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Afghanistan : du féminicide social au féminicide physique — quand un séisme révèle l’inhumanité d’un régime

Le tremblement de terre qui a frappé l’Hindou-Kouch fin août n’a pas seulement bouleversé la terre. Il a révélé, dans toute sa crudité, une société où les femmes sont niées jusqu’à la mort. Sous prétexte de lois religieuses interdisant aux hommes de toucher une femme, des blessées ont été abandonnées sous les décombres. Le séisme a mis en lumière une réalité terrifiante : en Afghanistan, l’invisibilisation sociale s’est muée en élimination physique.

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Quand la terre tremble, les lois tuent

Dans la nuit du 31 août 2025, un séisme d’une magnitude importante a secoué la chaîne montagneuse de l’Hindou-Kouch, dans le nord-est de l’Afghanistan. Les bilans, encore fluctuants, font état de plus de 2 200 morts et 3 600 blessés, selon les autorités locales et les premières estimations relayées par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Mais au-delà des chiffres, une autre tragédie, plus insidieuse, a émergé des décombres. Dans plusieurs villages, des témoins ont rapporté que les femmes blessées n’avaient pas été secourues par les équipes masculines. Ces dernières, obéissant à des décrets religieux interdisant tout contact physique entre hommes et femmes non apparentés, se sont abstenues de leur venir en aide. Certaines victimes ont été laissées à mourir sous les gravats, d’autres tirées par leurs vêtements pour éviter tout contact avec leur peau.

Un volontaire afghan, interrogé par le New York Times, a résumé la scène d’une phrase glaçante : « On aurait dit que les femmes étaient invisibles. » Invisibles, donc intouchables. Intouchables, donc sacrifiables.

Face à ces révélations, l’OMS a lancé un appel urgent aux autorités talibanes, demandant la levée immédiate des restrictions imposées aux travailleuses humanitaires. En vain pour l’instant. Car depuis quatre ans, le pouvoir taliban a méthodiquement détruit les conditions mêmes d’existence des femmes dans l’espace public.

De la burqa au silence : le féminicide social

Depuis la reprise du pouvoir par les talibans en 2021, l’effacement des femmes s’est imposé comme l’un des piliers du régime. D’abord la burqa, symbole de leur disparition visuelle. Puis la fermeture des écoles, des universités, et des emplois féminins. Enfin, l’interdiction récente faite à certaines de parler publiquement, y compris entre elles, scellant leur effacement sonore.

C’est un féminicide social : la mort de la femme en tant que sujet social, politique et humain.
Ne plus voir, ne plus entendre, ne plus instruire, ne plus soigner, ne plus agir. L’interdiction de la parole, entrée en vigueur dans plusieurs provinces en 2025, achève un cycle d’aliénation totale.

Ce processus d’effacement systématique ne se limite pas à la symbolique. Il produit des conséquences mortelles. Car lorsqu’un séisme survient dans un pays où les femmes ne peuvent être secourues ni par des hommes ni par des équipes féminines faute de droit de se déplacer, l’interdiction de sauver devient une arme létale.

Quand la morale dévoyée remplace l’humanité

Ce qui s’est joué dans les villages détruits du nord-est afghan dépasse la simple rigidité doctrinale. Il s’agit d’un basculement anthropologique : un système où le respect des règles religieuses prévaut sur le devoir de sauver la vie.
L’idéologie talibane repose sur une obsession sexuelle : celle de considérer toute interaction entre hommes et femmes comme une menace de tentation. Cette vision, qui pervertit le sens même du sacré, transforme les femmes en sources permanentes de danger moral, à tenir à distance jusque dans la mort.

Ce qui était d’abord un contrôle social s’est transformé en condamnation physique. Ce n’est plus seulement la liberté qui est supprimée, c’est la vie elle-même qui devient conditionnelle subordonnée à l’honneur masculin et à la pureté supposée du regard.

L’Afghanistan vient d’inventer l’impensable : un monde où mourir sous les décombres est jugé plus conforme à la loi divine que d’être sauvée par un homme.

Les répliques d’un désastre annoncé

Les talibans n’ont pas seulement imposé leur loi : ils ont méthodiquement détruit l’infrastructure humanitaire susceptible de venir en aide à leurs concitoyennes. Depuis 2022, les ONG internationales ont vu leurs équipes féminines suspendues ou contraintes au retrait, rendant impossible tout secours équitable.

L’OMS estime que moins de 10 % du personnel médical en Afghanistan est désormais féminin, et que même ces soignantes doivent se déplacer accompagnées d’un tuteur. La conséquence est directe : les soins aux femmes deviennent sporadiques, retardés, voire inexistants.

Le séisme du 31 août n’a donc pas seulement révélé une faiblesse organisationnelle : il a mis à nu un système de mort différenciée, où la nature frappe aveuglément, mais où la société choisit ses victimes.

L’indignation sélective : le grand silence occidental

Cette tragédie aurait dû déclencher un tollé planétaire. Elle n’a suscité que des murmures.
Les chancelleries ont condamné du bout des lèvres, les grandes capitales occidentales se sont contentées d’exprimer leur « préoccupation ». Mais plus surprenant encore et plus inquiétant est le silence assourdissant de certaines mouvances féministes occidentales, d’ordinaire si promptes à dénoncer les violences domestiques ou les inégalités salariales.

Lorsqu’un homme blanc tue sa compagne, la société occidentale s’enflammeà juste titre. Mais lorsque des centaines de femmes sont laissées mourir, non par un individu, mais par un régime politique qui a fait de leur mort une conséquence naturelle de ses lois, la colère s’éteint.

Il ne s’agit pas ici de hiérarchiser la souffrance, mais d’interroger la cohérence morale. Un féminisme crédible ne peut s’émouvoir du drame individuel tout en se taisant face au féminicide d’État.
Le silence n’est pas neutralité : c’est une complicité par omission.

L’exigence du réel

Les faits, rien que les faits. Le rôle du journalisme n’est pas d’aménager le confort des consciences, mais d’exposer la réalité telle qu’elle est.
En Afghanistan, le séisme a fissuré le sol, mais aussi le vernis des discours diplomatiques. Ceux qui, en 2021, espéraient des « talibans inclusifs » ont désormais la mesure du désastre.
Il n’y a pas de variante bienveillante du fanatisme. Il n’y a pas de justice possible là où la moitié de l’humanité est condamnée au silence, puis à la mort.

La communauté internationale doit cesser de tolérer, au nom du relativisme culturel, la barbarie érigée en norme religieuse.
Et les voix féministes doivent retrouver leur cohérence : l’universalité des droits des femmes commence par le courage de nommer la vérité, même quand elle dérange les alliances idéologiques.

La Boussole – infos

Dire les faits. Rétablir la réalité. Défendre la raison.

Celine Dou, pour la boussole-infos

Madagascar : les brigades féminines de proximité, un signe avant-coureur dans un pays en crise

Madagascar traverse depuis quelques jours une crise profonde, marquée par des manifestations massives contre le gouvernement et des pénuries de services essentiels. Dans ce contexte chaotique, l’existence des brigades féminines de proximité, créées dès 2017, apparaît comme un indicateur clé de l’état de la société malgache et de ses fragilités.

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Ces unités, composées exclusivement de policières, ont pour mission d’accompagner, protéger et conseiller les femmes et enfants victimes de violences. Avec 240 membres réparties sur l’ensemble du territoire, elles représentent l’un des rares dispositifs institutionnels dédiés à la protection des populations vulnérables. Leur présence sur le terrain permet de prévenir et de documenter des violences souvent invisibles, et d’offrir un accès direct à la justice et aux services sociaux.

Leur rôle ne se limite pas à l’assistance : ces brigades ont également un effet de prévention et de sensibilisation. Dans un pays où l’État peine à maintenir l’ordre et où les institutions locales ont souvent des moyens limités, elles symbolisent la capacité de la société civile et de l’État à anticiper des tensions sociales qui, aujourd’hui, se manifestent à grande échelle.

La récente crise à Madagascar, déclenchée par des contestations populaires autour de la gouvernance et de la sécurité, révèle combien ces structures étaient
déjà un signe avant-coureur des besoins de protection et de médiation dans la société. Les brigades féminines de proximité ont, en effet, permis d’identifier et de traiter de manière préventive certaines formes de violences qui auraient pu alimenter davantage le chaos actuel.

Cependant, leur efficacité reste limitée par des moyens insuffisants et des pressions politiques et sociales croissantes. Malgré cela, elles demeurent un exemple concret de réponse institutionnelle face à des problématiques anciennes mais souvent négligées, rappelant que la stabilité sociale repose autant sur des mesures préventives que sur des interventions ponctuelles.

À travers leur action, ces brigades démontrent que le respect des droits humains et la protection des plus vulnérables peuvent constituer des repères fiables même dans un environnement instable, et que la capacité d’un État à anticiper les crises passe aussi par l’attention portée à ces acteurs souvent méconnus mais essentiels.

Celine Dou

France – Le Sénat saisi d’une proposition de loi pour libérer les enfants de parents défaillants de l’obligation alimentaire

Face à la montée des témoignages d’adultes brisés par des enfances violentes ou négligées, le Sénat français examine une proposition de loi qui pourrait bouleverser un des piliers du droit civil : l’obligation alimentaire envers ses parents.

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« Hors de question de payer pour quelqu’un qui a brisé mon enfance ». Ces mots, durs mais récurrents, traduisent le ras-le-bol de nombreuses personnes en France confrontées à une exigence juridique qui leur semble moralement insoutenable : devoir financièrement assister un parent qui les a abandonnés, maltraités ou rejetés.

Portée par le sénateur Xavier Iacovelli, la proposition de loi n°349, déposée le 17 février 2025, entend permettre à tout adulte âgé de 18 à 30 ans de renoncer par acte notarié à cette obligation alimentaire, lorsque le parent concerné s’est montré défaillant dans ses devoirs. L’acte, une fois enregistré, pourrait être contesté dans les six mois par le parent, mais la charge de la preuve pèserait alors sur ce dernier, tenu de démontrer qu’il a assumé avec bienveillance ses responsabilités éducatives.

En France, l’obligation alimentaire découle du principe de solidarité familiale inscrit dans le Code civil. Chaque enfant majeur est censé participer, selon ses moyens, à l’entretien de ses parents dans le besoin. Ce principe, issu d’une vision patriarcale et catholique de la famille, a longtemps été considéré comme intangible. Mais l’évolution des mœurs et la reconnaissance juridique des violences intra-familiales viennent bousculer cet héritage.

Depuis la loi dite « Bien vieillir » de 2024, certains cas d’exonération sont déjà prévus : enfants retirés de leur famille par décision judiciaire, condamnation d’un parent pour violences graves ou manquements caractérisés. Toutefois, la proposition Iacovelli va plus loin, en conférant aux victimes la possibilité d’agir directement, sans passer par une longue procédure judiciaire.

Les médias français ont relayé de nombreux récits d’adultes sommés par la justice d’aider financièrement un parent qui les avait pourtant abandonnés. Ces affaires ont provoqué un débat moral : la solidarité familiale doit-elle être automatique ?
Pour les associations de protection de l’enfance, cette réforme constitue une forme de reconnaissance. « Pendant des décennies, on a parlé de devoir filial sans jamais évoquer la dette morale des parents », estime une juriste interrogée par France 3.
À l’inverse, certains juristes craignent un glissement vers une société où le lien filial deviendrait contractuel, au risque de fragiliser l’esprit même de la solidarité intergénérationnelle.

Si le débat se déroule en France, il interroge des valeurs partagées bien au-delà de ses frontières. En Afrique, notamment, la solidarité familiale reste une valeur cardinale, mais les transformations sociales et urbaines bousculent également ce socle. De plus en plus de jeunes adultes, confrontés à des histoires d’abandon ou de maltraitance, s’interrogent sur les limites du devoir filial.

Cette proposition de loi, si elle venait à être adoptée, pourrait donc inspirer d’autres législations dans les pays confrontés aux mêmes tensions entre devoir de mémoire et besoin de justice individuelle.

Outre la possibilité de renoncer à l’obligation alimentaire, le texte prévoit la perte automatique des droits successoraux à l’égard du parent concerné. Un geste lourd de conséquences, mais aussi de sens : rompre le lien matériel pour mieux se libérer du lien de souffrance.
Le Sénat doit examiner la proposition dans les prochaines semaines. Si elle est adoptée, la France deviendra l’un des rares pays à permettre une émancipation légale de l’obligation parentale, une mesure qui résonne puissamment avec les luttes contemporaines pour la reconnaissance des traumatismes d’enfance.

Cette initiative parlementaire s’inscrit dans une évolution plus large du droit occidental, où la famille n’est plus seulement un espace sacré, mais aussi un lieu de responsabilité partagée. Entre solidarité et justice, la société française cherche à redéfinir les contours du lien filial à l’aune de la dignité individuelle.

Celine Dou

Maroc : la Génération Z à la recherche d’un nouvel horizon social

Alors que plusieurs villes du royaume ont été le théâtre, ces deux dernières semaines, de troubles marqués par des violences et la mort de plusieurs personnes, la question de la jeunesse marocaine s’impose avec acuité. Ces événements tragiques rappellent combien il est urgent de comprendre les tenants et les motivations profondes du mouvement de la « Génération Z » marocaine cette jeunesse connectée, éduquée, mais en quête de sens et de justice sociale.

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Face à la précarité, à la défiance politique et aux fractures sociales persistantes, la jeunesse marocaine, héritière d’un pays en mutation rapide, réclame un nouveau pacte entre l’État et les citoyens. Connectée au monde mais enracinée dans ses réalités, elle incarne à la fois l’espoir et l’impatience d’un continent jeune qui veut être entendu.

Les places publiques du Maroc bruissent d’une colère contenue. Dans les rues de Rabat, Casablanca ou Fès, de jeunes Marocains manifestent pacifiquement, exigeant une réforme en profondeur du modèle social. Emploi, santé, éducation, justice : leurs revendications dessinent les contours d’un malaise global, qui dépasse les frontières nationales.

Née à l’ère du numérique et des comparaisons internationales, cette « Génération Z » marocaine observe un monde ouvert, mais se heurte à un horizon souvent fermé. Le diplôme ne garantit plus l’emploi ; la méritocratie semble s’être dissoute dans les inégalités structurelles. Beaucoup aspirent à partir, faute d’un avenir stable dans leur propre pays.

Depuis deux décennies, le Maroc s’est engagé dans d’importantes réformes économiques et institutionnelles. La modernisation du pays, saluée par les bailleurs internationaux, a permis de consolider les infrastructures, d’attirer les investissements et d’élargir l’accès à l’éducation.
Mais ces progrès, réels, n’ont pas suffi à réduire les écarts.

Le chômage des jeunes urbains reste supérieur à 35 %, selon le Haut-Commissariat au Plan. Dans les zones rurales, la pauvreté structurelle, le manque d’opportunités et la précarité scolaire entretiennent un sentiment d’abandon. La montée du coût de la vie, particulièrement dans les grandes villes, renforce la fracture sociale.

Plus encore que les difficultés matérielles, c’est la crise de confiance qui frappe : beaucoup estiment que le système politique ne traduit plus les aspirations de la jeunesse. Les mécanismes de représentation traditionnels paraissent déconnectés d’une génération qui valorise la transparence, la participation et la mobilité.

Cette jeunesse marocaine partage avec ses homologues d’Afrique, d’Europe ou du Moyen-Orient une même quête de sens. Elle rejette les hiérarchies figées, interroge la légitimité des élites et se saisit des outils numériques comme espace d’expression.

Mais elle n’est pas seulement protestataire : elle invente. On la retrouve dans les start-up sociales, les collectifs culturels, les projets écologiques et citoyens. Elle expérimente, parfois en marge des institutions, un modèle de société fondé sur la créativité, l’équité et la solidarité.

À travers ses mobilisations, c’est moins la contestation du pouvoir qui s’exprime que la volonté d’un renouvellement du contrat social, adapté à une société marocaine plus éduquée, plus urbaine et plus consciente de ses droits.

Le Maroc n’est pas isolé dans ce mouvement de fond. En Tunisie, en Algérie ou en Égypte, les jeunes expriment la même lassitude face à des systèmes économiques bloqués et à des transitions politiques inachevées.
Partout en Afrique du Nord, le poids démographique de la jeunesse plus de 60 % de la population fait de cette catégorie un acteur central du devenir collectif.

Pour le royaume chérifien, cette pression générationnelle est aussi une opportunité. En investissant davantage dans la formation, l’innovation et la participation civique, le pays pourrait transformer ce potentiel en moteur de développement. À l’inverse, ignorer cette soif de reconnaissance risquerait d’alimenter le désengagement et l’émigration des jeunes talents.

La « Génération Z » marocaine ne rejette pas son pays : elle l’interpelle.
Ses attentes ne relèvent pas de l’utopie, mais d’un besoin de justice et de dignité. Elle souhaite participer aux décisions, non en spectatrice mais en actrice d’un futur plus équitable.

Redéfinir le contrat social suppose donc un double effort :
– du côté de l’État, une écoute réelle et des réformes concrètes ;
– du côté de la jeunesse, la construction d’un engagement citoyen structuré et durable.

L’enjeu dépasse le Maroc : il touche à la capacité de toute l’Afrique à offrir à sa jeunesse autre chose qu’un horizon d’exil.

Le cri de la jeunesse marocaine n’est pas celui de la rupture, mais de la refondation. Il exprime la volonté d’un dialogue entre générations, d’un pays qui assume son évolution sociale et sa modernité.
Dans ce Maroc en mouvement, la Génération Z se révèle non pas comme un problème à gérer, mais comme une force de renouvellement le visage d’un avenir encore possible, si la société accepte de l’écouter.

Celine Dou, pour La Boussole – infos

Allemagne : quand la lutte contre le harcèlement infantilise le réel

À Büren, une campagne municipale contre le harcèlement en piscine provoque un malaise profond. Loin de représenter la réalité, elle révèle la dérive symbolique de certaines institutions occidentales, plus soucieuses d’éviter les stéréotypes que de dire les faits.

Il s’agissait d’une initiative locale, bien intentionnée. Une affiche placardée à Büren, petite ville d’Allemagne, montrait une femme blanche se penchant de manière intrusive vers un enfant noir en fauteuil roulant, accompagnée d’un message de prévention contre les comportements inappropriés dans les piscines publiques. Mais en quelques jours, cette campagne a provoqué un tollé national. Pourquoi ? Parce qu’elle donne à voir un monde inversé, plus soucieux d’équilibre symbolique que de vérité observable.

La polémique soulevée en Allemagne n’est pas qu’une affaire d’image. Elle cristallise un débat plus large, propre aux sociétés occidentales : comment lutter contre les violences, sans mentir sur leur nature ? Peut-on prévenir sans représenter fidèlement ? Et surtout : que devient la démocratie lorsque ses institutions renoncent à nommer les faits pour des raisons idéologiques ou morales ?

L’affiche incriminée s’inscrit dans une série de visuels visant à sensibiliser les jeunes à la question du harcèlement dans les lieux publics. Selon les concepteurs, l’objectif était de briser les stéréotypes : montrer que tout le monde peut être victime, tout le monde peut être auteur. Une intention louable. Mais cette généralisation égalitaire s’est heurtée à une réalité moins symétrique.

En Allemagne, comme dans plusieurs pays d’Europe occidentale, les incidents en piscine liés à des agressions sexuelles ont fait l’objet de signalements répétés ces dernières années. De nombreux rapports y compris émis par les autorités elles-mêmes indiquent que les agresseurs identifiés sont majoritairement de sexe masculin, souvent jeunes, parfois issus de l’immigration récente. Ce sont là des faits. Ils ne sont ni des accusations globalisantes, ni des jugements de valeur, mais des constats documentés.

Or l’image promue à Büren semble précisément vouloir ignorer cette réalité. En inversant les rôles de manière artificielle, elle donne l’impression d’un discours institutionnel qui ne cherche plus à décrire le réel, mais à le réécrire. Et ce choix soulève des questions lourdes : peut-on protéger les plus vulnérables si l’on refuse de regarder qui les menace réellement ?

Ce cas n’est pas isolé. Depuis plusieurs années, nombre de campagnes de sensibilisation dans l’espace occidental s’inscrivent dans une logique de déconstruction des stéréotypes, même si cela implique de détourner ou d’inverser les tendances observées. Le raisonnement est le suivant : pour éviter de stigmatiser certains groupes, mieux vaut brouiller les représentations, quitte à produire un message déconnecté de la réalité.

Cette approche, qui se veut inclusive, produit cependant un effet paradoxal. En niant les asymétries, elle remplace l’analyse par l’égalisation abstraite. Et ce faisant, elle décrédibilise la parole publique. Car dans une démocratie, la pédagogie ne peut se substituer à la vérité. Dès lors que l’institution ne reflète plus fidèlement les faits, elle cesse d’être perçue comme protectrice. Elle devient suspecte.

Ce malaise ne concerne pas seulement la ville de Büren. Il s’inscrit dans une crise plus profonde : celle du rapport occidental au réel, à la responsabilité, et à la représentation. À trop vouloir ménager les perceptions, les institutions perdent le fil du réel. Et à force de chercher à ne choquer personne, elles finissent par choquer tout le monde.

Car la population, elle, continue d’observer ce qui se passe. Elle connaît les déséquilibres, les tensions, les situations concrètes. Lorsque l’image officielle contredit de manière flagrante ce que chacun constate, un soupçon naît : celui que l’on ne dit plus ce qui est, mais ce que l’on voudrait faire croire. Et dans ce vide, se glissent alors les récits extrémistes, les récupérations idéologiques, ou pire : la défiance totale.

C’est là l’un des risques les plus graves pour les sociétés démocratiques. Car il ne peut y avoir de confiance sans vérité. Et il ne peut y avoir de justice sans lucidité.

Ce n’est pas l’image d’un enfant noir qui choque. C’est son instrumentalisation au nom d’une prétendue symétrie des rôles. C’est l’effacement des réalités concrètes au profit d’une fiction morale. Car oui, il arrive que des femmes harcèlent. Il arrive que des enfants blancs soient victimes. Mais est-ce, dans les piscines publiques d’Allemagne, la configuration la plus fréquente ? Non. Et c’est bien ce décalage entre le message affiché et le réel observé qui a suscité l’incompréhension.

Prévenir le harcèlement, protéger les mineurs, lutter contre les violences sexuelles : ces objectifs sont essentiels. Mais leur mise en œuvre exige rigueur, courage et fidélité aux faits. Non pas pour pointer du doigt, mais pour cibler les actions. Car on ne soigne pas une société en masquant ses symptômes.

Cette campagne n’est pas seulement maladroite. Elle est symptomatique d’une évolution dangereuse : celle qui place la correction morale au-dessus de la véracité, qui préfère la cohérence idéologique à la lucidité, et qui croit que la forme peut guérir le fond.

Or la démocratie n’est pas un théâtre d’ombres. Elle suppose une confrontation permanente avec la réalité, même lorsque celle-ci dérange. Et si les institutions publiques veulent encore inspirer confiance, elles doivent refuser de confondre inclusion et confusion.

La prévention des violences ne gagnera rien à être désincarnée. Au contraire, elle perdra en efficacité, en crédibilité, et en justice.

1er juillet : journée mondiale du bandeau blanc, un appel renouvelé contre la pauvreté

Chaque année, le 1er juillet est consacré à la journée mondiale du bandeau blanc, un symbole international d’engagement pour dénoncer la pauvreté et mobiliser les consciences face à ses multiples manifestations. Cette date invite à une réflexion globale sur les mécanismes qui perpétuent les inégalités économiques et sociales, ainsi que sur les politiques publiques et les initiatives citoyennes destinées à y répondre.

La pauvreté dépasse le simple seuil de revenu. Si la Banque mondiale estime à environ 700 millions le nombre de personnes vivant avec moins de 2,15 dollars par jour, le phénomène inclut aussi des privations en termes d’accès à l’éducation, aux soins de santé, à l’eau potable, à un logement décent et à la participation sociale.

Cette dimension multidimensionnelle impose une approche globale et contextualisée pour évaluer et combattre la pauvreté, adaptée aux réalités spécifiques des différentes régions du monde.

Les régions d’Afrique subsaharienne et d’Asie du Sud concentrent la majorité des personnes en situation de pauvreté extrême. Ces territoires cumulent des défis démographiques, des instabilités politiques, des crises économiques récurrentes et les effets croissants du changement climatique.

Dans les pays dits développés, la pauvreté prend des formes plus subtiles : précarité énergétique, exclusion sociale, insécurité du logement. Ces nouvelles facettes témoignent de fractures sociales profondes, malgré des systèmes de protection sociale relativement robustes.

Les crises sanitaires, notamment la pandémie de Covid-19, ont mis en lumière la vulnérabilité des populations déjà précaires, exacerbant les inégalités existantes et fragilisant davantage les économies mondiales.

Au niveau international, les Objectifs de développement durable (ODD) fixés par l’Organisation des Nations unies placent la réduction de la pauvreté au cœur des priorités. Les stratégies mises en œuvre insistent sur une croissance économique inclusive, des investissements dans les secteurs clés de l’éducation et de la santé, ainsi que sur le renforcement des systèmes de protection sociale.

Les organisations non gouvernementales et les mouvements citoyens, à travers des campagnes symboliques comme le port du bandeau blanc, jouent un rôle essentiel dans la sensibilisation et la pression pour une action politique accrue.

La réduction durable de la pauvreté exige une approche intégrée, prenant en compte les liens entre justice sociale, gestion environnementale et stabilité politique. La bonne gouvernance, la transparence et la participation citoyenne apparaissent comme des leviers indispensables.

La communauté internationale est confrontée à la nécessité d’adapter ses politiques aux réalités locales, tout en assurant une coordination efficace et un soutien accru aux pays les plus vulnérables.

La journée mondiale du bandeau blanc rappelle ainsi que, malgré les progrès enregistrés, la pauvreté reste une réalité urgente qui appelle une mobilisation collective constante et renouvelée, à la fois politique, économique et sociale.

Irlande du Nord : tensions racistes et violences ciblent la communauté rom

Des violences à caractère raciste ont éclaté ces derniers jours dans plusieurs villes d’Irlande du Nord, visant des familles roms installées localement. Ces émeutes rappellent la fragilité du vivre-ensemble dans une région marquée par une histoire de conflits communautaires.

Des barricades érigées dans la nuit, des cocktails Molotov jetés contre des habitations, des familles contraintes de fuir sous la menace : Ballymena, Belfast et Londonderry, trois villes d’Irlande du Nord, ont été récemment le théâtre d’épisodes de violence ciblée contre la communauté rom. Si les incidents ne sont pas massifs, leur caractère répétitif et clairement raciste inquiète les autorités locales comme les organisations de défense des droits humains.

La minorité rom d’Irlande du Nord principalement originaire d’Europe de l’Est vit dans une précarité structurelle, souvent reléguée en périphérie des villes. Déjà confrontée à la stigmatisation, elle est désormais visée par des attaques directes, notamment à Ballymena, où plusieurs familles ont été contraintes de quitter leur logement. Des vidéos montrent des jeunes cagoulés ériger des barricades et proférer des menaces, tandis que d’autres s’attaquent à des véhicules appartenant à des résidents roms.

Les incidents survenus à Belfast et Londonderry suivent un schéma similaire. À chaque fois, les autorités tardent à intervenir, et les victimes expriment un sentiment d’abandon. Ce climat d’intimidation résonne comme un avertissement : la xénophobie, loin d’être un phénomène marginal, s’inscrit désormais dans une logique de violence organisée.

Si l’Irlande du Nord a connu une paix relative depuis les accords du Vendredi saint en 1998, les tensions intercommunautaires entre loyalistes unionistes (majoritairement protestants) et républicains nationalistes (majoritairement catholiques) continuent d’imprégner le tissu social. Le rejet de l’Autre y trouve un écho, y compris contre des populations extérieures au conflit historique.

Dans certaines zones urbaines, des groupes paramilitaires issus de ces deux camps continuent d’exister sous des formes diffuses. Ils instrumentalisent parfois la colère sociale, le chômage et les inégalités pour relancer une dynamique de bouc-émissaire. Dans ce contexte, les Roms, perçus comme étrangers, pauvres et sans défense, deviennent des cibles faciles.

La police nord-irlandaise (PSNI) a dénoncé ces attaques et lancé des enquêtes, sans annoncer pour l’instant de mise en accusation formelle. Le Conseil des droits de l’homme d’Irlande du Nord, ainsi que plusieurs associations comme PPR (Participation and the Practice of Rights), ont rappelé les obligations légales du gouvernement britannique en matière de protection des minorités.

Mais pour les observateurs, ces réponses restent insuffisantes. « Il ne suffit pas de condamner. Il faut agir en profondeur contre les discours de haine, et garantir une vraie intégration », résume un rapport de The Detail, média local d’investigation.

Au-delà de la haine ethnique, ces violences révèlent aussi une crise sociale plus large. Le Royaume-Uni, et l’Irlande du Nord en particulier, font face à une inflation persistante, à une crise du logement et à une désindustrialisation ancienne qui touche les milieux populaires. Dans ce paysage tendu, la présence de populations perçues comme bénéficiaires d’aides ou de logements sociaux suscite des réactions de rejet, souvent attisées par des rumeurs ou des campagnes de désinformation en ligne.

Alors que l’Union européenne s’est dotée d’un plan d’inclusion des Roms pour la décennie 2020–2030, la situation en Irlande du Nord montre les limites de son application dans les territoires post-Brexit. L’absence de cadre contraignant, l’affaiblissement des mécanismes de coopération judiciaire et sociale entre Bruxelles et Londres rendent plus difficile la lutte coordonnée contre les discriminations.

Les émeutes racistes contre les familles roms en Irlande du Nord ne sont pas un fait divers isolé. Elles s’inscrivent dans un climat de tensions identitaires, d’insécurité sociale et de relents nationalistes, alimentés parfois par des groupes extrémistes agissant en toute impunité. Ces événements rappellent que la paix ne suffit pas à garantir le vivre-ensemble. Elle doit s’accompagner d’une vigilance constante contre toutes les formes d’exclusion.

Concentration extrême des richesses : Oxfam alerte sur une accumulation hors norme au sommet

Selon un rapport publié ce 26 juin par l’ONG Oxfam, le 1 % des individus les plus riches de la planète a capté à lui seul 33 900 milliards de dollars de richesse supplémentaire entre 2015 et 2024. Un chiffre vertigineux qui, selon l’organisation, met en lumière l’accélération d’un processus de concentration patrimoniale incompatible avec les objectifs de justice sociale et de stabilité mondiale.

À partir de données issues de Forbes, Credit Suisse, UBS, ou encore de la Banque mondiale, Oxfam établit que sur les 77 000 milliards de dollars de richesse nouvelle créée à l’échelle mondiale durant cette période, près de 44 % ont été accaparés par le seul 1 % le plus fortuné.
En parallèle, les 99 % restants de la population mondiale ont dû se partager les 56 % restants avec des inégalités importantes au sein même de ce groupe.

L’ONG souligne que cette captation de valeur ne relève pas uniquement d’un effet d’enrichissement global, mais d’un déséquilibre structurel dans les mécanismes de création et de redistribution de la richesse.

Le rapport insiste sur le décalage entre cette accumulation au sommet et la précarisation croissante des populations vulnérables. À titre de comparaison, il suffirait de 2 % de cette richesse nouvellement captée (soit environ 678 milliards de dollars) pour sortir durablement de l’extrême pauvreté l’ensemble des personnes vivant avec moins de 2,15 dollars par jour, selon les estimations de la Banque mondiale.

Cette polarisation se traduit aussi par une montée des tensions sociales, la désaffection politique dans de nombreuses démocraties occidentales, et un affaiblissement des États dans leur capacité à fournir des services publics fondamentaux. Des effets qui, s’ils perdurent, pourraient éroder la cohésion sociale dans plusieurs régions du monde.

Dans ce contexte, Oxfam appelle à une réforme fiscale ambitieuse, notamment à travers :

  • Une taxation exceptionnelle des patrimoines extrêmes,
  • Une fiscalité progressive plus équitable au niveau mondial,
  • Et un renforcement de la lutte contre l’évasion fiscale, particulièrement dans les juridictions offshore.

L’organisation propose également que les revenus issus de ces nouvelles recettes fiscales soient prioritairement affectés à l’accès universel à l’éducation, aux soins de santé, et à la lutte contre le changement climatique.

Oxfam n’est pas seule à tirer la sonnette d’alarme. Le FMI, l’OCDE, et même certaines institutions financières comme la Banque mondiale ont récemment mis en garde contre l’instabilité que peuvent engendrer des écarts de richesse aussi marqués, aussi bien sur le plan économique que politique.

Les inégalités, lorsqu’elles atteignent de tels niveaux, ne sont plus un simple symptôme des déséquilibres économiques, mais un facteur structurant de désordres sociaux, affectant la capacité des sociétés à se projeter dans un avenir durable.

À l’heure où les défis globaux exigent une solidarité accrue qu’il s’agisse de climat, de santé ou de paix sociale la concentration extrême des richesses dans les mains d’une infime minorité interroge. Le rapport d’Oxfam, en chiffrant cet écart, appelle à repenser non seulement la fiscalité mondiale, mais aussi le sens même du développement économique.

Afrique du Sud : à Soweto, une Journée nationale de prière face aux fractures encore béantes de l’après-Apartheid

Hier dimanche, à Soweto, hauts lieux de la mémoire sud-africaine, des milliers de citoyens se sont rassemblés pour la Journée nationale de prière, placée sous le thème explicite : « Confronter le passé, bâtir une société réconciliée ». Derrière les hymnes et les supplications, c’est tout un pays qui, une fois de plus, a été contraint de regarder en face ses blessures profondes, héritées du régime d’Apartheid.

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La population mondiale largement sous-estimée ? Une étude pointe des milliards de personnes ignorées

Une étude scientifique internationale remet en cause l’exactitude des chiffres officiels de la population mondiale. Selon les chercheurs, des erreurs systémiques dans les méthodes de recensement, en particulier dans les zones rurales, pourraient cacher l’existence de près de trois milliards de personnes supplémentaires.

Publiée dans la revue Nature Communications, l’étude est le fruit du travail d’une équipe de chercheurs de l’Université Aalto en Finlande. Leur méthode s’appuie sur la confrontation de plusieurs bases de données démographiques globales avec des registres de réinstallations forcées menées à l’occasion de projets d’infrastructures hydrauliques notamment des barrages dans 35 pays du monde, couvrant la période de 1975 à 2010.

Ces registres de déplacements, utilisés pour l’indemnisation des populations affectées, présentent généralement un haut niveau de fiabilité, offrant ainsi un point de comparaison inédit avec les estimations globales traditionnelles.

Les résultats sont saisissants : les populations rurales seraient régulièrement sous-estimées, avec des écarts allant de 53 % à 84 % selon les périodes et les régions étudiées. Même pour l’année 2010, censée bénéficier de méthodes plus modernes, le sous-comptage atteindrait encore entre 32 % et 77 %.

Si ces écarts sont généralisés à l’échelle mondiale, la population rurale officiellement estimée à 3,5 milliards de personnes en 2020 pourrait en réalité être beaucoup plus nombreuse. Les chercheurs avancent qu’entre 1,9 et 3 milliards de personnes pourraient ainsi être « invisibles » dans les données démographiques officielles. Cela signifierait que la population mondiale, aujourd’hui évaluée par les Nations unies à 8,2 milliards d’individus, serait en réalité nettement plus élevée.

Ces possibles erreurs de comptage ne sont pas qu’une question statistique. Elles peuvent affecter directement :

  • La planification des infrastructures et des services publics : routes, écoles, hôpitaux et réseaux d’assainissement dépendent des estimations de population pour leur implantation et leur dimensionnement.
  • Les politiques de santé publique : une sous-estimation des populations rurales peut fausser les stratégies de vaccination, de prévention et de lutte contre les pandémies.
  • La gestion des catastrophes naturelles : des populations entières pourraient ne pas être correctement prises en compte lors des plans d’évacuation ou de distribution de l’aide humanitaire.
  • La distribution de l’aide internationale et des financements : le développement rural, déjà souvent négligé, pourrait pâtir d’une vision tronquée de la réalité démographique.

Le phénomène touche de manière particulièrement sensible les régions où les populations rurales sont nombreuses et souvent difficiles à recenser : l’Afrique subsaharienne, l’Asie du Sud et l’Asie du Sud-Est. L’étude souligne que les progrès des dernières années tels que l’utilisation d’imageries satellitaires, de données mobiles et de systèmes de positionnement géographique n’ont pas encore permis de résorber entièrement ces biais dans les zones les plus reculées.

Pour les pays du Sud, où les investissements d’infrastructures sont directement liés aux prévisions démographiques, l’enjeu est stratégique : sous-estimer la population rurale, c’est risquer de sous-financer durablement des millions de citoyens invisibles.

Face à ces conclusions, les chercheurs appellent à une refonte profonde des méthodologies démographiques globales. Les recensements nationaux restent souvent incomplets, irréguliers, voire obsolètes dans certains États fragiles. Le développement de nouvelles approches mixtes combinant technologies satellitaires, intelligence artificielle, données de terrain et enquêtes participatives apparaît désormais essentiel pour obtenir une image plus fidèle de la répartition réelle des populations humaines.

Dans un contexte de tensions croissantes autour des ressources, du climat, de la sécurité alimentaire et de la migration, l’exactitude des chiffres démographiques devient un paramètre stratégique majeur. Cette étude éclaire ainsi une faiblesse fondamentale de nombreuses politiques internationales : bâties sur des données incertaines, elles pourraient ignorer des centaines de millions de personnes, invisibilisées malgré leur poids réel dans les dynamiques économiques, sociales et environnementales globales.