La ville de Goma, principale métropole de l’Est de la République démocratique du Congo (RDC), vit des heures sombres. Depuis ce lundi 27 janvier 2025, des tirs d’artillerie lourde résonnent dans la ville, marquant une escalade dramatique du conflit opposant l’armée congolaise au groupe rebelle du M23, soutenu par des troupes rwandaises. Voici un point complet sur la situation.
L’entrée des rebelles et le chaos dans Goma
Dimanche soir, les combattants du M23, accompagnés de plus de 3 500 soldats rwandais, ont pénétré dans Goma après plusieurs jours de siège. Lundi matin, les combats se sont intensifiés, plongeant la ville dans un chaos total. Des explosions et des tirs ont été entendus dans plusieurs quartiers, notamment près de l’aéroport. La prison centrale a été incendiée, permettant à près de 3 000 détenus de s’évader. Dans les rues, des cadavres jonchent le sol, et les hôpitaux sont submergés par l’afflux de victimes.
Des milliers d’habitants fuient la ville, craignant une intensification des combats. Goma, située au bord du lac Kivu et comptant près d’un million d’habitants, est également un refuge pour de nombreux déplacés internes.
Contexte du conflit
Le M23, groupe armé principalement tutsi, a repris les armes en 2022, dix ans après avoir brièvement occupé Goma. Le mouvement, soutenu par le Rwanda selon plusieurs rapports internationaux, accuse le gouvernement congolais de ne pas respecter les accords de paix signés en 2013. Kinshasa, de son côté, accuse Kigali de vouloir s’accaparer les richesses naturelles de l’est congolais, riches en minerais stratégiques comme le coltan, utilisé dans l’industrie technologique.
Le conflit s’inscrit dans une région déjà instable, où opèrent plusieurs dizaines de groupes armés, souvent motivés par le contrôle des ressources naturelles. Depuis le début de l’année, les violences ont déplacé près de 400 000 personnes.
Une situation diplomatique tendue
Kinshasa accuse ouvertement Kigali de lui avoir “déclaré la guerre”, tandis que le Rwanda justifie ses actions par des “menaces à sa sécurité” venant de groupes hutus armés présents en RDC. Les relations entre les deux pays se sont détériorées, avec des rappels de diplomates et la fermeture de la frontière entre Goma et le Rwanda.
La communauté internationale, bien que divisée, a multiplié les appels au calme. Le Conseil de sécurité de l’ONU a condamné le “mépris de la souveraineté congolaise” et exigé le retrait des forces extérieures. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a directement exhorté le Rwanda à cesser son soutien au M23. Les États-Unis, l’Union européenne et l’Union africaine ont également appelé à une désescalade et menacent d’imposer des sanctions.
Le président kényan, William Ruto, a annoncé un sommet d’urgence de la Communauté des États d’Afrique de l’Est pour tenter de résoudre la crise diplomatique. Toutefois, sur le terrain, les affrontements continuent de s’intensifier.
Les conséquences humanitaires
La situation humanitaire dans la région est critique. Selon l’ONU, plus de 7 millions de personnes sont déplacées en République Démocratique du Congo, dont un million rien qu’au Nord-Kivu. L’arrivée des rebelles à Goma a encore aggravé cette crise. Des rapports font état de viols, de pillages et d’attaques contre des infrastructures humanitaires. Les organisations humanitaires peinent à répondre aux besoins croissants des populations déplacées.
Un conflit aux implications régionales
La prise de Goma par le M23 pourrait déclencher un conflit régional à grande échelle, rappelant les guerres de 1996-1997 et 1998-2003, qui avaient causé des millions de morts, principalement à cause de la famine et des maladies. Les experts craignent que la situation actuelle ne dégénère en une nouvelle guerre entre la RDC et ses voisins.
Perspectives et appels au cessez-le-feu
Malgré les appels au dialogue, le conflit semble s’aggraver. Le M23 a récemment affirmé vouloir renverser le gouvernement du président Félix Tshisekedi, situé à plus de 1 500 km à l’ouest de Goma. Les forces de l’ONU et de la région, y compris la Monusco, peinent à contenir les avancées rebelles.
Des efforts diplomatiques sont en cours, notamment de la part de l’Afrique du Sud et du Kenya, mais sur le terrain, les combats et les déplacements massifs de populations continuent. La situation à Goma reste critique, avec une ville au bord de l’effondrement.
Joseph Kouamé