malien a réaffirmé la volonté du Mali de transformer la Confédération des États du Sahel (AES) — qui regroupe depuis septembre 2023 le Mali, le Niger et le Burkina Faso — en une véritable puissance régionale, capable de faire face aux menaces sécuritaires et aux influences étrangères.

Les trois pays ont rompu avec les Accords d’Alger et ont rappelé, en avril dernier, leurs ambassadeurs en poste en Algérie pour consultations, après la violation du territoire malien par l’armée algérienne, un acte perçu à Bamako comme une ingérence inacceptable. L’AES affirme vouloir tourner la page d’une diplomatie dominée par Alger, accusée aujourd’hui de soutenir indirectement les mouvements rebelles dans le nord du Mali.

Depuis le retrait du Mali des accords d’Alger signés en 2015, l’Algérie a accueilli des leaders de l’opposition armée touarègue et soutenu la création du Front de libération de l’Azawad, né en novembre 2024. Une évolution paradoxale, puisque l’Algérie s’était opposée historiquement aux revendications autonomistes des Touaregs amazighs de cette région pendant les précédentes négociations.

Le Maroc renforce son soutien à l’AES

Dans ce contexte régional explosif, le Maroc suit de près les évolutions au Sahel. Le roi Mohammed VI a reçu, le 28 avril dernier, les ministres des Affaires étrangères de l’AES, une rencontre marquant le soutien croissant du royaume à l’alliance sahélienne. Des accords de coopération militaire ont été signés entre Rabat et les trois pays, avec l’intégration d’unités sahéliennes dans les formations des Forces armées royales (FAR).

Cette diplomatie active vise à contrer l’influence algérienne dans la région et à consolider une architecture sécuritaire propre à l’AES, à l’écart des médiations traditionnelles dominées par l’ONU ou l’Union africaine.

Menace d’extension vers la Mauritanie et le Sénégal

Les mouvements extrémistes progressent désormais vers l’ouest, menaçant des zones frontalières jusqu’ici relativement épargnées. Selon un média de Nouakchott, « ces groupes armés progressent vers la frontière malienne, voisine de la Mauritanie et du Sénégal », soulevant de vives inquiétudes à Nouakchott et à Dakar.

Ces deux pays, historiquement en dehors de l’épicentre sahélien des violences, pourraient devenir les prochaines cibles d’organisations armées transnationales, dans un contexte d’affaiblissement de la coopération sécuritaire régionale. Une évolution qui impose, selon plusieurs analystes, un renforcement urgent des capacités de défense et de renseignement dans toute la sous-région.

En accusant indirectement l’Algérie de financer le terrorisme au Sahel, le Mali durcit son discours diplomatique et repositionne l’Alliance des États du Sahel comme acteur central de la stabilité régionale. Mais au-delà des joutes diplomatiques, les attaques récentes et l’extension des menaces vers la Mauritanie et le Sénégal illustrent l’ampleur du défi sécuritaire. La lutte contre le terrorisme au Sahel est désormais aussi une bataille d’influence entre États, avec des alliances qui se redessinent et une coopération régionale en pleine recomposition.

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