Guerre en RDC: l’AFC/M23 demande à toutes les armées étrangères de quitter Goma, le président promet de former un gouvernement d’union nationale, l’accumulation d’acteurs armés par Kinshasa, une menace pour la stabilité de l’Afrique etc… (Notre point du 25 février)

Dans notre point de ce 25 février 2025 sur la situation en RDC : L’AFC/M23 a demandé à toutes les armées étrangères présentes dans la zone de Goma de partir ; Des bases de la Monusco surpeuplées ; Le président congolais annonce un gouvernement d’union nationale ; Le retour progressif de Joseph Kabila ; Une armée sud-africaine impuissante ; Des facilitateurs nommés par les chefs d’État de la SADC et de l’EAC ; L’accumulation d’acteurs armés par Kinshasa : une menace pour la stabilité de l’Afrique

L’AFC/M23 a demandé à toutes les armées étrangères présentes dans la zone de Goma de partir

Environ 200 soldats envoyés par la Communauté de développement d’Afrique australe (SADC) ont quitté la ville de Goma, dans l’est de la République Démocratique du Congo, ce lundi 24 février. Le reste des contingents sud-africains, malawites et tanzaniens sont toujours dans leur base à Goma, une ville désormais contrôlée par le groupe AFC/M23, soutenu par le Rwanda. Ces troupes de la SADC avaient été déployées depuis décembre 2023 en soutien à l’armée congolaise pour empêcher la progression du M23.

Des blessés, des malades et quelques personnels féminins ont quitté leurs bases ainsi que l’hôpital de Goma, direction le poste frontière de la Grande Barrière, puis l’aéroport de Kigali, capitale du Rwanda, pour regagner leur pays respectif.

En tout, « 194 soldats » de la SAMIDRC, mission envoyée par la Communauté de développement d’Afrique australe, selon l’AFC/M23. « Un peu moins de 200 », confirme une source militaire congolaise.

L’AFC/M23 a exigé que toutes les armées étrangères présentes dans la zone partent. Pour l’instant, le reste des contingents sud-africains, malawites et tanzaniens, dont le nombre exact n’est pas précisé, sont toujours bloqués dans leurs bases à l’aéroport et à Mubambiro, à la sortie de Goma, avec leurs armes. « Nous sommes en train de négocier leur départ », a affirmé l’AFC/M23.

L’Afrique du Sud aurait, quant à elle, selon plusieurs sources envoyées début février, des hommes et du matériel militaire à Lubumbashi, l’une des principales villes de l’est de la RDC, à plus de 1500 km au sud de la zone sous contrôle du M23, ce que l’armée sud-africaine ne confirme pas. En janvier, le pays avait perdu quatorze soldats dans la bataille de Goma.

Des bases de la Monusco surpeuplées

De nombreux soldats congolais sont aussi bloqués dans des bases de Goma, notamment celles de l’ONU où ils ont trouvé refuge fin janvier. Ils sont plus de 1400, selon l’ONU, en majorité des soldats congolais, quelques miliciens pro-gouvernementaux, les Wazalendo, ainsi que quelques civils, dont des femmes et des enfants. « La situation actuelle est insoutenable en raison du nombre important d’individus sous notre protection », indique une source onusienne. La Monusco réclame une solution d’urgence pour extraire ces personnes vers un lieu sûr. De son côté, l’AFC/M23 entend intégrer ces militaires à leur mouvement, sauf ceux qui souhaiteraient retourner à la vie civile.

Le président congolais annonce un gouvernement d’union nationale

Le président congolais, Félix Tshisekedi, a annoncé qu’il allait former un gouvernement d’union nationale alors que la violence se propage dans l’est du pays et que la pression monte sur sa gestion de la crise. Dans l’une de ses premières déclarations depuis que les rebelles soutenus par le Rwanda ont pris le contrôle de grandes villes de l’est de la République Démocratique du Congo, le président Tshisekedi a indiqué lors d’une réunion de la coalition au pouvoir, l’Union sacrée de la nation, samedi, de ne pas se laisser distraire par des querelles internes. « J’ai perdu la bataille et non la guerre. Je dois tendre la main à tout le monde, y compris à l’opposition. Il y aura un gouvernement d’union nationale », a soutenu M. Tshisekedi, qui n’a toutefois pas donné plus de détails sur ce que cela impliquerait ou quand cela se produirait.

Les rebelles du M23, le plus important des plus de 100 groupes armés qui se disputent le contrôle et l’influence dans l’est du pays, ont balayé la région, s’emparant de villes clés et tuant environ 3000 personnes. Lors d’une offensive éclair de trois semaines, le M23 a pris le contrôle de Goma, la principale ville de l’est, et s’est emparé de Bukavu, la deuxième plus grande ville.

Les rebelles sont soutenus par environ 4000 soldats du Rwanda voisin, selon les experts de l’ONU, et ont parfois juré de marcher jusqu’à Kinshasa, à plus de 1600 kilomètres. Le Rwanda a accusé la République Démocratique du Congo d’avoir enrôlé des combattants hutus responsables du génocide de 1994 au Rwanda contre la minorité tutsie et les Hutus modérés. Le M23 affirme qu’il se bat pour protéger les Tutsis et les Congolais d’origine rwandaise contre la discrimination et qu’il veut transformer la RDC d’un État défaillant en un État moderne. Cependant, selon les experts, il s’agirait de prétextes pour justifier l’implication du Rwanda.

Le ministre congolais des Communications, Patrick Muyaya, a souligné dimanche dans un message sur X que le Rwanda et le M23 avaient tué plus d’une dizaine de personnes à Goma. Le M23 n’a pas immédiatement répondu à une demande de réaction.

Le retour progressif de Joseph Kabila

Joseph Kabila, ancien président de la République Démocratique du Congo, qui avait prévu de consacrer son temps à sa thèse sur les relations entre la Chine et la RDC, semble mettre ce projet entre parenthèses face à la situation d’urgence dans son pays. Après des années de relative discrétion, il refait surface politiquement. Dans une tribune publiée dans un média sud-africain, il critique la gestion de Félix Tshisekedi et met en garde contre l’illusion d’une solution militaire face à la crise dans l’est du pays.

Depuis plusieurs mois, Joseph Kabila réactive ses réseaux. Il a récemment réuni des figures-clés de son régime à Nairobi, au Kenya. Au terme de cette rencontre, Aubin Minaku a été désigné vice-président du PPRD, avec pour mission d’assurer l’intérim en l’absence de Kabila. Ce dernier critique Félix Tshisekedi de « tribaliser le pouvoir » et de plonger le pays dans une crise économique et institutionnelle, tout en cherchant à modifier la Constitution pour s’assurer un contrôle absolu. Il souligne que sous son régime, le M23 avait été battu, contrairement à la situation actuelle.

Une armée sud-africaine impuissante

Le cercle de Joseph Kabila met également en garde contre l’option militaire, notamment avec le déploiement des troupes de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC). Ils doutent de la capacité de l’armée sud-africaine à faire face aux rebelles du M23 soutenus par Kigali, particulièrement après l’humiliation subie à Goma en janvier 2025, lorsque les soldats sud-africains ont été contraints de lever le drapeau blanc après une attaque.

Un message à la SADC et à la communauté internationale

Kabila adresse un message à la SADC et à la communauté internationale, accusant l’organisation de se laisser instrumentaliser par Tshisekedi pour justifier une intervention militaire vouée à l’échec. L’implosion de la RDC semble inévitable si la crise n’est pas résolue.

Un retour sur les réseaux sociaux

Joseph Kabila prépare également son retour sur les plateformes numériques, notamment sur Twitter, pour communiquer directement avec l’opinion publique. Il veut peser dans le débat politique, mobiliser ses soutiens et répondre aux critiques en temps réel.

Des facilitateurs nommés par les chefs d’État de la SADC et de l’EAC

Les chefs d’État de la SADC et de l’EAC ont nommé trois nouveaux facilitateurs dans la crise de l’est de la RDC, dont l’ancien président nigérian Olusegun Obasanjo et l’ancien Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, aux côtés de l’ex-président kényan Uhuru Kenyatta. Leur mission sera de coordonner les efforts diplomatiques et sécuritaires en vue d’un cessez-le-feu durable.

L’accumulation d’acteurs armés par Kinshasa : une menace pour la stabilité de l’Afrique

Face à l’échec des forces locales, Kinshasa a eu recours aux mercenaires, notamment de la société Congo Protection, qui a déployé 300 mercenaires roumains. Cependant, ces mercenaires ont été neutralisés par le M23. Des rapports font également état d’autres mercenaires étrangers, avec des suspicions d’implication de la Russie via des groupes affiliés à Wagner.

Malgré la présence de la MONUSCO et de forces étrangères, la RDC est dans une impasse sécuritaire. L’accumulation d’acteurs armés complique la situation, risquant de déstabiliser non seulement le pays, mais aussi la région entière.

Joseph Kouamé

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