Madagascar demande le départ de l’ambassadrice de l’Union Européenne

Le dialogue entre les dirigeants de l’exécutif malgache et l’ambassadrice de l’Union Européenne a été interrompu. Ce jeudi 4 avril 2024, les autorités de la Grande Île ont requis le remplacement d’Isabelle Delattre-Burger.

À Madagascar, les autorités ont demandé le départ de l’ambassadrice de l’Union Européenne (UE), selon une information rapportée ce jeudi 4 avril par nos confrères d’ « Africa Intelligence ». Agacé par les différentes déclarations successives d’Isabelle Delattre, le président malgache, Andry Rajoelina, a demandé, par le biais de sa ministre des Affaires étrangères, à Bruxelles de remplacer la diplomate européenne. Il s’agit d’une première dans l’histoire des relations entre la Grande Île et l’UE.

Ce qui a suscité la colère, c’est sans aucun doute la dernière conférence de presse du 26 février dernier, lors de laquelle l’ambassadrice de l’Union Européenne Isabelle Delattre a souligné que la loi autorisant la castration chirurgicale, récemment validée par la Haute Cour constitutionnelle du pays, était en contradiction avec les traités internationaux. Ce même jour, elle a exprimé sa frustration en tant que partenaire qui a contribué à améliorer le réseau routier de l’île, constatant que le fonds d’entretien routier ne disposait pas des moyens nécessaires pour maintenir ce réseau en bon état. Suite à cette prise de position, la nouvelle ministre des Affaires étrangères malgache, Rafaravavitafika Rasata, a envoyé une lettre au Haut représentant de l’Union Européenne pour les affaires étrangères.

Dans cette missive, la ministre aurait exprimé son mécontentement concernant la conférence de presse au cours de laquelle l’ambassadrice Isabelle Delattre avait émis des réserves sur l’efficacité de la castration chirurgicale comme solution pour lutter contre les viols. La porte-parole de la Commission européenne en charge des Affaires étrangères, Nabila Massrali, a confirmé à RFI que la ministre avait également demandé à l’Union Européenne de remplacer son ambassadrice dans cette lettre.

Une demande de départ, souligne la porte-parole, qui n’avait pas du tout été discutée lors de la convocation d’Isabelle Delattre par la ministre, quelques jours plus tôt. La demande est en cours d’examen, confirme Bruxelles.

Ces crispations avec le pouvoir en place ne sont pas nouvelles. Depuis son arrivée sur la Grande Île en septembre 2022, la représentante européenne s’est souvent exprimée avec franchise sur des sujets qui ont eu le don d’irriter au plus haut sommet de l’État. De ces fameuses « recommandations de la mission d’observation électorale de 2018 jamais mises en pratique », à « l’évasion fiscale qui sévit sur le sol malgache », la diplomate a toujours répondu aux questions des médias, quitte à faire frémir l’exécutif.

Le départ de l’ambassadrice quasiment acté

À Bruxelles, l’UE a pris acte qu’il y avait rupture de confiance rendant le fonctionnement de l’ambassade malgache « impossible ».

La délégation de l’Union Européenne a confirmé à RFI, dans la matinée, que le départ de l’ambassadrice était quasiment acté. Ce sont désormais les modalités qui restent à préciser. Elle devrait donc quitter son poste durant l’hiver austral (en juillet/août), mais la procédure de recrutement pour lui trouver un successeur devrait prendre plus de temps.

« Notre volonté est de garder de bonnes relations avec Madagascar et c’est pour cela qu’on se plie à la demande », confirme une source diplomatique de la délégation. « Mais son départ dans ces conditions aura forcément des conséquences, politiques et financières », prévient-elle.

Côté chancelleries étrangères, on prend acte. « Est-ce à dire qu’on attend simplement des ambassades qu’elles signent des chèques et ferment leur bouche ? » ose gronder un diplomate, à juste titre.

Joseph Kouamé

Laisser un commentaire