Les autorités nigériennes ont annoncé la suspension des activités de plusieurs centaines d’organisations non gouvernementales (ONG) locales et étrangères, estimant qu’elles ne respectaient pas les nouvelles exigences administratives imposées par le régime militaire. L’information a été confirmée le jeudi 20 novembre par des sources officielles citées par l’Agence France-Presse (AFP).
Des manquements administratifs au cœur de la décision
Selon le ministère de l’intérieur, les ONG concernées n’ont pas publié leurs états financiers de l’année 2024 au Journal officiel, une obligation imposée dans le cadre du renforcement du contrôle sur les organisations de développement.
Elles disposent désormais d’un délai de soixante jours pour régulariser leur situation.
Le nombre total d’ONG internationales affectées n’a toutefois pas été communiqué.
Parmi plus de 4 000 ONG actives au Niger, seules une centaine ont été autorisées la semaine dernière à poursuivre leurs activités, ayant satisfait aux nouvelles règles. Les autres ont reçu l’ordre immédiat de « suspendre » leurs opérations.
Une politique de souveraineté renforcée
Depuis son arrivée au pouvoir après le putsch de juillet 2023, le général Abdourahamane Tiani mène une politique axée sur la souveraineté nationale. Le régime accuse régulièrement certaines ONG de manquer de transparence et, dans certains cas, d’entretenir des liens supposés avec les groupes armés.
En janvier, le ministre de l’intérieur, le général Mohamed Toumba, avait annoncé de « importantes mesures » visant à mieux encadrer et surveiller les activités des ONG. Il avait également affirmé que des enquêtes avaient révélé que certaines organisations étaient « en accointances » avec des partenaires étrangers hostiles, allant jusqu’à évoquer un soutien indirect à des groupes « terroristes ».
Un secteur pourtant essentiel dans un pays fragile
Le Niger compte officiellement 4 122 ONG et associations de développement, dont 332 étrangères.
En 2024, ces organisations ont mobilisé plus de 250 milliards de francs CFA, soit environ 380 millions d’euros, selon les chiffres officiels.
Plusieurs ONG avaient déjà été interdites dans le passé, témoignant d’un durcissement progressif de la politique envers les acteurs humanitaires et de développement.
Tensions persistantes avec la France et repositionnement diplomatique
Depuis la prise de pouvoir de la junte, Niamey a procédé à une rupture progressive avec ses anciens partenaires occidentaux :
• expulsion des troupes françaises et américaines engagées contre les groupes djihadistes ;
• expulsion de l’ambassadeur de France puis de celui de l’Union européenne ;
• rapprochement stratégique avec la Russie et la Turquie.
Jeudi, depuis la région de Diffa — zone marquée par l’activité de Boko Haram et de l’État islamique en Afrique de l’Ouest — le général Tiani a réitéré ses accusations contre Paris. Selon lui, la France chercherait à « déstabiliser » le Niger.
Il a qualifié la lutte contre les groupes djihadistes de « guerre totale, voulue par la France et son chef, Emmanuel Macron ».