La République démocratique du Congo (RDC) traverse une période de turbulences marquée par des décisions économiques majeures, des avancées judiciaires et des tensions diplomatiques. Voici un point sur la situation en date du 26 février.
Suspension des exportations de cobalt : un pari économique risqué
Face à la chute des prix du cobalt, Kinshasa a pris une décision radicale : suspendre ses exportations de ce métal stratégique pour quatre mois. Cette mesure vise à enrayer la baisse des cours, alors que la RDC représente près de 75 % de la production mondiale.
En début d’année, la tonne de cobalt s’échangeait à un peu plus de 20 000 dollars, loin des 80 000 dollars atteints en 2022. Une baisse qui représente un manque à gagner considérable, le cobalt constituant entre 15 et 20 % des exportations congolaises.
Eric Kalala, directeur de l’Entreprise Générale du Cobalt, espère que cette suspension permettra une revalorisation des prix, bénéficiant notamment aux creuseurs artisanaux. Toutefois, l’impact réel de cette décision reste incertain, notamment face à la montée en puissance du géant chinois CMOC, qui a inauguré une nouvelle mine en RDC en 2023, accentuant ainsi la surproduction.
Le procureur de la CPI en RDC : un avertissement aux criminels du Nord-Kivu
Karim Khan, procureur de la Cour pénale internationale (CPI), est arrivé à Kinshasa lundi 24 février au soir pour discuter avec les autorités congolaises des violences dans l’est du pays.
Sa visite vise à renforcer la coopération judiciaire et à avertir les auteurs des crimes perpétrés dans le Nord-Kivu, où la milice du M23, soutenue par le Rwanda, continue de progresser. Il rencontrera notamment le président Félix Tshisekedi et la représentante de l’ONU, Bintou Keita.
L’enquête sur les crimes commis depuis janvier 2022, ouverte à la demande de Kinshasa, pourrait aboutir à la création d’un tribunal spécial pour juger les responsables des atrocités dans cette région en proie à la guerre.
Sanctions états-uniennes contre James Kabarebe : le Rwanda dénonce une décision “injustifiée”
Le Rwanda a vivement réagi aux sanctions imposées par les États-Unis contre le général James Kabarebe, bras droit du président Paul Kagame et ministre d’État chargé de l’intégration régionale.
Washington accuse Kabarebe de gérer une grande partie des revenus issus des minerais congolais, alimentant ainsi le conflit en RDC. Kigali rejette ces accusations et estime que ces sanctions ne contribuent pas à la paix et à la stabilité dans la région des Grands Lacs.
Du côté congolais, cette décision est perçue comme un premier pas vers une série de sanctions plus sévères contre le Rwanda, jugé responsable de l’instabilité dans l’Est du pays.
Trois anciens dirigeants africains nommés facilitateurs de paix
Dans une tentative de stabilisation de la situation en RDC, trois ex-dirigeants africains ont été désignés pour mener les efforts de paix :
• Uhuru Kenyatta, ancien président du Kenya
• Olusegun Obasanjo, ex-président du Nigeria
• Hailemariam Desalegn, ex-Premier ministre éthiopien
Leur mission sera de superviser la mise en œuvre du cessez-le-feu et de coordonner l’aide humanitaire dans l’Est de la RDC, où le M23 a intensifié son emprise territoriale depuis décembre, prenant le contrôle de Goma et Bukavu.
Ces nominations s’inscrivent dans la fusion des processus de médiation de Luanda et Nairobi, validée lors du sommet des chefs d’État de la Communauté d’Afrique de l’Est (EAC) et de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) le 8 février à Dar es Salaam.
Un tournant décisif pour la RDC ?
Alors que la RDC cherche à protéger son économie, à juger les crimes de guerre et à obtenir un soutien international plus ferme contre l’ingérence rwandaise, les prochains mois s’annoncent cruciaux.
L’impact de la suspension des exportations de cobalt, l’évolution des enquêtes de la CPI et l’efficacité des nouveaux facilitateurs de paix détermineront si ces initiatives permettront à la RDC de reprendre le contrôle de son avenir.
Joseph Kouamé