Deux mois après son arrivée à la présidence, Karol Nawrocki ouvre un bras de fer avec Bruxelles. Le chef de l’État polonais a officiellement refusé d’appliquer le pacte européen sur la migration et l’asile, s’attirant le soutien immédiat du premier ministre hongrois Viktor Orbán. Varsovie rejette catégoriquement le principe de relocalisation obligatoire des migrants prévu par le texte adopté en mai 2024.
Un refus catégorique adressé à Bruxelles
Dans une lettre datée du 7 octobre et rendue publique le 9 octobre par son chef de cabinet Paweł Szefernaker sur X, Karol Nawrocki a réaffirmé son opposition ferme au pacte migratoire.
« Je ne consentirai pas à la mise en œuvre du pacte sur la migration et l’asile en Pologne », a-t-il écrit à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.
Le président, en poste depuis le 6 août 2025, demande à la Commission de prendre en compte la position polonaise dans ses prochains plans migratoires. Cette déclaration marque la continuité de ses promesses de campagne, où il s’était engagé à défendre la souveraineté polonaise face aux politiques migratoires européennes.
Varsovie invoque la sécurité intérieure
Selon Polskie Radio, Marcin Przydacz, chef du Bureau présidentiel pour la politique internationale, a estimé que cette prise de position arrivait à un moment clé, alors que Bruxelles prépare la présentation de ses nouveaux projets migratoires. Il a rappelé que la Pologne « n’accepterait aucune décision qui porterait atteinte à sa sécurité intérieure ».
Même son de cloche du côté du ministre de l’Intérieur, Marcin Kierwiński, qui a souligné que Varsovie demeurait favorable à la coopération européenne, mais rejetait toute obligation de relocalisation des migrants sur son territoire.
Orbán applaudit une « rébellion » contre Bruxelles
En Hongrie, la réaction ne s’est pas fait attendre. Viktor Orbán, farouche opposant au pacte migratoire européen, a salué la décision de Varsovie :
« L’Europe est en train de basculer : le président Nawrocki refuse de mettre en œuvre le pacte migratoire en Pologne. Nous le refusons aussi. Nous sommes désormais deux. Si un troisième nous rejoint, ce sera déjà une rébellion », a-t-il déclaré sur X.
Le dirigeant hongrois voit dans ce refus une nouvelle alliance politique entre Varsovie et Budapest, deux capitales critiques envers la politique migratoire de l’Union européenne.
Coopération sélective, mais rejet du mécanisme central
Karol Nawrocki ne remet pas en cause la nécessité de lutter contre la migration irrégulière, mais plaide pour une action à la source : lutte contre les passeurs, contrôle renforcé des frontières extérieures et soutien aux pays de transit.
La Pologne se dit prête à coopérer sur le partage d’informations, les opérations conjointes ou l’assistance technique, mais refuse toute contrainte imposée par Bruxelles.
Une fracture politique persistante au sein de l’Union
Ce nouvel épisode accentue la fracture entre les pays favorables à une approche solidaire de la politique migratoire et ceux qui défendent leur souveraineté nationale.
Budapest, qui promeut une Europe « chrétienne » et restrictive en matière d’asile, a déjà été condamnée à plusieurs reprises par la Cour de justice de l’Union européenne pour non-respect du droit européen.
En s’alignant sur la Hongrie, la Pologne de Karol Nawrocki s’installe désormais dans une opposition frontale à Bruxelles, au risque d’un nouveau bras de fer politique et juridique avec les institutions européennes.