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Iran : l’arrestation de Narges Mohammadi et les enjeux géopolitiques autour des droits humains

Le 12 décembre 2025, Narges Mohammadi, lauréate du Prix Nobel de la paix 2023, a été interpellée en Iran. Cette arrestation, dans un contexte de répression accrue, soulève des questions sur l’efficacité des distinctions internationales et sur les rapports de force dans les relations entre l’Iran et la communauté internationale.

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Narges Mohammadi est une militante iranienne de premier plan, connue pour son engagement en faveur des droits humains, notamment la lutte contre la peine de mort et pour la libération des femmes en Iran. Son arrestation ne constitue pas un incident isolé. Elle s’inscrit dans un parcours de répression continu, marqué par de multiples emprisonnements et condamnations depuis les années 2000. Lors de l’attribution du Prix Nobel de la paix en 2023, Mohammadi était encore incarcérée pour « propagation de la propagande contre l’État » et « action contre la sécurité nationale ». Cette distinction a permis de porter une attention internationale sur sa cause, mais aussi de mettre en lumière la répression systématique des opposants au régime en place à Téhéran.

L’arrestation de Narges Mohammadi intervient dans un contexte de forte répression en Iran, où les libertés fondamentales sont de plus en plus restreintes. Depuis les manifestations de 2022, déclenchées par la mort de Mahsa Amini en détention policière, les autorités iraniennes ont intensifié leur surveillance des militants des droits humains, des journalistes et des défenseurs de la démocratie. L’arrestation de Mohammadi semble être une réponse du régime à la contestation croissante, tant interne qu’internationale, contre ses pratiques autoritaires.

Elle a été interpellée à Mashhad, dans le nord-est du pays, lors d’une cérémonie en hommage à Khosrow Alikordi, un autre défenseur des droits humains décédé récemment. Cette situation semble illustrer la stratégie du gouvernement iranien : contrôler et museler toute forme de contestation, même dans des événements à caractère symbolique et pacifique. De plus, l’attaque physique et la violence présumée de son arrestation indiquent la brutalité de la répression exercée par les autorités iraniennes contre ceux qu’elles considèrent comme des ennemis du régime.

Le Comité Nobel a réagi vigoureusement à cette arrestation, exigeant la libération immédiate de la lauréate. Ce geste symbolique, bien qu’important pour la reconnaissance des luttes pour les droits humains, n’aura probablement pas de conséquences concrètes sur le régime iranien. En effet, si les prix Nobel peuvent offrir une légitimité morale, ils n’ont qu’une portée limitée dans un contexte géopolitique marqué par l’autonomie des États souverains et la priorité donnée aux intérêts stratégiques.

Dans ce cadre, les condamnations internationales s’accumulent, mais la situation de Narges Mohammadi reste tributaire d’un rapport de force où les États occidentaux, tout en exprimant des préoccupations sur les droits humains, n’ont pas montré une volonté forte de rompre avec leurs engagements géopolitiques dans la région. L’Iran, de son côté, semble se montrer de plus en plus imperméable aux pressions extérieures, notamment en raison de ses enjeux internes et de ses alliances stratégiques avec des acteurs comme la Chine et la Russie.

L’affaire Narges Mohammadi soulève la question de l’efficience des mécanismes internationaux pour défendre les droits humains. Les actions diplomatiques entreprises par les organisations internationales, telles que l’ONU ou l’UE, restent largement insuffisantes face à un régime déterminé à préserver son autorité. En l’absence de mesures concrètes telles que des sanctions ciblées ou des pressions économiques efficaces les répressions comme celle vécue par Mohammadi risquent de se multiplier sans que la communauté internationale ne puisse apporter une réponse significative.

Ainsi, au-delà du cas individuel de Narges Mohammadi, c’est l’efficacité de la diplomatie des droits humains et la véritable portée des distinctions internationales qui sont mises en question. Le cas de Mohammadi illustre les limites de l’action diplomatique dans des régimes autoritaires, où les droits humains sont souvent relégués au second plan au profit de considérations géopolitiques. L’Iran, fort de son indépendance politique et économique, semble prêt à affronter la critique internationale, comme l’ont démontré ses récentes prises de position face à l’Occident.

Au-delà de la situation politique iranienne, l’arrestation de Narges Mohammadi constitue un rappel de la nécessité de soutenir les mouvements de défense des droits des femmes dans des contextes autoritaires. Dans un pays où les droits des femmes sont sévèrement limités, la militante incarne un modèle de résistance pacifique, mais déterminée. Son combat pour l’abolition de la peine de mort et pour la reconnaissance des droits des femmes demeure une cause essentielle, non seulement pour l’Iran, mais aussi pour l’ensemble du monde.

Celine Dou, pour la boussole-infos

Coupe du monde 2026 : la décision de Seattle de consacrer un match aux revendications “LGBT” opposant l’Iran et l’Égypte relance le débat sur l’universalisation des normes sociétales occidentales

L’initiative de la municipalité de Seattle d’associer une rencontre de la Coupe du monde à une mise en avant des revendications regroupées sous l’acronyme “LGBT”, alors que l’Iran et l’Égypte deux États où ces pratiques sont illégales doivent s’affronter, met en lumière les tensions croissantes entre l’universalisme revendiqué par l’Occident progressiste et le pluralisme culturel défendu par une grande partie du Sud global.

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La décision, inédite dans l’histoire de la Coupe du monde, de qualifier une rencontre Iran–Égypte de « Pride Match » a provoqué l’indignation des deux pays concernés. Au-delà du désaccord diplomatique, cet épisode cristallise un débat fondamental : celui de la légitimité des normes sociétales occidentales à s’imposer comme références universelles, malgré la diversité des systèmes culturels et juridiques du reste du monde.

En voulant inscrire un symbole sociétal propre aux États-Unis d’Amérique dans un événement mondial, la municipalité de Seattle révèle la difficulté de concilier l’universalisation des valeurs occidentales et la reconnaissance du pluralisme culturel international.

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L’Édition du soir d’Ouest-France, le 9 décembre 2025, rapporte que la municipalité de Seattle, ville hôte de plusieurs rencontres de la Coupe du monde 2026, a décidé de qualifier l’un des matchs de « Pride Match ». La rencontre concernée oppose l’Iran à l’Égypte, deux pays dont les législations criminalisent les relations entre personnes du même sexe et considèrent ces pratiques comme contraires à l’ordre moral et juridique national.

L’initiative n’émane pas de la FIFA, mais de la ville hôte elle-même. Elle a immédiatement suscité des protestations officielles de Téhéran et du Caire, qui dénoncent une imposition culturelle et une absence de respect pour leurs normes internes. La FIFA, qui revendique une neutralité politique mais dont les décisions font régulièrement l’objet de controverses, se retrouve une nouvelle fois prise entre des sensibilités inconciliables : les attentes des municipalités occidentales progressistes et les conceptions culturelles des pays participants.

L’affaire du « Pride Match » ne peut être comprise qu’en la replaçant dans un débat plus large : celui de l’universalisme des normes sociétales occidentales. Dans plusieurs pays d’Amérique du Nord et d’Europe occidentale, les revendications regroupées sous le terme “LGBT” sont progressivement présentées comme relevant d’un ensemble de droits fondamentaux dont la portée serait universelle. Cette perspective ne fait pourtant pas consensus au sein même des sociétés occidentales, où elle continue d’alimenter d’importants clivages politiques et culturels.

Dans le reste du monde en Afrique, au Moyen-Orient ou en Asie ces questions sont appréhendées dans des cadres culturels, religieux ou juridiques profondément différents. Pour la majorité de ces États, il ne s’agit pas d’un débat exportable, mais d’une norme interne relevant de leur souveraineté culturelle. Ils soulignent par ailleurs qu’ils ne cherchent pas à imposer leurs conceptions aux nations occidentales, contrairement à ce qu’ils perçoivent comme une pression idéologique exercée à leur encontre.

L’asymétrie est frappante : l’Occident invoque la diversité culturelle, mais demande à cette diversité de se conformer à ses propres normes, tandis que le Sud global revendique simplement la reconnaissance de ses spécificités.

En dédiant un match de la Coupe du monde à un symbole sociétal non partagé par les pays concernés, la municipalité de Seattle a transformé une rencontre sportive en acte de positionnement idéologique. Pour les gouvernements iranien et égyptien, ce choix ne peut passer pour une simple célébration locale : il apparaît comme une tentative d’imposer une norme culturelle étrangère et, dans une certaine mesure, incompatible avec leurs principes juridiques et religieux.

Cette controverse met en lumière une tension géopolitique contemporaine majeure : d’un côté, un Occident progressiste qui s’inscrit dans une logique universaliste ; de l’autre, une majorité de nations qui affirment le pluralisme des visions du monde. Le football, censé constituer un espace de neutralité culturelle et de rassemblement global, devient ainsi l’un des terrains où se manifestent les divergences les plus profondes entre civilisations.

L’épisode du « Pride Match » dépasse largement la polémique qui l’a déclenché. Il révèle la difficulté croissante de maintenir la neutralité culturelle dans les grands événements internationaux, à une époque où les normes sociétales occidentales tendent à se présenter comme des références universelles. La Coupe du monde 2026 sera inévitablement marquée par cette fracture culturelle. En exposant les contradictions entre universalisation et pluralisme, l’affaire Seattle–Iran–Égypte rappelle que la mondialisation des compétitions sportives ne signifie pas la mondialisation des valeurs.

Celine Dou, pour la boussole-infos

Iran : découverte d’un gisement de 61 millions de tonnes et enjeux géopolitiques face aux puissances internationales

L’Iran a annoncé la découverte d’un gisement minier estimé à 61 millions de tonnes dans la province de Shadan, au sud-est du pays. Cette révélation intervient dans un contexte de sanctions économiques prolongées et de tensions persistantes avec les États‑Unis d’Amérique, relançant les interrogations sur la souveraineté iranienne, la sécurité régionale et les équilibres stratégiques au Moyen-Orient.

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Dans un monde où la maîtrise des ressources naturelles conditionne la puissance et l’autonomie des États, la découverte de Shadan ne se limite pas à un enjeu économique. Pour l’Iran, ce gisement représente un levier de développement et de renforcement de son autonomie industrielle. Pour les observateurs internationaux, il soulève la possibilité d’une attention particulière de la part des grandes puissances, notamment des États‑Unis d’Amérique, qui pourraient invoquer des motifs politiques ou démocratiques dans leurs interactions avec Téhéran.

1. Nature du gisement et implications économiques

Le gisement découvert par le ministère iranien de l’Industrie, des Mines et du Commerce contient 61 millions de tonnes de minerai. Cette estimation correspond à la quantité de minerai identifiée, mais ne reflète pas nécessairement la réserve exploitable économiquement, laquelle dépend de la teneur métallique et des contraintes techniques d’extraction. Sur le plan économique, la valorisation de ce gisement pourrait permettre à l’Iran de diversifier ses sources de revenus, de renforcer ses industries minière et manufacturière, et de limiter l’impact des sanctions internationales qui pèsent sur son économie depuis plusieurs années. À titre de comparaison, le Chili utilise ses réserves de cuivre pour renforcer son influence économique tout en consolidant ses alliances stratégiques, tandis que l’Afrique du Sud a exploité ses gisements de platine et de manganèse pour développer ses capacités industrielles et accroître son autonomie vis-à-vis des circuits économiques internationaux. Ces exemples montrent que la maîtrise de ressources stratégiques peut transformer l’économie d’un pays et renforcer sa position sur la scène internationale.

2. Hypothèse de réactions internationales : le rôle potentiel des États‑Unis d’Amérique

Historiquement, les États‑Unis d’Amérique ont parfois justifié des interventions ou pressions sur des pays riches en ressources stratégiques en invoquant la promotion de la démocratie ou la stabilité régionale. Les interventions en Irak en 2003 ou en Syrie, par exemple, illustrent la coexistence entre discours officiel et motivations géopolitiques ou économiques sous-jacentes. Dans le cas de l’Iran, il n’existe aucune preuve d’une intervention américaine directe en lien avec le gisement de Shadan, mais il est plausible que la découverte attire l’attention internationale. Les États‑Unis pourraient formuler publiquement des préoccupations sur la stabilité régionale ou les normes démocratiques, tout en défendant simultanément leurs intérêts stratégiques et économiques. Cette analyse ne prétend pas anticiper une action concrète, mais repose sur des schémas historiques observés dans d’autres contextes où les ressources naturelles ont été au cœur de la diplomatie internationale.

3. Ressources naturelles et puissance stratégique

Les minerais stratégiques ne se limitent pas à leur valeur commerciale : ils alimentent l’industrie de haute technologie, la défense et les infrastructures critiques. Leur maîtrise confère à un État un levier de négociation dans ses relations internationales et contribue à la protection de sa souveraineté. La découverte du gisement iranien pourrait transformer le rapport de forces régional, à l’instar des stratégies de gestion de ressources observées au Nigéria, en Angola ou au Congo, où la richesse naturelle influence directement la diplomatie et les alliances. Cette dynamique souligne que la valorisation des ressources stratégiques est indissociable des choix géopolitiques et des interactions avec les puissances extérieures.

4. Perspectives pour l’Iran et les pays émergents

La découverte du gisement de Shadan offre plusieurs enseignements pour la région et au-delà. L’Iran doit sécuriser l’exploitation et la transformation du minerai pour préserver sa souveraineté et sa capacité d’action autonome. La maîtrise des ressources stratégiques permet également de renforcer les partenariats internationaux, notamment avec des puissances non occidentales, tout en réduisant la dépendance vis-à-vis des circuits dominés par les grandes puissances. Les pays émergents et africains peuvent tirer des leçons de cette situation en intégrant des stratégies de gestion souveraine de leurs propres ressources, afin de renforcer leur développement et leur influence sur la scène internationale. La gestion prudente et stratégique des ressources naturelles devient ainsi un élément clé de la diplomatie et de la sécurité nationale.

Le gisement de Shadan illustre l’intersection entre économie, géopolitique et souveraineté nationale. S’il peut renforcer l’autonomie iranienne et ses alliances stratégiques, il peut aussi attirer l’attention internationale, notamment celle des États‑Unis, pour des motifs officiellement politiques mais potentiellement liés à des intérêts stratégiques. Cette situation rappelle aux pays émergents et africains l’importance d’une gestion prudente et souveraine des ressources naturelles, condition essentielle pour protéger leur développement et renforcer leur influence dans un monde multipolaire.

Celine Dou

L’Iran fait face à une grave pénurie d’eau : au-delà de la sécheresse, une question de gestion et d’institutions

L’Iran traverse une crise hydrique majeure qui touche des millions de citoyens. Les rivières s’assèchent, les nappes phréatiques s’épuisent et certaines régions subissent des restrictions sévères sur l’eau potable. Si la sécheresse naturelle est un facteur, cette pénurie révèle surtout des insuffisances de gouvernance et des choix politiques qui aggravent la situation.

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En Iran, plusieurs provinces connaissent actuellement des pénuries d’eau qui perturbent la vie quotidienne des habitants. L’accès à l’eau potable devient limité, les systèmes d’irrigation sont insuffisants et certaines zones rurales et urbaines doivent rationner la consommation. Cette situation, souvent présentée comme une conséquence directe de la sécheresse, est en réalité le reflet de dysfonctionnements structurels dans la gestion des ressources hydriques.

L’épuisement des nappes phréatiques et la surexploitation des rivières par des pratiques agricoles intensives et parfois illégales aggravent le stress hydrique. Des infrastructures anciennes et mal entretenues contribuent à des pertes importantes, tandis que l’urbanisation rapide de villes comme Téhéran accentue la demande en eau. Cette combinaison de facteurs montre que le problème dépasse largement le climat : il s’agit d’un défi de gouvernance et de politique publique.

L’impact social et politique de cette crise est significatif. Les restrictions d’eau et les inégalités d’accès provoquent des tensions entre provinces et entre populations rurales et urbaines. Dans certaines zones, la frustration croissante des citoyens a conduit à des manifestations locales, traduisant une perception de gestion injuste des ressources. La crise met en lumière comment la politique de l’eau, lorsqu’elle est déficiente ou clientéliste, peut devenir un facteur d’instabilité sociale.

L’analyse des pratiques agricoles montre que l’eau est utilisée de manière disproportionnée et souvent inefficace. L’irrigation traditionnelle inondante et la culture de plantes très consommatrices entraînent un gaspillage massif, sans générer de valeur économique suffisante pour compenser ce déséquilibre. L’urbanisation et le manque de planification des infrastructures hydriques amplifient ce problème, rendant la population vulnérable face à des épisodes de sécheresse de plus en plus fréquents.

La crise en Iran illustre également les limites des politiques publiques dans un contexte où les intérêts politiques et économiques peuvent influencer la distribution et l’accès à l’eau. Des experts internationaux recommandent une réforme profonde des institutions responsables de la gestion de l’eau, combinée à des investissements dans la modernisation des infrastructures et le contrôle strict des usages agricoles. Ces mesures sont jugées essentielles pour garantir l’équité, la durabilité et la résilience face aux aléas climatiques.

En conclusion, la pénurie d’eau en Iran ne peut pas être réduite à la sécheresse naturelle. Elle est le résultat de choix institutionnels et politiques, d’une planification insuffisante et de pratiques de gestion des ressources hydriques inadaptées. Comprendre cette crise nécessite donc de dépasser l’évidence météorologique pour analyser les structures de gouvernance et les décisions publiques qui déterminent l’accès à une ressource vitale pour des millions de personnes.

Celine Dou

Iran : la loi sur l’espionnage menace la liberté d’expression et interpelle la communauté internationale

Le Parlement iranien a adopté une nouvelle loi sur l’espionnage qui prévoit la peine de mort pour certaines publications jugées « criminelles » sur les réseaux sociaux. Cette législation suscite de vives inquiétudes sur la répression de la liberté d’expression et les risques d’exécutions arbitraires dans le pays.

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Adoptée en juin 2025, cette loi vise à renforcer les sanctions contre toute personne accusée de « coopération avec des gouvernements hostiles », notamment Israël et les États‑Unis d’Amérique. Les amendements introduisent la possibilité de qualifier ces actes de « corruption sur terre » (efsad fel-arz), une infraction passible de la peine capitale dans le droit iranien.

Par ailleurs, la loi englobe la propagande ou toute activité en ligne jugée « hostile » ou portant atteinte à la « sécurité nationale », ouvrant la voie à des condamnations lourdes, incluant la prison à vie et la peine de mort.

Cette législation menace directement les journalistes, activistes, défenseurs des droits humains et internautes, qui risquent d’être accusés d’espionnage ou de « corruption sur terre » pour des activités pourtant pacifiques. Amnesty International et plusieurs ONG ont alerté sur le risque de procès arbitraires et de tortures dans les prisons iraniennes, notamment à Evin, où sont détenus de nombreux journalistes et opposants politiques.

Les minorités ethniques et religieuses, ainsi que la jeunesse connectée aux réseaux sociaux, apparaissent particulièrement vulnérables. L’autocensure se généralise, freinant la circulation de l’information et les débats critiques dans la société civile.

Cette loi s’inscrit dans un contexte de tensions régionales et internationales. Les récentes frappes israéliennes et les accusations d’espionnage à l’encontre de citoyens iraniens ont été suivies d’une vague d’arrestations. Le gouvernement iranien justifie sa législation comme une mesure de « protection nationale », mais celle-ci s’aligne également sur un contrôle renforcé de l’opinion publique, limitant la contestation interne.

Pour la communauté internationale, ce texte constitue un signal préoccupant sur le respect des droits fondamentaux et des engagements internationaux de l’Iran, notamment en matière de libertés civiles et de procès équitables.

Au-delà de l’Iran, cette loi soulève des questions sur la manière dont les régimes peuvent instrumentaliser des accusations d’espionnage pour restreindre la liberté d’expression. Elle illustre le risque de criminalisation des voix dissidentes, particulièrement dans un monde où l’information circule rapidement et globalement.

Elle souligne également l’importance du suivi international : sanctions ciblées, pressions diplomatiques et soutien aux journalistes et défenseurs des droits humains sont essentiels pour prévenir les abus et protéger les libertés fondamentales.

La loi iranienne sur l’espionnage n’est pas seulement une question interne : elle résonne comme un avertissement sur les limites de la liberté d’expression dans un régime autoritaire. En restreignant le droit de parole et en menaçant la vie des citoyens pour leurs opinions, l’Iran confronte la communauté internationale à un dilemme : comment défendre les droits humains face à des textes législatifs qui transforment la parole en crime.

Celine Dou

Iran-Afghanistan : le retour contraint de milliers de réfugiés afghans plonge le pays dans une crise humanitaire silencieuse

Face à la politique d’expulsion de l’Iran, des centaines de milliers d’Afghans reviennent dans leur pays d’origine avec “rien du tout”. Une crise migratoire majeure, largement ignorée, qui interroge sur les responsabilités régionales et internationales.

Au fil des mois, les colonnes de véhicules franchissant la frontière entre l’Iran et l’Afghanistan ne cessent de grossir. À leur bord, des familles entières, souvent épuisées, revenues sans papiers, sans argent, sans abri. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 691 000 Afghans ont été refoulés d’Iran depuis janvier 2025, dont 70 % dans le cadre de retours forcés. Cette vague d’expulsions s’est intensifiée en juin, avec un pic à 30 000 retours par jour, alors que Téhéran fixait un ultimatum au 6 juillet pour le départ volontaire des étrangers en situation irrégulière.

Derrière ces chiffres, une réalité sociale brutale : des hommes, des femmes et des enfants chassés d’un pays où ils avaient parfois reconstruit une vie depuis des années, voire des décennies, et renvoyés dans un Afghanistan ravagé par l’instabilité, la pauvreté et le repli autoritaire.

L’Iran a justifié cette opération par une volonté de réguler la présence de ressortissants étrangers sur son territoire. Officiellement, il s’agit de réduire l’immigration illégale, de protéger le marché du travail iranien en crise, et de répondre à des impératifs sécuritaires. Pourtant, l’échelle et la brutalité de ces expulsions interrogent. Le nombre de retours a doublé entre mai et juin, selon les données de l’OIM, et près d’un quart de million d’Afghans ont été renvoyés en un mois, la majorité par la frontière de Zabol, dans des conditions souvent inhumaines.

Certains experts y voient aussi une volonté de pression politique sur les Talibans, dans un contexte régional complexe marqué par des tensions persistantes autour de l’eau, du commerce frontalier, et des questions sécuritaires. Téhéran se montre ainsi capable de faire peser une lourde charge démographique et sociale sur le régime de Kaboul.

« Nous n’avons rien ici. Pas de maison, pas de travail, pas d’avenir », confie à France 24 un jeune père de famille expulsé de Shiraz. Cette phrase, récurrente dans les témoignages, résume la tragédie que vivent les rapatriés. Beaucoup ont quitté l’Afghanistan depuis longtemps, fuyant la guerre ou la misère. De retour, ils retrouvent un pays qu’ils ne reconnaissent plus : un État failli, des infrastructures de base délabrées, un système éducatif partiellement fermé aux filles, un chômage massif, et une aide humanitaire sous-financée.

Les Talibans ont certes promis d’installer des centres d’accueil, de verser des aides financières ponctuelles et de distribuer des rations alimentaires. Mais les dispositifs restent largement insuffisants face à l’ampleur des besoins. L’OIM, quant à elle, admet n’avoir pu apporter un minimum d’assistance qu’à moins de 3 % des personnes renvoyées lors des jours de forte affluence.

Alors que les projecteurs médiatiques mondiaux sont tournés vers d’autres théâtres, cette crise migratoire afghano-iranienne reste largement ignorée. Elle reflète pourtant une réalité plus large : l’invisibilité croissante des réfugiés du Sud global face aux priorités géopolitiques des puissances dominantes. Le retrait progressif des financements humanitaires occidentaux depuis la prise de pouvoir des Talibans a aggravé la situation. L’argument idéologique, selon lequel toute aide pourrait légitimer le régime de Kaboul, se traduit concrètement par l’abandon de populations entières.

Il est par ailleurs frappant de constater l’absence de réaction de la communauté internationale, en particulier de l’Union européenne, qui a pourtant consacré des millions d’euros à des dispositifs d’« externalisation des frontières » dans des pays tiers, dont l’Iran. L’Afghanistan, comme d’autres pays de transit ou d’origine, reste une zone tampon invisible, utilisée pour endiguer les flux migratoires sans assumer les conséquences humaines.

Ce retour massif et précipité des Afghans d’Iran vient s’ajouter aux tensions économiques et sociales internes que subit déjà le pays. Il menace la stabilité de provinces entières, notamment celles de l’Ouest, qui voient leur population croître de façon soudaine sans services adaptés. À court terme, c’est un risque de désorganisation sociale, voire de conflits locaux, qui s’installe. À long terme, ce sont des générations entières plongées dans l’insécurité alimentaire, l’exclusion éducative et l’absence de perspectives.

La question qui se pose alors est simple : combien de temps la communauté internationale continuera-t-elle de détourner le regard ?

Iran | Golshifteh Farahani, une actrice en exil qui parle au nom d’un peuple réduit au silence

L’actrice franco-iranienne Golshifteh Farahani a récemment livré un discours bouleversant en soutien au peuple iranien. Entre poésie, mémoire et engagement, sa parole résonne comme une alerte : celle d’un peuple qui tend la main au monde libre pour ne pas sombrer dans l’oubli

Récemment invitée à s’exprimer publiquement en France, Golshifteh Farahani a choisi un mode d’expression rare mais puissant : la poésie. En lisant un extrait de « La Conscience » de Victor Hugo, elle a donné une résonance universelle à l’oppression que subissent des millions d’Iraniens. « C’est la mort de la conscience humaine », a-t-elle déclaré, la voix tremblante mais l’émotion parfaitement maîtrisée. À travers ce geste artistique et politique, elle a redonné souffle à la parole étouffée d’un peuple privé de liberté.

« Le peuple iranien vous tend la main. Il n’a plus peur. Il crie pour vivre. Il crie pour exister. » Ces mots, simples et directs, sont devenus le fil rouge de son intervention. Un cri digne, adressé à la communauté internationale.

Golshifteh Farahani n’est pas une figure de l’opposition politique au sens strict. Elle incarne quelque chose de plus intime et de plus fort : la possibilité de dire non, par l’art, à un système qui mutile les corps et les esprits. Depuis qu’elle a quitté l’Iran en 2008 après avoir joué sans voile dans un film étranger, elle est devenue une voix majeure de la diaspora iranienne.

Installée en France, elle n’a jamais cessé de porter la cause de celles et ceux qui, en Iran, vivent sous surveillance, sous censure, sous menace. Déjà, en 2023, elle avait ému lors de la cérémonie des César, en évoquant Mahsa Amini, morte sous les coups de la police des mœurs, et en appelant à la solidarité avec les femmes iraniennes.

Son discours de 2025, plus intime, plus poétique, s’inscrit dans cette continuité. Il refuse le ton accusateur, lui préférant celui de la dignité. Et c’est précisément cette retenue qui frappe.

Depuis l’automne 2022, la société iranienne vit une séquence particulièrement brutale. Le soulèvement populaire qui a suivi la mort de Mahsa Amini a donné naissance au mouvement Femmes, Vie, Liberté. Cette révolte, largement portée par les femmes et les jeunes, a été écrasée dans le sang. Arrestations massives, disparitions forcées, procès expéditifs, exécutions : les témoignages documentés par des ONG dressent un tableau d’une extrême violence.

Dans ce climat de répression, la parole des exilés iraniens est devenue une ressource précieuse. Elle permet de maintenir une mémoire vivante, d’informer au-delà des censures, et de rappeler que l’opinion publique mondiale ne peut se permettre de détourner le regard.

Farahani le dit à sa manière : « L’Histoire regarde. » Et à travers elle, c’est toute une génération d’Iraniens qui espère que leur combat ne sera pas oublié

À la croisée de la culture et de l’engagement, Golshifteh Farahani appartient à cette catégorie rare d’artistes capables de faire entendre une cause au-delà des frontières idéologiques. Ses rôles au cinéma, sa parole dans les médias, ses gestes publics, tout chez elle participe à une diplomatie du sensible. Elle ne prétend pas représenter une opposition organisée. Elle porte, au contraire, une voix singulière : celle de l’exil sans rupture, de la fidélité douloureuse à un pays qu’on a quitté mais jamais abandonné.

Ce discours s’adresse aussi, implicitement, aux sociétés occidentales. La cause iranienne peine parfois à mobiliser l’attention, alors que d’autres crises monopolisent les regards. Pourtant, les principes que défendent les manifestants iraniens liberté, égalité, dignité sont ceux-là mêmes qui fondent les démocraties libérales.

Le message de Farahani pose une question directe à l’opinion publique : Que valent nos principes s’ils n’inspirent pas notre solidarité ? Elle tend la main, au nom de son peuple, mais aussi en tant que citoyenne d’un monde qui ne peut pas se résigner à la hiérarchie des luttes.

Le discours de Golshifteh Farahani n’est ni un manifeste politique, ni une plainte personnelle. C’est un acte de résistance. Une forme d’alerte douce mais intransigeante. En convoquant Victor Hugo, elle relie le combat du peuple iranien à une mémoire universelle : celle des luttes pour la justice, partout où elle a été bafouée.

Et si l’art ne renverse pas les régimes, il empêche qu’on s’habitue à l’inacceptable.