Ancienne ministre à la Condition féminine sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing, Monique Pelletier s’est éteinte le 19 octobre 2025 à l’âge de 99 ans. Figure marquante du combat pour les droits des femmes en France, elle laisse derrière elle un héritage juridique et politique qui continue d’influencer les débats contemporains sur l’égalité et la dignité humaine.
Lire la suite: Décès de Monique Pelletier : une pionnière des droits des femmes s’éteint à 99 ans
Une femme de loi au service de la justice sociale
Née Monique Bédier à Trouville-sur-Mer en 1926, avocate de formation, elle s’impose dans les années 1970 comme une personnalité engagée, à la croisée du droit et de la politique. Sa carrière débute au barreau de Paris avant de la conduire dans les sphères du pouvoir. Nommée en 1978 ministre déléguée à la Condition féminine, elle devient l’une des rares femmes à occuper un poste ministériel sous la Ve République à cette époque.
Monique Pelletier s’emploie alors à transformer la condition féminine en cause d’État. Elle milite pour une meilleure reconnaissance du viol comme crime, défend la pérennisation de la loi sur l’interruption volontaire de grossesse et œuvre pour la visibilité des femmes dans la vie publique.
Une ministre de conviction, pas de posture
Dans un monde politique encore largement masculin, Monique Pelletier refuse les compromis de façade. Elle s’attache à inscrire ses combats dans la loi plutôt que dans le slogan. En 1980, elle participe à la réforme qui reconnaît le viol comme un crime relevant de la cour d’assises une avancée majeure pour la justice française. Elle s’oppose à la banalisation des discriminations et plaide, tout au long de sa carrière, pour une égalité de traitement fondée sur la dignité et non sur la revendication partisane.
Elle rappelait souvent que la conquête des droits n’était pas une victoire acquise, mais un effort à poursuivre : « Les lois sont des outils. Elles ne valent que si les consciences suivent. » Cette lucidité, héritée de son expérience d’avocate, marquera durablement les générations de militantes venues après elle.
Du gouvernement au Conseil constitutionnel
Après son passage au gouvernement, Monique Pelletier poursuit son engagement au sein du Conseil constitutionnel de 2000 à 2004, où elle défend une lecture équilibrée des droits fondamentaux. Fidèle à ses principes, elle s’élève contre toute dérive idéologique dans l’interprétation du droit, estimant que « la justice n’a pas de sexe, mais elle a une exigence ».
Elle s’investit également dans la défense des personnes âgées et des personnes handicapées, considérant que la société devait son humanité à la manière dont elle traitait ses plus fragiles membres.
Un héritage qui dépasse son époque
La disparition de Monique Pelletier réveille un souvenir collectif : celui des années où la question féminine devenait un enjeu républicain. En plaçant la dignité des femmes au cœur du droit, elle a contribué à redéfinir les rapports sociaux dans une France en mutation.
Son parcours incarne cette génération de femmes d’État qui ont fait de l’engagement une discipline de rigueur et non une posture médiatique. À l’heure où le débat sur les droits des femmes continue de se heurter à des résistances culturelles ou idéologiques, son œuvre rappelle que la conquête de la liberté passe par la loi, mais aussi par la conscience morale d’une nation.
Celine Dou